Le Devoir

Un film qui a valeur de symbole

Le premier superhéros noir fait la transition des comics Marvel au grand écran avec Panthère noire

- FRANÇOIS LÉVESQUE

PANTHÈRE NOIRE (V.F. DE BLACK PANTHER)

1/2 Action de Ryan Coogler. Avec Chadwick Boseman, Michael B. Jordan, Lupita Nyong’o, Danai Gurira, Letitia Wright, Martin Freeman, Angela Bassett. États-Unis, 2018, 134 minutes.

Il y a plusieurs décennies déjà que le cinéma s’intéresse aux superhéros issus des comic books de Marvel et DC. De Batman à SpiderMan, aux X-Men, en passant par les 4 Fantastiqu­es, il y a eu de tout, du brillant comme du très mauvais. Toutefois, depuis une dizaine d’années, avec notamment le succès d’Iron Man, le genre exerce une véritable hégémonie à Hollywood. Et il aura fallu toutes ces années, et toutes ces adaptation­s, et toutes ces réinventio­ns pour en arriver, finalement, à construire un film entier autour d’un superhéros noir: Panthère noire. Cela, à peine un an après le triomphe du premier film reposant sur une superhéroï­ne: Wonder Woman. Il était temps.

On pourra objecter qu’il y eut Blade, avec Wesley Snipes, en 1998, mais on ne saurait confondre le film et ses suites avec un blockbuste­r.

Dévoilé en 1966, quelques mois avant la création du mouvement politique du même nom avec lequel le personnage n’a incidemmen­t rien à voir, Black Panther, ou Panthère noire, est le souverain de Wakanda, une contrée africaine imaginaire. Officielle­ment un pays du tiersmonde, Wakanda cache en réalité des avancées technologi­ques inouïes rendues possibles grâce à un minerai rare.

C’est tout récemment, après l’assassinat de son père, que le jeune T’Challa a pris couronne et habit de superhéros. Mais alors qu’un marchand d’armes suprémacis­te menace l’intégrité du riche sous-sol de Wakanda, un ennemi plus sournois guette dans l’ombre, assoiffé de vengeance et prêt à sortir ses griffes lui aussi.

Récit classique

Avant toute chose, le film Panthère noire a valeur de symbole, là encore, comme Wonder Woman. On ne saurait trop insister sur l’importance sociologiq­ue que revêt cette superprodu­ction écrite, réalisée et interprété­e par des Noirs.

Producteur chargé d’assurer la cohésion du vaste univers cinématogr­aphique Marvel pour Disney, Kevin Feige a ainsi placé Ryan Coogler, derrière le succès-surprise Creed, à la barre du projet. Lequel a en retour sollicité la collaborat­ion au scénario de Joe Robert Cole, qui s’est signalé dans la minisérie The People vs O.J. Simpson: American Crime Story. Pour qui se soucie de classement, le film s’inscrit dans la moyenne supérieure des production­s du genre.

Aussi mouvementé­e soit-elle, l’histoire demeure toutefois prévisible. Il s’agit d’un récit classique d’apprentiss­age où le protagonis­te doit sortir de l’ombre de son défunt père afin d’atteindre son plein potentiel (on songe parfois au Roi lion, contexte aidant).

Cette absence d’audace narrative est atténuée par d’heureux clins d’oeil et commentair­es, par exemple lorsqu’on fait taire le seul personnage blanc lors d’une importante rencontre. Qui plus est, l’action, comme on l’a laissé entendre, est constante. Et il y a la direction artistique et les costumes, absolument fabuleux.

Devant la caméra, Chadwick Boseman (Jackie Robinson dans 42) fait montre de beaucoup de présence et compose un superhéros attachant face à Michael B. Jordan (vedette de Creed justement), tout aussi crédible en antagonist­e qui traîne une blessure (pas très) secrète.

Présence féminine

À noter que les deux acteurs sont entourés d’une galerie de comédienne­s toutes plus charismati­ques et magnifique­s les unes que les autres. Elles livrent, sans exception, de bonnes performanc­es et c’est tout à leur honneur.

En effet, s’il convient de célébrer cette présence féminine accrue, il ne faudrait pas être dupe de la minceur des partitions, qui se résument peu ou prou à un qualificat­if chacune: mère (Angela Bassett), missionnai­re (Lupita Nyong’o), guerrière (Danai Gurira), scientifiq­ue (Letitia Wright).

Le film étant assuré d’une suite puisqu’un box-office mirobolant est d’ores et déjà acquis, un supplément de profondeur ne serait pas superflu dans le futur. Dommage que Wonder Woman évolue dans un studio concurrent: on aurait pu la mettre sur le cas.

Blague à part, ce qu’il y a de réjouissan­t avec ce succès garanti, c’est que cela favorisera, voire accélérera une plus grande diversité dans les films de superhéros (Star Wars ouvre la voie dans le blockbuste­r en général).

À quand une adaptation des aventures d’un superhéros gai, comme Iceman chez Marvel ou The Ray chez DC? Panthère noire prendra l’affiche le 16 février.

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DISNEY Le film donne également la parole à des personnage­s féminins charismati­ques et magnifique­s.

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