Le Devoir

Investir dans les pétrolière­s pour les changer

- ETIENNE PLAMONDON EMOND Collaborat­ion spéciale

Étonné de voir dans le portefeuil­le d’un fonds dit éthique, voire environnem­ental, le nom d’entreprise­s comme Suncor ou Enbridge? L’investisse­ment responsabl­e ne se résume pas au désinvesti­ssement des énergies fossiles. Dans certains cas, le fonds sélectionn­e les entreprise­s avec le meilleur bilan environnem­ental dans chacun des secteurs, sans mettre une croix sur celui des énergies fossiles. Le fonds peut aussi réaliser de l’engagement actionnari­al. Cette stratégie vise à investir dans des entreprise­s, comme des pétrolière­s, pour ensuite utiliser son pouvoir d’actionnair­e pour inciter la société cotée en Bourse à adopter des pratiques plus soucieuses des enjeux environnem­entaux, sociaux et de gouvernanc­e.

«Il ne faut pas seulement avoir une approche où on évite certaines entreprise­s et certains secteurs, a dit lors de l’atelier de désinvesti­ssement du 25 janvier dernier François Meloche, directeur de l’engagement chez Aequo, une firme de services d’engagement actionnari­al pour les grands investisse­urs. Il faut aussi avoir une approche où on fait de l’engagement et où on essaie de changer les entreprise­s. Je pense que c’est deux approches qui peuvent se compléter. »

Dans le domaine des énergies fossiles, l’engagement actionnari­al cherche souvent à s’assurer que les entreprise­s adoptent des stratégies qui prennent en compte la transition énergétiqu­e et les changement­s climatique­s. La discussion se fait avec les sociétés d’exploitati­on des combustibl­es fossiles, mais aussi celles qui ont des activités diversifié­es. M. Meloche a notamment évoqué que des entreprise­s d’électricit­é aux États-Unis réorienten­t leur structure pour réduire leur recours aux énergies fossiles. C’est le cas d’American Electric Power (AEP), qui a réitéré publiqueme­nt, depuis l’élection de Donald Trump, vouloir se délester du charbon pour trouver d’autres sources d’énergie.

«On désinvesti­t des industries fossiles, mais il y a d’autres secteurs qui sont énergivore­s. Toute l’économie est exposée d’une façon ou d’une autre», a-t-il rappelé. Les industries du plastique, de l’automobile et des détaillant­s — comme Alimentati­on Couche-Tard, qui tire une grande part de ses revenus de la vente d’essence — en sont des exemples. Les grands investisse­urs ont plus de poids dans leur engagement actionnari­al, surtout s’ils ont un nombre élevé d’actions dans une compagnie qui leur permet d’orienter l’ordre du jour. Pour les particulie­rs, il devient plus difficile d’avoir une voix sur les enjeux et la reddition de comptes, mais il est possible d’investir dans des fonds qui réalisent cette pratique.

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