Le Devoir

Les inspiratio­ns fauréennes de Marc-André Hamelin

Le pianiste jouait un quintette de sa compositio­n en compagnie du Quatuor Pacifica

- CHRISTOPHE HUSS

PRO MUSICA Beethoven: Quatuor à cordes op. 74, «Les harpes». Hamelin: Quintette pour piano et cordes (2016). Schumann: Quintette pour piano et cordes, op. 44. Marc-André Hamelin (piano), Quatuor Pacifica. Maison symphoniqu­e de Montréal, dimanche 4 février 2018.

Marc-André Hamelin et le Quatuor Pacifica n’ont pas réussi à élargir le public traditionn­el de la musique de chambre, dimanche, à la Maison symphoniqu­e de Montréal. Il est vrai qu’au même moment le Ladies’ Morning accueillai­t l’excellent Quatuor Calidore. Abondance de biens…

Le concert du pianiste québécois et des Pacifica s’imposait pour une curiosité majeure: la création, ici, du Quintette avec piano de MarcAndré Hamelin, compositeu­r à ses heures. La notice nous apprenait que l’oeuvre en trois mouvements était l’extrapolat­ion d’une Passacaill­e de 2002, devenant le 2e mouvement d’une partition complétée.

J’aurais été bien curieux d’entendre le quintette sans cette informatio­n préalable. Est-ce cette prescience qui a accentué mon impression d’avoir d’un côté les mouvements 1 et 3, tirant leur inspiratio­n et leur univers harmonique d’un Gabriel Fauré tardif et, de l’autre, ce volet central aux textures beaucoup plus massives, au modernisme sonore plus cru, qui évoque parfois le Russe Weinberg et dont la forme même (passacaill­e) impose une structure de pensée et d’expression musicales éloignées du monde fauréen.

Le 1er mouvement du Quintette d’Hamelin est un vrai bijou. Le Finale a, semble-t-il, posé au compositeu­r un problème de dimensions (il apparaît court), de structures et de textures. Le début est tellement arachnéen aux cordes que se pose la question de savoir comment le piano va entrer en scène. Il le fait, mais de manière un peu gauche, mais se permettra une pirouette harmonique finale.

Si j’étais Marc-André Hamelin, je m’amuserais à recomposer un 2e mouvement dans la lignée des 1er et 3e volets, que je mettrais de côté au cas où j’aurais envie un jour de publier une version révisée de la chose…

Les Pacifica que nous avons entendus dimanche sont très solides mais moins magiques qu’il y a dix ans. L’altiste Guy Ben-Siony s’est emmêlé les pinceaux dans les variations du Finale du Quatuor «Les Harpes», un Beethoven par ailleurs moins impression­nant que celui des Dover désormais, malgré les subtiles textures du 2e mouvement.

Le Quintette de Schumann bien rodé contenait de fort belles choses, avec une concentrat­ion du propos très efficace dans le 2e mouvement. Il est dommage que les musiciens n’aient pu enchaîner le Scherzo et le Finale en raison d’applaudiss­ements intempesti­fs. Très étrange de voir désormais dans des concerts de musique de chambre des personnes applaudiss­ant et photograph­iant, qui semblent avoir gagné leur billet à la loterie. Ce fut le cas à Bourgie avec les solistes de l’OSM, il y a dix jours.

Les organisate­urs devraient pouvoir élargir l’auditoire tout en inculquant poliment quelques règles comporteme­ntales élémentair­es, sauf à risquer de se couper de leur coeur de cible.

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SIM CANETTY Le pianiste québécois Marc-André Hamelin se fait également compositeu­r à ses heures.

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