Québec veut simplifier la tâche aux plaignants
Un comité de concertation mis sur pied acheminera les dénonciations au bon endroit
Québec a dévoilé son plan de match pour traiter plus efficacement et rapidement les plaintes concernant la maltraitance des aînés. Désormais, un signalement fait aux autorités, généralement auprès du réseau de la santé ou des policiers, sera traité de manière concertée grâce à un comité qui la transmettra à l’organisme le plus apte à y donner suite. En clair, «c’est la fin du travail en silo», s’est réjoui Claude Ménard, président du Regroupement provincial des comités des usagers, qui accueille favorablement ce changement qu’il réclamait depuis longtemps.
Par exemple, à l’heure actuelle, la police peut recevoir une plainte pour maltraitance financière mais n’a pas à en saisir automatiquement l’Autorité des marchés financiers (AMF). Il incombe à la personne qui dépose une plainte, l’aîné lui-même ou un de ses proches ou mandataires, d’appeler chacun des organismes concernés. Cela va changer avec l’entente-cadre élaborée par la ministre responsable des aînés, Francine Charbonneau, et entérinée par trois autres ministères (Sécurité publique, Santé et Services sociaux et Justice) et quatre organismes (AMF, Directeur des poursuites criminelles et pénales, Commission des droits de la personne et Curateur public). «Ce sont les gens qui reçoivent la plainte qui vont faire le lien avec les organismes concernés, sans que la personne ait à prendre le téléphone chaque fois et à appeler partout pour raconter son histoire », a expliqué au Devoir Marc Lapointe, l’attaché de presse de la ministre Charbonneau.
En plus d’un comité national, formé des ministres et des représentants des quatre organismes précédemment mentionnés, des comités devront être mis sur pied dans chacune des régions au cours des trois prochaines années (jusqu’en 2020), à commencer par Montréal, Québec et Laval, notamment. Toutefois, la région de la Mauricie a déjà une longueur d’avance puisque c’est là qu’a été implanté un projet-pilote jugé concluant. En deux ans (de mai 2014 à mai 2016), 50 plaintes, pour des cas à l’extérieur du réseau de la santé, ont fait l’objet d’un suivi concerté.
La ministre Charbonneau a d’ailleurs rappelé que la nouvelle entente-cadre vise précisément les personnes âgées à domicile, le traitement des plaintes étant déjà bien encadré dans le réseau de la santé. «Ce qu’on signe aujourd’hui, c’est pour l’aîné qui habite chez lui et qui se doit d’avoir les mêmes recours que [celui vivant] dans un établissement», a-t-elle dit. Elle ne s’adresse toutefois pas aux personnes vulnérables, comme les handicapés, les personnes atteintes de déficiences intellectuelles ou de troubles mentaux, a-t-on précisé au cabinet de la ministre.
Plus de signalements
Le phénomène de la maltraitance tendra à prendre de l’ampleur et Québec a dit vouloir s’attaquer particulièrement à la maltraitance physique et psychologique, aux agressions sexuelles et à la fraude dont les personnes du troisième âge sont souvent victimes. Déjà, «les gens dénoncent plus», a fait remarquer la ministre.
La Ligne Abus-Aînés reçoit de plus en plus d’appels (4000) et le tiers d’entre eux seraient pour rapporter des cas de maltraitance financière. En général, les abus sont commis à l’endroit des femmes, et dans 38% des cas, c’est l’enfant qui maltraite son parent.
En mai dernier, le gouvernement a adopté le projet de loi 115 visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité. Même s’il ne prévoit pas de sanction pénale, il rend obligatoire la dénonciation d’actes répréhensibles dans les centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD).