Le prolongement des négociations de l’ALENA pèsera sur la croissance
Les conséquences seraient toutefois pires advenant l’échec d’une entente, prévoit la Banque Scotia
La poursuite de la renégociation de l’ALENA pèsera sur la croissance économique canadienne cette année, prévoit la Banque Scotia, mais coûtera moins cher que son éventuel échec.
Au rythme où vont les choses, la renégociation de l’Accord de libre-échange nordaméricain (ALENA) ne sera vraisemblablement pas conclue cette année en dépit de l’échéance officielle fixée au 31 mars, estiment les économistes de la Banque Scotia dans une brève analyse dévoilée vendredi. Ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose si cela permet de trouver un terrain d’entente entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. «Mais des négociations plus longues signifient aussi le prolongement d’une incertitude sur l’avenir de l’ALENA qui pourrait refroidir les entreprises», y expliquent-ils.
Ainsi, un prolongement des négociations entre les trois pays jusqu’au début de 2019 devrait se traduire, cette année, par une croissance économique de 2,3% plutôt que de 2,5% au Canada, prédit la Scotia. L’impact sur l’économie mexicaine devrait être le même, avec une expansion de 2,4% plutôt que de 2,6%. À l’origine de la renégociation, les États-Unis devraient mieux s’en tirer, avec un effet imperceptible sur l’activité économique générale, bien que cela pourrait cacher, dit-on, «un frein plus substantiel à la croissance dans les États et les villes où les industries dépendantes de l’ALENA se concentrent».
D’un ralentissement…
Les conséquences seraient pires cependant si les négociations devaient échouer, observe la Banque Scotia, qui reste malgré tout optimiste en n’attribuant à cette hypothèse qu’une probabilité de 25%. À cet égard, ses économistes se penchent sur deux scénarios, celui d’une simple sortie des États-Unis de l’ALENA (20 % de probabilité) et celui d’une sortie des États-Unis de l’ALENA qui s’accompagnerait d’une guerre commerciale entre le géant américain et tous ses principaux partenaires commerciaux (5 % de probabilité).
Dans le premier cas de figure, les États-Unis imposeraient à ses deux voisins les tarifs maximums permis par l’Organisation mondiale du commerce (3,8% en moyenne). Le Canada et le Mexique rendraient la pareille aux Américains, mais maintiendraient entre eux les règles de l’ALENA. L’impact de ces mesures, d’abord sur les échanges commerciaux et l’investissement des entreprises, puis sur l’emploi et la consommation, ferait reculer la croissance économique canadienne de 1,7% à 1,4% en 2019 et de 1,4% à 1,1% en 2020, avant qu’on assiste à un petit rebond. Les probabilités d’une récession passeraient aussi de 21% à 34%, estime la Banque Scotia. Le Mexique accuserait un choc plus marqué en 2019 (de 2,8% à 2,3%), alors que les États-Unis s’en tireraient mieux en ne perdant que 0,1 point de pourcentage de croissance pour chacune des deux années.
… à la récession
Dans le second scénario, le Canada serait le seul pays à ne se voir imposer par les ÉtatsUnis que des tarifs de 3,8 % alors que les États-Unis s’engageraient avec le reste du monde dans une escalade de sanctions et de contre-sanctions qui culminerait par des tarifs réciproques de 20%. Victime collatérale, le Canada serait presque assurément plongé graduellement en récession (75% de probabilité), avec un taux de croissance d’à peine 1% en 2019 et une stagnation (0,1 %) l’année suivante. La situation serait pire la première année au Mexique (–0,4%) et guère plus brillante aux États-Unis avec une croissance de seulement 0,4% en 2019 et de 0,7% en 2020.
Après, dit la Scotia, les trois économies finiraient fatalement par trouver un nouveau point d’équilibre, mais «moins optimal». «La perte de potentiel de croissance serait alors plus ou moins permanente, selon la durée d’applications des tarifs.»
Entreprises à la fin de l’été, et à Montréal le mois dernier, les négociations de l’ALENA ont avancé d’un bon pas sur plusieurs enjeux, mais butent toujours contre les questions les plus litigieuses. D’abord très pressé, le président américain, Donald Trump, a indiqué le mois dernier qu’il était maintenant disposé à laisser aux négociateurs le temps de travailler.