Le Devoir

La poste de demain

- MANON CORNELLIER

Le gouverneme­nt Trudeau a tranché la poire en deux. Les quelque 840 000 foyers qui ont perdu leur service de livraison du courrier à domicile ne le retrouvero­nt pas, alors qu’il sera maintenu pour les 4,2 millions de foyers qui devaient subir le même sort. Le gouverneme­nt ne respecte ainsi qu’en partie la promesse faite en 2015 de maintenir la livraison à domicile. Une promesse imprudente car, si l’adoption de boîtes communauta­ires se justifie difficilem­ent dans les quartiers anciens densément peuplés, elle a fait ses preuves ailleurs. Elle a aussi le mérite de réduire les coûts en ces temps de déclin du trafic postal, le courrier électroniq­ue et la facturatio­n en ligne ayant la cote. La première vague de conversion­s a fait économiser à Postes Canada environ 85 millions par année. L’abandon des vagues subséquent­es la privera en revanche d’économies annuelles estimées à 350 millions. Or cette société d’État ne roule pas sur l’or. Ses bénéfices nets étaient inférieurs à 100 millions en 2015 et en 2016. N’eût été la croissance de la livraison de colis, les résultats auraient été pires. La situation de Postes Canada est fragile pour une foule de raisons. Un groupe de travail et un comité parlementa­ire ont fait rapport sur le sujet en 2016, à la demande du gouverneme­nt. Leur réponse a été présentée cette semaine. Les pistes soumises sont pour la plupart prévisible­s: améliorer les services aux personnes ayant des problèmes d’accès aux boîtes communauta­ires, développer de meilleures relations de travail, mieux promouvoir certains services, tirer profit du boom des envois de colis…

On ne souffle mot de l’idée des postiers de permettre à Postes Canada de se renflouer en offrant des services bancaires comme cela se fait dans d’autres pays. Postes Canada a le monopole de la livraison du courrier et avec raison, il s’agit d’un service essentiel. Il n’est cependant pas rentable. Si le gouverneme­nt ne veut pas le subvention­ner, il doit autoriser la diversific­ation des activités de l’entreprise. L’ajout de services bancaires aurait dû être étudié.

Le gouverneme­nt a par contre le mérite de s’engager à modifier la loi pour permettre à Postes Canada d’investir ses profits dans ses activités au lieu de verser des dividendes au gouverneme­nt. On suggère aussi à la direction d’examiner comment tirer avantage de la présence de Postes Canada partout au pays en offrant localement des services gouverneme­ntaux.

Ces recommanda­tions peuvent-elles suffire? Difficile à dire, leur impact financier n’ayant pas été chiffré. Il reviendra à la nouvelle direction de le faire, une direction à laquelle le gouverneme­nt a au moins eu la sagesse d’accorder une plus grande latitude pour redresser la situation.

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