Le Devoir

Des ONG s’attaquent au géant Samsung

- BENJAMIN LEGENDRE à Paris

Travail d’enfants, logements indignes, intoxicati­ons au benzène: deux ONG relancent leurs accusation­s de violations des droits de la personne en Chine par Samsung, en déposant à Paris une nouvelle plainte pour pratiques commercial­es trompeuses contre le géant sud-coréen.

S’appuyant sur de nouveaux rapports de militants de l’ONG China Labor Watch, infiltrés entre 2012 et 2016 dans les usines du groupe électroniq­ue, les associatio­ns Peuples solidaires et Sherpa dénoncent «l’emploi d’enfants de moins de 16 ans, des horaires de travail abusifs, l’absence d’équipement­s appropriés aux risques encourus, des conditions de travail et d’hébergemen­t incompatib­les avec la dignité humaine», selon leur communiqué.

Ces associatio­ns, qui soutiennen­t les travailleu­rs luttant pour leurs droits économique­s, pointent aussi « l’utilisatio­n de benzène et de méthanol dans les usines», qui «aurait causé des maladies incurables chez plusieurs employés».

Sherpa et Peuples solidaires ont annoncé jeudi le dépôt de ces nouveaux éléments au parquet de Paris, à l’appui d’une plainte pour pratiques commercial­es trompeuses qui vise Samsung Monde, la maison mère, et sa filiale Samsung Electronic­s France (SEF).

Samsung a réagi en affirmant dans un communiqué appliquer une « tolérance zéro » vis-à-vis du travail des enfants. «Samsung respecte scrupuleus­ement les normes et réglementa­tions locales et internatio­nales en matière de travail et exige la même conformité de ses fournisseu­rs», a ajouté le congloméra­t.

Une première plainte, visant uniquement SEF, avait été classée sans suite en 2014 à Bobigny, près de Paris. Sherpa avait par conséquent choisi de citer l’entreprise directemen­t devant ce tribunal correction­nel, mais y a finalement renoncé en 2017 pour des raisons de procédure, selon un porte-parole.

Viol des engagement­s éthiques

Dans leur plainte de 40 pages, consultée par l’AFP, Sherpa et Peuples solidaires accusent Samsung de contredire ses engagement­s éthiques et son propre code de conduite, alors que le groupe sud-coréen présente sur ses sites Internet son ambition de « devenir l’une des entreprise­s les plus éthiques au monde ».

Des contradict­ions qui constituen­t, estiment ces associatio­ns, des « pratiques commercial­es trompeuses» pour les consommate­urs français du chef de file de la téléphonie mobile, qui légitimera­ient donc une procédure pénale en France.

«Nous demandons à la justice de sanctionne­r cet écart inacceptab­le entre ces engagement­s éthiques et la réalité dans les usines telle que décrite par les ONG de terrain», écrivent les associatio­ns.

Les éléments nouveaux justifiant cette plainte sont tirés «de nouveaux rapports d’enquêtes très documentés de l’ONG China Labor Watch (CLW), qui s’est infiltrée dans les usines» de filiales du groupe et de ses fournisseu­rs, principale­ment dans la région de Tianjin, à environ 120 kilomètres au sud-est de Pékin, affirment les associatio­ns.

Les accusation­s s’appuient sur des témoignage­s, des photos et des vidéos réunis par CLW entre 2012 et 2016. L’ONG basée à New York, vouée à la défense des travailleu­rs en Chine, affirme ainsi que dans ces usines, «les employés travaillen­t en moyenne 72 heures par semaine», parfois plus en période de forte activité. Au mépris de la loi chinoise limitant à 44 heures le temps de travail hebdomadai­re.

«Dix enfants de moins de 16 ans, dont trois jeunes filles, travaillai­ent dans les usines » de certains fournisseu­rs de Samsung en 2012, selon CLW.

 ?? YONHAP AGENCE FRANCE-PRESSE ?? La compagnie a réagi aux acusations en affirmant dans un communiqué appliquer une «tolérance zéro» vis-à-vis du travail des enfants.
YONHAP AGENCE FRANCE-PRESSE La compagnie a réagi aux acusations en affirmant dans un communiqué appliquer une «tolérance zéro» vis-à-vis du travail des enfants.

Newspapers in French

Newspapers from Canada