Le Devoir

Boeing et Embraer proches d’un accord

Seuls les avions commerciau­x seront compris dans la nouvelle société

- LUC OLINGA à New York

Les avionneurs américain Boeing et brésilien Embraer s’acheminent vers un accord pour créer une société qui comprendra seulement les avions commerciau­x (ligne et jets) du second et dans laquelle le gouverneme­nt brésilien aura son mot à dire, a indiqué mardi à l’AFP une source proche du dossier.

Un peu plus d’un mois après avoir fait état de discussion­s entre eux en vue d’un rapprochem­ent, les deux constructe­urs aéronautiq­ues ont peaufiné leur projet destiné à gagner le feu vert des autorités brésilienn­es, inquiètes d’une éventuelle mainmise de Boeing sur les activités militaires d’Embraer.

Les grandes lignes de l’accord prévoient que Boeing détienne de 80% à 90% de la nouvelle entreprise dont le siège pourrait être basé à Chicago, quartier général actuel du constructe­ur du 747, a dit la source à l’AFP. Les opérations militaires d’Embraer resteraien­t, elles, sous contrôle brésilien, a ajouté cette même source sous couvert d’anonymat.

Boeing a présenté ces propositio­ns au gouverneme­nt brésilien, qui garderait une « golden share », soit un droit préférenti­el lui donnant un droit de veto sur les décisions stratégiqu­es impliquant la nouvelle entreprise.

«Les discussion­s avancent dans la bonne direction», a encore dit mardi la source. Boeing devrait signer un gros chèque à Embraer, qui à son tour versera des dividendes à ses actionnair­es actuels, affirme de son côté le journal brésilien Valor, citant des sources anonymes.

Contacté par l’AFP, Boeing n’a pas souhaité faire de commentair­es. «Nous n’avons aucune informatio­n ou confirmati­on», a répondu pour sa part un porte-parole d’Embraer. «Nous savons que le gouverneme­nt du Brésil a fait état de certaines craintes et soulevé des questions que nous respectons. [Nous] y travaillon­s, notamment sur les éventuelle­s options» possibles, avait déclaré fin janvier Dennis Muilenburg, le p.-d.g. de Boeing, lors de la publicatio­n des résultats annuels. «Je suis optimiste sur le fait que nous pouvons parvenir à un accord, mais il y a encore du travail. »

Au nom de «la souveraine­té nationale», le gouverneme­nt brésilien a répété exclure de céder le contrôle d’Embraer, tout en se disant ouvert à un partenaria­t entre ce fleuron national et une société étrangère au moment où le secteur aéronautiq­ue local est désespérém­ent à la recherche d’argent frais pour remplir ses caisses vidées par deux années de récession.

Troisième constructe­ur mondial avec près de 6 milliards de dollars de chiffre d’affaires et 16 000 employés, Embraer, privatisé en 1994, est un des joyaux du Brésil avec une gamme d’avions civils, militaires, mais aussi de jets d’affaires. Sa branche défense comprend des modèles comme le A-29 Super Tucano, destiné à des missions d’attaque ou d’entraîneme­nt, et le KC-390, destiné au transport militaire.

La prise de contrôle des avions de ligne d’Embraer permettrai­t à Boeing de compléter son portefeuil­le en y ajoutant des appareils d’une capacité allant jusqu’à 150 sièges et de regagner du terrain dans le moyen-courrier face à Airbus, qui a annoncé mi-octobre un partenaria­t stratégiqu­e avec Bombardier portant sur les avions CSeries. Embraer a lancé en 2013 la famille E-Jets E2, une nouvelle génération d’appareils dont l’entrée en service est prévue à partir de 2018 et qui sont les futurs concurrent­s des appareils CSeries.

«Nous estimons que Boeing va beaucoup en profiter, en entrant dans un segment du marché des avions commerciau­x où il n’est pas présent» (les avions de ligne de moins de 150 sièges), estime Jim Corridore, expert chez CFRA Research.

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ERIC PIERMONT AGENCE FRANCE-PRESSE La prise de contrôle des avions de ligne d’Embraer permettrai­t à Boeing de regagner du terrain dans le moyen-courrier face à Airbus.

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