Le jury a cru Tony Accurso
Plusieurs causes qui découlent de la commission Charbonneau et des enquêtes de l’UPAC tardent à connaître leur dénouement
Soupçonné d’avoir offert des voyages et de l’argent à l’ancien maire de Mascouche, Tony Accurso est finalement sorti mardi en homme libre du palais de justice de Joliette au terme de son procès.
Près de six ans après son arrestation, Tony Accurso a été acquitté de l’accusation d’abus de confiance qui pesait contre lui dans le dossier de Mascouche.
Après une courte période de délibérations, le jury a jugé que les séjours sur son luxueux bateau et le chèque de 300 000$ offerts par M. Accurso à l’ex-maire de Mascouche Richard Marcotte n’avaient pas pour but d’obtenir des contrats de la Ville pour son entreprise.
Son dossier, comme plusieurs autres menés par l’Unité permanente anticorruption (UPAC) dans la foulée de la commission Charbonneau, a tardé à se mettre en branle et n’a pas abouti aux résultats escomptés.
«Quant à nous, on avait une preuve solide. Malheureusement, la conclusion du jury n’est pas celle qu’on souhaitait», a indiqué Me Pascal Grimard, du bureau du Directeur des poursuites criminelles et pénales.
M. Accurso n’a jamais nié avoir offert de l’argent et des voyages à l’ancien maire Marcotte, entre 2006 et 2008. Lors de son témoignage, il a toutefois expliqué qu’il l’avait fait par amitié et non pour participer à un stratagème.
«Je pense que son témoignage a fait [pencher la balance] », a déclaré l’avocat de M. Accurso, Me Marc Labelle. Selon lui, la rapidité de la décision du jury montre que la preuve de la Couronne était insuffisante.
« Si on fait l’autopsie de cette cause-là un jour, on arrivera à la conclusion qu’il n’aurait jamais dû être accusé, ce n’est pas plus compliqué que ça », a-t-il dit.
M. Accurso avait été arrêté avec treize autres personnes. Du lot, quatre ont plaidé coupables, cinq ont obtenu un arrêt de procédures à cause de délais déraisonnables, deux ont été libérées à l’enquête préliminaire faute de preuve, une autre a été acquittée et, finalement, l’ancien maire Marcotte est depuis décédé.
Le verdict de M. Accurso était fort attendu, souligne l’avocat criminaliste Walid Hijazi, qui
estime toutefois que l’acquittement de l’homme d’affaires ne constitue pas un échec.
M. Accurso faisait face initialement à six chefs d’accusation. Cinq chefs ont été abandonnés, si bien qu’il ne faisait face qu’à un seul chef lors du procès, soit celui d’abus de confiance.
«M. Accurso a toujours clamé son innocence. Il a voulu un procès et douze concitoyens ont entendu la preuve et ont fait leur travail de façon rigoureuse en se penchant sur ce qui leur a été présenté », souligne Me Hijazi.
L’ex-entrepreneur en construction avait été au coeur de plusieurs révélations devant la commission Charbonneau avant d’être arrêté à quelques reprises par l’UPAC.
Me Hijazi rappelle cependant que cette commission d’enquête a permis de mettre en lumière le phénomène de la corruption, surtout au niveau municipal. Toutefois, dit-il, ce n’est pas parce qu’un individu a témoigné devant la Commission ou qu’il y a été nommé qu’il est coupable de quoi que ce soit.
«Le processus judiciaire est indépendant du processus d’une commission d’enquête », insiste le criminaliste.
Selon l’avocat, plusieurs facteurs expliquent qu’il y ait eu peu de condamnations dans certains dossiers de collusion et de corruption. Récemment, l’arrêt des procédures pour délais déraisonnables a permis à plusieurs accusés d’éviter leur procès. «L’arrêt Jordan, ce n’est pas un manque de rigueur dans les enquêtes, c’est un nouvel élément avec lequel le système de justice doit maintenant composer», mentionne-t-il.