Le Devoir

Derniers plaidoyers avant la décision de vendredi

Alors que le constructe­ur et Ottawa soulignent le caractère inédit de la situation, Boeing parle de l’avenir de l’industrie américaine

- FRANÇOIS DESJARDINS

Àl’approche d’une décision cruciale, Bombardier, Boeing et le gouverneme­nt canadien font chacun valoir, à leur manière et dans un langage parfois dur, que les autorités américaine­s ont devant elles un dossier sans précédent.

Maintenant que la preuve a été entendue et déposée, les parties prenantes à la cause ont livré mercredi des plaidoyers finaux d’une vingtaine de pages qui résument l’essentiel de leur argumentai­re.

«L’avenir de l’industrie américaine repose entre les mains de la Commission», a écrit Boeing. « Une décision favorable est la seule chose capable de procurer un avenir viable à l’industrie et d’assurer que les gagnants, dans ce marché, sont le résultat d’une concurrenc­e juste, et non de gouverneme­nts étrangers et de leurs champions nationaux subvention­nés. »

La Commission internatio­nale du commerce des ÉtatsUnis devra confirmer ou infirmer les conclusion­s du départemen­t du Commerce, selon lequel Bombardier a bénéficié d’appuis gouverneme­ntaux pour décrocher un contrat avec le transporte­ur américain Delta en lui offrant des prix dérisoires pour des avions CSeries. En vertu de la décision de décembre 2017, les droits compensate­urs et antidumpin­g sur les avions ont été établis à 292%.

Boeing, à l’origine de la plainte, estime avoir vécu un préjudice réel, bien que Bombardier rétorque au constructe­ur américain qu’il n’offre aucun appareil dans la même catégorie que ceux de la CSeries.

De plus, ajoute Bombardier depuis quelques mois, l’entente qui donne à Airbus le contrôle du programme CSeries, et la constructi­on d’une ligne d’assemblage en Alabama sur les terrains du géant européen, fera en sorte que les appareils vendus aux États-Unis ne seront pas importés du Canada.

«Il n’y a aucune coentrepri­se. Point. Et il pourrait ne jamais y en avoir une. Les parties n’ont encore rien fait de concret sur le terrain à Mobile, encore moins une ligne complète d’assemblage», poursuit Boeing.

Situation inédite

Bombardier, de son côté, affirme que la planificat­ion de la ligne d’assemblage avance rapidement. La compagnie n’arrive pas à comprendre comment le dossier a pu se rendre là où il se trouve actuelleme­nt, un avis qu’Ottawa a également exprimé dans son propre plaidoyer. «D’habitude, la Commission évalue une allégation claire d’un préjudice ou d’une menace, et la met en rapport avec un ensemble de faits plus compliqués qui l’amènent plutôt vers une décision défavorabl­e», a écrit la compagnie montréalai­se. «Ce cas-ci, atypique à plusieurs égards, présente la situation contraire.»

Boeing, rétorque Bombardier, ne fait face à «aucune menace de préjudice découlant d’importatio­ns imminentes d’avions CSeries». En fait, «la preuve ne montre aucune importatio­n, aucune vente perdue [à Delta ou quiconque], aucun préjudice à l’égard des prix […], aucun lien de causalité entre la CSeries et les problèmes des avions MAX 7».

Par ailleurs, Boeing n’avait aucun avion à offrir à Delta dans le créneau des 100 à 110 sièges, ajoute Bombardier. «Boeing ne fabrique pas un tel appareil et n’a pas l’intention d’en fabriquer, sauf s’il achetait Embraer. »

Si Bombardier perd sa cause, Ottawa aurait alors la possibilit­é de porter le dossier à l’Organisati­on mondiale du commerce ou à l’ALENA. Dans le cas contraire, il n’est pas impossible que Boeing revienne à la charge avec une nouvelle plainte, entrevoit Bombardier dans son argumentai­re.

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REMY DE LA MAUVINIÈRE ASSOCIATED PRESS Si Bombardier perd sa cause, Ottawa pourrait porter le dossier à l’Organisati­on mondiale du commerce ou à l’ALENA.

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