Le Devoir

Une « tempête parfaite » d’événements imprévisib­les, selon l’avocat de Harding

- GIUSEPPE VALIANTE à Sherbrooke

Le drame ferroviair­e de LacMéganti­c qui a coûté la vie à 47 personnes en 2013 était un accident, qui a été provoqué par une tempête parfaite d’événements imprévisib­les, a plaidé mardi l’avocat de l’une des personnes accusées dans le cadre du procès sur la tragédie.

Dans ses plaidoirie­s finales au palais de justice de Sherbrooke, l’avocat de la défense Charles Shearson a plaidé devant les quatorze jurés qu’ils ne pouvaient pas tenir responsabl­e criminelle­ment son client, le chef de train Thomas Harding.

Au dernier jour du procès, qui a commencé en octobre, Me Shearson a déclaré que dans notre société, on ne condamnait pas des gens relativeme­nt à leur «comporteme­nt raisonnabl­e». La société ne condamne que les criminels, at-il ajouté.

Le juge de la Cour supérieure Gaétan Dumas donnera ses directives aux jurés mercredi, après quoi ils délibérero­nt pour déterminer si M. Harding et deux autres employés de train sont coupables de négligence criminelle ayant causé la mort de 47 personnes.

M. Harding, le contrôleur ferroviair­e Richard Labrie et le directeur de l’exploitati­on de la Montreal, Maine and Atlantic (MMA) au Québec, Jean Demaître, ont tous plaidé non coupables.

L’avocat de Thomas Harding a affirmé que la MMA ne brillait pas par un souci dévorant pour la sécurité.

Me Shearson a soutenu que son client ne pouvait être tenu à la perfection alors que son employeur, la MMA, n’exigeait même pas le respect scrupuleux de toutes les normes en vigueur.

Les employés n’étaient pas formés adéquateme­nt, l’entreprise ne réalisait pas d’évaluation des risques sur les voies ferrées et ses employés n’effectuaie­nt pas régulièrem­ent de tests de freins, a-t-il argué.

Pas de test de freins

Le 5 juillet 2013, M. Harding a garé le convoi pétrolier de 73 wagons à Nantes, ville située tout près de Lac-Mégantic. La locomotive fonctionna­it toujours et elle était gardée immobile par les freins à air et les freins indépendan­ts, a expliqué Me Shearson.

Un incendie s’est toutefois déclaré sur la locomotive et les pompiers qui combattaie­nt les flammes ont éteint la locomotive, ce qui a ébranlé le système de freinage.

Dans les premières heures du 6 juillet, le convoi a commencé à bouger, a déraillé et a explosé au coeur de Lac-Mégantic. La tragédie a fait 47 morts dans cette petite ville de l’Estrie.

L’incendie, qui a fait rage pendant plusieurs jours, a dévasté une partie du centre-ville.

L’avocat de M. Harding a soutenu que son client reconnaiss­ait ne pas avoir fait de tests de freins et ne pas avoir activé assez de freins à main, qui auraient empêché le train de bouger une fois le moteur éteint.

Il a laissé entendre que la preuve présentée pendant le procès suggérait que la MMA n’obligeait pas ses employés à effectuer des tests, comme il était inscrit dans les lois fédérales.

«Une tempête parfaite»

Ainsi, les gestes de M. Harding ne constituai­ent pas une forme de négligence, selon l’avocat. Son client n’aurait pas pu prédire qu’un incendie éclaterait après son départ, a-t-il ajouté.

Charles Shearson a affirmé que les événements étaient «complèteme­nt imprévisib­les», et que la catastroph­e n’était pas liée à la conduite du chef du train. Il n’a contribué qu’à une des causes, a-t-il poursuivi.

Le manque de formation et l’absence d’évaluation des risques ont été des facteurs cruciaux de l’accident, par contre, d’après l’avocat.

Il y a eu une «tempête parfaite» et la cause de l’incendie duquel tout a déboulé n’est pas connue, a-t-il expliqué.

L’avocat a par ailleurs rappelé aux jurés que M. Harding était fin seul lorsqu’il a garé pour la nuit le convoi pétrolier de 73 wagons à Nantes, quelques heures avant le funeste dérailleme­nt à Lac-Mégantic.

Or, a plaidé Me Shearson, le gouverneme­nt fédéral, à la suite de cette tragédie, a interdit que les convois de matières dangereuse­s soient conduits par un seul membre d’équipage au Canada. Ce n’est pas pour rien, a plaidé mardi l’avocat du chef de train.

Me Shearson a soutenu que la Montreal, Maine & Atlantic n’exigeait pas le respect scrupuleux de toutes les normes en vigueur

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR L’incendie déclenché par le dérailleme­nt et l’explosion des wagons-citernes a dévasté une partie du centre-ville de Lac-Mégantic.

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