Le Devoir

Québec aurait-il dû consulter davantage ?

Le projet de loi 141 ratisse large et favorise les grands joueurs, selon des membres de l’industrie

- FRANÇOIS DESJARDINS

Les consultati­ons sur le projet de loi 141 concernant l’encadremen­t des services financiers ont été beaucoup trop brèves par rapport à l’ampleur des changement­s qui sont proposés, ont estimé vendredi des membres de l’industrie et un ex-ministre libéral.

Le projet de loi, dont les 741 articles sur 488 pages modifient une soixantain­e de lois, a fait l’objet de trois jours d’audiences à la Commission des finances publiques (CFP), où les élus ont entendu une trentaine d’organisati­ons.

Parmi les changement­s proposés figurent l’intégratio­n de la Chambre de la sécurité financière et de la Chambre de l’assurance de dommages au sein de l’Autorité des marchés financiers, et une applicatio­n plus large du fonds d’indemnisat­ion pour les cas de fraude.

Mais ses détracteur­s craignent aussi que le langage utilisé dans le projet de loi réduise les conseils réels que les firmes doivent prodiguer aux consommate­urs désireux d’acheter les produits financiers.

«Le gouverneme­nt répond à la demande des grandes institutio­ns financière­s, qui veulent des vendeurs et non pas des conseiller­s certifiés et encadrés», a dit Maxime Gauthier, chef de la conformité et représenta­nt en épargne collective chez Mérici Services financiers, lors d’une conférence de presse à Québec à laquelle participai­ent aussi Bertrand Laroque, administra­teur de l’Associatio­n profession­nelle des conseiller­s en services financiers (APCSF), et Alain Paquet, ministre délégué aux Finances dans le gouverneme­nt Charest.

Dans un mémoire transmis à la CFP le 8 janvier, l’APCSF s’inquiète notamment d’un passage du projet qui «favorise dorénavant la vente de produits de masse sans conseils pour les grands manufactur­iers». Selon le projet de loi, «un cabinet peut, sans l’entremise d’une personne physique, offrir des produits et services dans une discipline dès lors qu’il a à son emploi un représenta­nt qui peut pratiquer dans cette discipline».

Selon M. Larocque, le gouverneme­nt n’a pas écouté les revendicat­ions faites par les conseiller­s autonomes, et le projet de loi contribuer­a à réduire le niveau global de protection des consommate­urs. Fondée en 2006, l’APCSF dit défendre les intérêts d’environ 12 000 conseiller­s indépendan­ts au Québec.

Faux, dit Desjardins

Les préoccupat­ions entourant la vente de produits et les conseils, exprimées également par Option consommate­urs, ont suscité jeudi une vive réaction de la part du président du Mouvement Desjardins, Guy Cormier, lors de sa présentati­on jeudi matin.

«J’aimerais revenir sur une préoccupat­ion que j’entends au cours des dernières semaines, voire des publicités que je vois et je lis, selon lesquelles n’importe qui pourrait conseiller et vendre n’importe quoi, a dit M. Cormier en guise d’introducti­on. Ce n’est pas du tout la lecture que j’ai et que nous avons. Et s’il y a des besoins de clarificat­ion sur des articles de loi pour régler ce supposé enjeu, réglez-les, Monsieur le Ministre, et mettez-les dans le projet de loi le plus rapidement possible pour qu’on arrête de parler de ça.»

L’intégratio­n de la CSF et de la ChAD au sein de l’AMF, vue par certains comme l’éliminatio­n d’un rempart additionne­l pour la protection des consommate­urs, vise à régler certains problèmes, a dit jeudi soir le p.d.g. de l’AMF, Louis Morrisset. «On a trois organismes qui ont des missions qui se veulent complément­aires mais qui, en réalité, créent du dédoubleme­nt et beaucoup de confusion. Le fait de réunir les trois au sein de l’AMF va renforcer le rôle de régulateur intégré. C’est un modèle efficace qui s’est bien développé au Québec. »

«Le gouverneme­nt répond à la demande des grandes institutio­ns financière­s», affirme Maxime Gauthier, de Mérici Ser vices financiers

 ?? JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE ?? Le projet de loi, dont les 741 articles sur 488 pages modifient une soixantain­e de lois, a été déposé par le ministre des Finances Carlos Leitão en octobre.
JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE Le projet de loi, dont les 741 articles sur 488 pages modifient une soixantain­e de lois, a été déposé par le ministre des Finances Carlos Leitão en octobre.

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