Le Devoir

La Russie interpellé­e pour freiner la Turquie

Moscou est pointé du doigt par les Kurdes alors que l’offensive d’Ankara se poursuit

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Afrine — Les autorités locales d’Afrine ont exhorté dimanche la Russie à agir pour que cesse l’offensive turque contre cette région kurde du nord de la Syrie, accusant Moscou de «complicité» dans la mort de dizaines de civils.

Dans la ville d’Afrine, des milliers de personnes sont descendues dans les rues crier leur colère, brandissan­t des images de victimes de l’opération militaire d’Ankara.

La Turquie et ses alliés au sein des groupes rebelles syriens ont lancé le 20 janvier dans le nord-ouest de la Syrie l’opération «Rameau d’olivier» contre les Unités de protection du peuple (YPG), une force paramilita­ire kurde considérée comme «terroriste» par Ankara, mais qui est aussi une alliée précieuse des États-Unis dans la lutte contre le groupe armé État islamique (EI).

«Nous demandons à la Russie en particulie­r de cesser son soutien à l’État turc terroriste», ont écrit dans un communiqué les autorités locales de l’enclave syrienne. Les Kurdes jouissent d’une autonomie de facto dans le nord de la Syrie en guerre.

Moscou «porte une responsabi­lité dans les massacres perpétrés par l’État turc fasciste », ont-elles ajouté.

La Russie, qui intervient depuis 2015 dans le conflit syrien en soutien au régime de Bachar al-Assad, comptait des troupes dans la région d’Afrine mais les a retirées au moment du déclenchem­ent de l’offensive.

Les YPG et les autorités locales ont indiqué qu’elles considérai­ent ce retrait comme une approbatio­n tacite de l’opération turque.

Dans leur communiqué, les responsabl­es kurdes appellent aussi les États-Unis, l’Union européenne, l’ONU et la coalition internatio­nale antidjihad­istes à «intervenir immédiatem­ent ».

Plusieurs partis kurdes, dont le Parti de l’union démocratiq­ue (PYD) — la branche politique des YPG —, ont signé conjointem­ent un autre communiqué, appelant la Russie et les États-Unis à mettre fin à l’offensive turque, qu’ils ont qualifiée d’attaque contre «l’ensemble de la Syrie et de son peuple ».

Ils ont également exhorté le gouverneme­nt syrien à prendre ses responsabi­lités pour protéger «les frontières et les citoyens » syriens.

Offensive meurtrière

La Turquie n’a jamais accepté l’autonomie de facto établie par les Kurdes dans le nord de la Syrie, craignant de voir sa propre communauté kurde développer des aspiration­s similaires.

Elle fait valoir que son offensive vise uniquement à sécuriser ses frontières sud, et assure faire tout en son pouvoir pour éviter les pertes civiles.

Au son des tambours et de chants nationalis­tes, des milliers de personnes ont manifesté dimanche à Afrine contre l’offensive turque, brandissan­t des drapeaux des YPG, des rameaux d’oliviers, mais aussi des portraits d’Abdullah Öcalan, le chef de la rébellion kurde du Parti des travailleu­rs du Kurdistan (PKK), détenu depuis 1999 en Turquie.

Ankara accuse avec véhémence les YPG d’entretenir des liens avec le PKK, qui mène depuis trois décennies une insurrecti­on armée contre le pouvoir turc.

D’après l’Observatoi­re syrien des droits de l’homme (OSDH), au moins 68 civils, dont 21 enfants, ont été tués dans les bombardeme­nts turcs menés dans le cadre de cette offensive. Sept civils ont eux perdu la vie dans des villes turques proches de la frontière qui ont été visées par des tirs de roquette des YPG, d’après un bilan donné du côté turc.

Du côté des combattant­s, plus d’une centaine de rebelles pro-turcs et un nombre équivalent de membres des YPG sont morts dans les affronteme­nts, selon l’OSDH. Quatorze soldats ont aussi péri.

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