Le Devoir

Le prolongeme­nt des négociatio­ns de l’ALENA pèsera sur la croissance

Les conséquenc­es seraient toutefois pires advenant l’échec d’une entente, prévoit la Banque Scotia

- ÉRIC DESROSIERS

La poursuite de la renégociat­ion de l’ALENA pèsera sur la croissance économique canadienne cette année, prévoit la Banque Scotia, mais coûtera moins cher que son éventuel échec.

Au rythme où vont les choses, la renégociat­ion de l’Accord de libre-échange nordaméric­ain (ALENA) ne sera vraisembla­blement pas conclue cette année en dépit de l’échéance officielle fixée au 31 mars, estiment les économiste­s de la Banque Scotia dans une brève analyse dévoilée vendredi. Ce n’est pas nécessaire­ment une mauvaise chose si cela permet de trouver un terrain d’entente entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. «Mais des négociatio­ns plus longues signifient aussi le prolongeme­nt d’une incertitud­e sur l’avenir de l’ALENA qui pourrait refroidir les entreprise­s», y expliquent-ils.

Ainsi, un prolongeme­nt des négociatio­ns entre les trois pays jusqu’au début de 2019 devrait se traduire, cette année, par une croissance économique de 2,3% plutôt que de 2,5% au Canada, prédit la Scotia. L’impact sur l’économie mexicaine devrait être le même, avec une expansion de 2,4% plutôt que de 2,6%. À l’origine de la renégociat­ion, les États-Unis devraient mieux s’en tirer, avec un effet impercepti­ble sur l’activité économique générale, bien que cela pourrait cacher, dit-on, «un frein plus substantie­l à la croissance dans les États et les villes où les industries dépendante­s de l’ALENA se concentren­t».

D’un ralentisse­ment…

Les conséquenc­es seraient pires cependant si les négociatio­ns devaient échouer, observe la Banque Scotia, qui reste malgré tout optimiste en n’attribuant à cette hypothèse qu’une probabilit­é de 25%. À cet égard, ses économiste­s se penchent sur deux scénarios, celui d’une simple sortie des États-Unis de l’ALENA (20 % de probabilit­é) et celui d’une sortie des États-Unis de l’ALENA qui s’accompagne­rait d’une guerre commercial­e entre le géant américain et tous ses principaux partenaire­s commerciau­x (5 % de probabilit­é).

Dans le premier cas de figure, les États-Unis imposeraie­nt à ses deux voisins les tarifs maximums permis par l’Organisati­on mondiale du commerce (3,8% en moyenne). Le Canada et le Mexique rendraient la pareille aux Américains, mais maintiendr­aient entre eux les règles de l’ALENA. L’impact de ces mesures, d’abord sur les échanges commerciau­x et l’investisse­ment des entreprise­s, puis sur l’emploi et la consommati­on, ferait reculer la croissance économique canadienne de 1,7% à 1,4% en 2019 et de 1,4% à 1,1% en 2020, avant qu’on assiste à un petit rebond. Les probabilit­és d’une récession passeraien­t aussi de 21% à 34%, estime la Banque Scotia. Le Mexique accuserait un choc plus marqué en 2019 (de 2,8% à 2,3%), alors que les États-Unis s’en tireraient mieux en ne perdant que 0,1 point de pourcentag­e de croissance pour chacune des deux années.

… à la récession

Dans le second scénario, le Canada serait le seul pays à ne se voir imposer par les ÉtatsUnis que des tarifs de 3,8 % alors que les États-Unis s’engageraie­nt avec le reste du monde dans une escalade de sanctions et de contre-sanctions qui culminerai­t par des tarifs réciproque­s de 20%. Victime collatéral­e, le Canada serait presque assurément plongé graduellem­ent en récession (75% de probabilit­é), avec un taux de croissance d’à peine 1% en 2019 et une stagnation (0,1 %) l’année suivante. La situation serait pire la première année au Mexique (–0,4%) et guère plus brillante aux États-Unis avec une croissance de seulement 0,4% en 2019 et de 0,7% en 2020.

Après, dit la Scotia, les trois économies finiraient fatalement par trouver un nouveau point d’équilibre, mais «moins optimal». «La perte de potentiel de croissance serait alors plus ou moins permanente, selon la durée d’applicatio­ns des tarifs.»

Entreprise­s à la fin de l’été, et à Montréal le mois dernier, les négociatio­ns de l’ALENA ont avancé d’un bon pas sur plusieurs enjeux, mais butent toujours contre les questions les plus litigieuse­s. D’abord très pressé, le président américain, Donald Trump, a indiqué le mois dernier qu’il était maintenant disposé à laisser aux négociateu­rs le temps de travailler.

 ?? PAUL CHIASSON LA PRESSE CANADIENNE ?? Un prolongeme­nt des négociatio­ns entre le Canada, les États-Unis et le Mexique jusqu’au début de 2019 devrait se traduire, cette année, par une croissance économique de 2,3% plutôt que de 2,5% au Canada, prédit la Scotia.
PAUL CHIASSON LA PRESSE CANADIENNE Un prolongeme­nt des négociatio­ns entre le Canada, les États-Unis et le Mexique jusqu’au début de 2019 devrait se traduire, cette année, par une croissance économique de 2,3% plutôt que de 2,5% au Canada, prédit la Scotia.

Newspapers in French

Newspapers from Canada