Le Devoir

Erdogan veut élargir son offensive en Syrie

- FULYA OZERKAN à Azaz

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a menacé vendredi d’élargir considérab­lement l’offensive que mène Ankara dans le nord de la Syrie contre une milice kurde, faisant fi des appels à la retenue de la communauté internatio­nale.

Au septième jour de cette opération qui suscite l’inquiétude des États-Unis, le chef de l’État turc a promis de lancer ses forces contre la ville de Minbej, où Washington a déployé des troupes, puis de pousser vers l’est «jusqu’à la frontière irakienne».

L’offensive turque, menée dans la région d’Afrine (au nord-ouest de la Syrie), vise les Unités de protection du peuple (YPG), une milice kurde considérée comme «terroriste» par Ankara, mais alliée des États-Unis dans la lutte contre le groupe État islamique (EI).

Alors que des soldats turcs et des rebelles syriens soutenus par Ankara tentent depuis samedi d’enfoncer les lignes kurdes, l’administra­tion semi-autonome d’Afrine a exhorté jeudi le régime de Damas à intervenir pour empêcher les assauts.

Cette opération turque a renforcé les tensions déjà vives entre Ankara et Washington, qu’un entretien téléphoniq­ue mercredi entre M. Erdogan et le président américain, Donald Trump, n’a pas permis d’apaiser.

Les déclaratio­ns de M. Erdogan vendredi risquent de jeter encore de l’huile sur le feu. Minbej, qu’il a promis de «nettoyer», est une ville tenue par les YPG à une centaine de kilomètres

à l’est d’Afrine, et où plusieurs centaines de militaires américains sont déployés.

Risque d’affronteme­nt

Avec les menaces de M. Erdogan contre Minbej, «un affronteme­nt militaire direct entre l’armée turque et les forces américaine­s est possible», prévient Anthony Skinner, analyste du cabinet de consultant­s en risques Verisk Maplecroft, pour qui les relations entre Ankara et Washington sont « au bord du précipice ».

Les profonds désaccords entre la Turquie et les États-Unis sur les YPG empoisonne­nt depuis plus d’un an les relations entre ces deux alliés au sein de l’OTAN.

Lors d’un entretien mercredi avec M. Erdogan, M. Trump a «exhorté la Turquie à réduire et à limiter ses actions militaires» et demandé d’éviter «toute action qui risquerait de provoquer un affronteme­nt entre les forces turques et américaine­s», selon la Maison-Blanche.

«Certains nous demandent avec insistance de faire en sorte que cette opération soit courte […] Attendez, ça ne fait que sept jours!» a lancé vendredi M. Erdogan.

«Nous irons jusqu’au bout», a affirmé vendredi le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu. «Nous interviend­rons contre l’organisati­on terroriste et nous l’élimineron­s, où qu’elle soit », a-t-il ajouté.

Au septième jour de l’offensive turque baptisée «Rameau d’olivier», l’artillerie d’Ankara déployée à la frontière syrienne a repris son pilonnage des positions des YPG à Afrine, selon l’agence de presse étatique Anadolu.

«Notre but est de nettoyer la région des terroriste­s. Nous ne voulons pas de terroriste­s dans notre pays », a déclaré à l’AFP Ali Yassin, un combattant syrien à Azaz, ville située à 20km à l’est de la ville d’Afrine et tenue par des rebelles soutenus par Ankara.

Selon l’Observatoi­re syrien des droits de l’homme (OSDH), les affronteme­nts ont fait depuis samedi plus de 110 morts dans les deux camps, et a tué 38 civils, morts pour la plupart dans des bombardeme­nts turcs.

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