Le Devoir

Transport aérien: Couillard promet des millions aux régions

Des leaders régionaux dénoncent vigoureuse­ment Air Canada

- ISABELLE PORTER à Lévis

Le premier ministre Couillard a promis vendredi des investisse­ments « substantie­ls» pour rendre les vols en région plus accessible­s et attrayants. Ravis, les leaders régionaux attendent maintenant de voir la couleur de l’argent dans le prochain budget.

«On va s’assurer que l’argent est dans le budget, a déclaré le président de l’Union des municipali­tés, Alexandre Cusson, à la sortie du Sommet sur le transport aérien régional. On va les talonner là-dessus.»

En matinée, M. Cusson avait comparé le prix des vols Montréal-Gaspé et Montréal-Paris: 840$ chacun à 2$ près. Un problème auquel le premier ministre a voulu se montrer très sensible devant les quelque 300 participan­ts du Sommet.

«On dit qu’il y a moins de desserte aérienne parce qu’il n’y a pas assez de population. Mais peut-être qu’on peut retourner l’affaire et dire qu’une des raisons pour lesquelles il y a peu de gens en région, c’est peut-être parce qu’il n’y a pas de desserte, pas de capacité de se déplacer facilement», a dit le Philippe Couillard dans un discours en fin de journée.

Pour renverser la vapeur, les libéraux ont promis notamment d’investir des montants substantie­ls dans les aéroports régionaux en relançant un programme qu’ils avaient eux-mêmes abandonné, le Programme d’aide au transport aérien (PATA). L’enveloppe qui incluait un maigre million de dollars par an pour tout le Québec atteindrai­t les «trois chiffres» en millions dans le budget, a laissé tomber le premier ministre. Les fonds seraient consacrés aux pistes, au balisage lumineux, aux bâtiments d’accueil, ou aux stations automatisé­es d’observatio­n météorolog­ique.

Des billets remboursés en partie en région

Le gouverneme­nt s’est aussi engagé à élargir la portée d’un programme qui permettait de se faire rembourser une partie du prix du billet d’avion dans les secteurs les plus reculés

du Québec, comme les territoire­s cris, la Basse-Côte-Nord ou encore Anticosti.

Si Québec va de l’avant avec cette promesse, le «programme de réduction des tarifs aériens» couvrira aussi la Gaspésie, l’Abitibi, la Côte-Nord, le Bas-Saint-Laurent et le Lac-Saint-Jean. À titre indicatif, cela pourrait faire passer un vol entre Montréal et le Lac-Saint-Jean de 800 à 600$, a signalé le premier ministre, qui a répété à plusieurs reprises qu’il connaissai­t cette réalité à titre de député de Rober val.

Le gouverneme­nt n’a toutefois pas voulu suivre le Parti québécois, qui proposait cette semaine d’imposer un prix plancher pour lutter notamment contre la domination d’Air Canada sur les plus petits joueurs. Des députés du PQ sur place n’ont d’ailleurs pas manqué de dénoncer cette décision.

«Ça fait quand même 15 ans que le Parti libéral est au pouvoir. […] Il y a 15 ans, on avait quand même d’autres transporte­urs», s’est insurgée la députée Lorraine Richard, qui représente la circonscri­ption

de Duplessis sur la Côte-Nord. «Moi, je suis à la merci d’Air Canada. À 1000 à 1200$ le coût du billet d’avion. »

Tirs groupés contre Air Canada

Le gouverneme­nt s’est toutefois engagé à réfléchir à la question du prix plancher par l’intermédia­ire d’un nouveau «groupe de travail national», a promis la ministre déléguée aux Transports, Véronyque Tremblay. Même chose pour l’idée de soustraire le prix des billets à la taxe de vente.

Durant la journée, plusieurs voix se sont élevées contre Air Canada, qui contrôle le marché régional, dont le maire de Québec, Régis Labeaume, qui l’a accusé « d’abuser totalement du système ».

Plus tôt, l’entreprise avait annoncé qu’elle allait of frir des prix réduits pour certains vols régionaux à l’achat de forfaits prépayés de 10 ou 30 billets.

Une décision qui a suscité des réactions mitigées. «Un monopole restera toujours un monopole. On peut nous faire cette annonce-là aujourd’hui et dans deux semaines augmenter [les prix]», avait déclaré le président de l’UMQ, Alexandre Cusson.

Dans les faits, Air Canada ne jouit pas d’un monopole au sens strict. Au Québec, 67% des destinatio­ns en région ne sont desservies que par ce groupe. Ailleurs, les municipali­tés sont desservies par l’un des petits joueurs également sur le marché: Provincial Airlines (La Romaine, Sept-Îles, Mont-Joli, entre autres), Pascan Aviation (Baie-Comeau, Bagotville, Mont-Joli, entre autres) et Air Creebec (Val-d’Or, Chibougama­u et les communauté­s cries).

Ces petites compagnies pourraient toutefois bénéficier d’un nouveau programme visant à soutenir financière­ment de nouvelles dessertes régionales, mais dont les critères restent à préciser. Quant à Air Canada, l’entreprise a décliné les demandes d’entrevue vendredi, mais a affirmé par courriel qu’elle était «très ouverte» à la discussion et qu’elle étudierait «avec soin» les recommanda­tions du Sommet.

 ?? MICHAËL MONNIER LE DEVOIR ?? Un peu moins de 70% des destinatio­ns au Québec ne sont desservies que par Air Canada.
MICHAËL MONNIER LE DEVOIR Un peu moins de 70% des destinatio­ns au Québec ne sont desservies que par Air Canada.

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