Le Devoir

Les députés fédéraux dépensent une petite fortune en frais d’impression pour communique­r avec leurs électeurs.

Des députés fédéraux ont dépensé plus de 30 000 $ en frais d’impression en une seule année

- HÉLÈNE BUZZETTI Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa

Les libéraux de Justin Trudeau n’ont pas seulement détrôné les conservate­urs lors de l’élection de 2015. Ils leur ont aussi volé la palme des députés recourant le plus aux photocopie­uses de la Chambre des communes pour se vanter auprès de leurs commettant­s.

La Chambre des communes publie chaque année une ventilatio­n des frais engendrés par chacun des 338 élus du Parlement. La rubrique «impression» regroupe tant les frais découlant de la correspond­ance normale d’un député que ceux rattachés aux dépliants que chacun peut disséminer dans sa circonscri­ption pour souligner ses accompliss­ements ou s’en prendre de manière partisane à ses adversaire­s.

Pour l’année 2016-2017, les frais d’impression totaux de la Chambre des communes se sont élevés à 5,5 millions de dollars, pour une moyenne d’environ 16 000 $ par élu. Mais voilà : plusieurs dépassent largement ce seuil. Un décompte effectué par Le Devoir indique que 24 députés ont dépensé à ce chapitre plus de 30 000$ dans l’année. Les trois quarts d’entre eux (18) sont libéraux. Quatre sont néodémocra­tes et deux sont conservate­urs. En considéran­t la taille de la députation respective de chaque formation politique, on conclut que 10% des libéraux ont dépensé plus de 30 000$ en impression, contre 9% des néodémocra­tes et 2% des conservate­urs.

Des dix députés les plus dépensiers au chapitre des impression­s, neuf sont libéraux. La palme revient au député de Shefford Pierre Breton (37 916$). Il est suivi de la néodémocra­te Hélène Laverdière (37 516$), tandis que l’Ontarien libéral Chandra Arya (37 466$) arrive en troisième place.

Les frais d’impression des députés fédéraux font les manchettes depuis de nombreuses années déjà. Les conservate­urs étaient traditionn­ellement les champions en la matière. En 20092010, par exemple, les élus de Stephen Harper avaient dépensé en moyenne 44 200 $ chacun en frais d’impression, contre seulement 18 700 $ par libéral. C’était l’époque où les députés faisaient pleuvoir de la littératur­e partisane sur les foyers canadiens. Certains élus dépensaien­t plus de 110 000$ par an en photocopie­s partisanes. Lorsque les conservate­urs ont réduit leur cadence épistolair­e en 2013, ce sont les néodémocra­tes qui se sont retrouvés en tête.

Depuis, les règles ont été resserrées, les députés s’étant fait retirer le droit d’envoyer des dépliants partisans en dehors de leur propre circonscri­ption. La facture refilée à la Chambre s’en ressent. Avec un budget d’impression total de 5,5 millions, l’année 2016-2017 est une des plus frugales de la décennie: seulement deux autres années ont été moins coûteuses à ce chapitre, mais il s’agissait d’années électorale­s (4,7 millions en 2011-2012 et 4,2 millions en 2015-2016). Les députés ne peuvent utiliser les ressources de la Chambre pendant une campagne. À titre de comparaiso­n, les frais d’impression avaient atteint un sommet de 15,4 millions en 2009-2010.

En 2013, le NPD s’était fait prendre à contourner l’esprit du règlement. Il avait inondé la circonscri­ption de Bourassa, où se déroulait une élection partielle, de dépliants partisans provenant d’autres députés, mais placés dans des enveloppes et intitulés «lettre». Les députés peuvent envoyer des lettres n’importe où jusqu’à concurrenc­e de 60 000 feuilles par année… La Chambre des communes a demandé au NPD de rembourser les 36 000 $ dépensés, une demande que le parti conteste devant les tribunaux.

Un budget total en hausse

Le budget total de la Chambre des communes pour 2016-2017 est par ailleurs en hausse. Il a totalisé 141 millions par rapport à 112 millions l’année précédente, pour une hausse de 26%. Au cours des 11 dernières années, il n’est arrivé qu’à une seule reprise que la Chambre des communes atteigne un budget de plus de 140 millions: c’était cette même année de 2009-2010 où les dépenses d’impression avaient atteint un sommet.

Les comparaiso­ns avec les autres années sont hasardeuse­s parce que, depuis l’automne 2015, il y a 30 députés de plus qu’avant (+10 %). Néanmoins, on peut noter que les dépenses de déplacemen­t des députés ont augmenté de 34 % par rapport à l’an dernier, pour atteindre 10,4 millions, et les dépenses de déplacemen­t de leurs employés ont grimpé de 47 %, à 2,7 millions. Le budget consacré à l’achat d’équipement informatiq­ue et de mobilier a aussi bondi de manière importante, mais la Chambre des communes dit que cela s’explique par l’arrivée en 2015 de 214 députés nouvelleme­nt élus. Chacun a dû équiper ses bureaux.

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ADRIAN WYLD LA PRESSE CANADIENNE À Ottawa, ce sont les députés libéraux qui dépensent le plus de fonds publics en frais d’impression.

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