Le Devoir

Marcos Mauro, danser, aujourd’hui, sous Titien

Le chorégraph­e catalan jette son regard contempora­in sur l’art et le corps, des humanistes à nos jours

- CATHERINE LALONDE LE DEVOIR

La façon dont je me tiens face au monde est aussi la façon dont je me tiens devant mon art MARCOS MAURO

Marcos Mauro, chorégraph­e catalan de l’heure, n’a pratiqueme­nt jamais dansé, sinon loin du regard des autres. Venu des beaux-arts, l’homme a tout de même étudié la chorégraph­ie, s’alliant en 2005 des danseurs et artistes de sa génération — «je suis vraiment un millénial » —, développan­t avec eux un vocabulair­e, une codificati­on propre, inspirée de la cartograph­ie. En quelques années, les spectacles de sa compagnie, La Véronal, se sont hissés sur plusieurs scènes contempora­ines importante­s d’Occident. Danse Danse invite cette compagnie pour la première fois à Montréal, avec Siena (Sienne, comme la ville toscane), une oeuvre qui questionne la vision du corps et de l’art, entre la Renaissanc­e et aujourd’hui.

Dix danseurs en uniforme étrange — équipe sportive? tenue d’escrime? — composent et décomposen­t gestes et groupes sous le regard alangui d’une large, très large reproducti­on de La Vénus d’Urbin, du Titien, une huile achevée en 1538. « Je me souviens que, pendant mes études en arts, j’étais très curieux de la Renaissanc­e, de toute cette période», explique Marcos Mauro en entrevue téléphoniq­ue, en anglais, alors que Le Devoir l’attrape à la veille de son voyage vers le Canada. «À cause de l’humanisme, ce mouvement, qui m’est très important; à cause des peintures de cette époque, où les corps deviennent vraiment un sujet de plus grande importance. » Ce qui est logique, poursuitil, en cette ère où l’on pose l’humain au centre du monde, là où on voyait auparavant Dieu.

«Où est l’humain, maintenant, de nos jours? s’interroge Mauro. J’ai voulu tenter un voyage, de la Renaissanc­e à aujourd’hui, en utilisant l’art, l’histoire de l’art, le sport, le corps — le corps comme boîte, comme contenant, le corps à travers ces siècleslà… pour aboutir à Siena.»

Un voyage dans le temps, mais toujours lié au présent. «Je pense que l’art d’aujourd’hui doit parler des problèmes d’aujourd’hui, dans le langage d’aujourd’hui. La façon dont je me tiens face au monde est aussi la façon dont je me tiens devant mon art. J’utilise la danse, l’image, la musique, tout; mais je suis un millénial, un gars du XXIe siècle. C’est peut-être pourquoi mes formes, mes couleurs, mes relations avec les danseurs, les relations des danseurs entre eux sont très froides. On se retrouve devant une oeuvre chaleureus­e par sa plasticité, par une certaine beauté; mais les formes, le cadre sont très froids,

 ?? JESÚS ROBISCO ?? Dix danseurs en uniforme étrange composent et décomposen­t gestes et groupes sous le regard alangui d’une large, très large reproducti­on de La Vénus d’Urbin, du Titien, une huile achevée en 1538.
JESÚS ROBISCO Dix danseurs en uniforme étrange composent et décomposen­t gestes et groupes sous le regard alangui d’une large, très large reproducti­on de La Vénus d’Urbin, du Titien, une huile achevée en 1538.

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