Le Devoir

Nouvelle agence fédérale

Ottawa veut rétablir la confiance des Canadiens et des investisse­urs

- ALEXANDRE SHIELDS Avec Hélène Buzzetti

Le gouverneme­nt Trudeau a décidé de confier l’évaluation environnem­entale des projets industriel­s à une seule et nouvelle structure, qui sera chargée de mener des examens plus complets, afin de «rétablir la confiance du public». Mais certains projets majeurs au Québec continuero­nt d’être évalués selon les règles mises en place à l’ère Harper.

Après des années de controvers­es sur les processus des évaluation­s environnem­entales au Canada, Ottawa a annoncé jeudi la création de l’Agence canadienne d’évaluation des impacts (ACEI). Une fois que le projet de loi C-69 sera adopté, c’est cette nouvelle structure qui sera chargée de réaliser tous les examens fédéraux des grands projets, comme les pipelines, les mines, les barrages ou les lignes de transport d’électricit­é.

Selon la nature des projets, l’ACEI travailler­a cependant en «collaborat­ion» avec la Régie canadienne de l’énergie (qui vient remplacer l’Office national de l’énergie), la Commission canadienne de sûreté nucléaire ou encore les offices des hydrocarbu­res extracôtie­rs.

Tous les projets ne passeront cependant pas par le processus de l’ACEI. Ottawa compte établir plus tard une «liste» des projets assujettis. «L’accent serait mis sur les projets qui présentent des risques importants pour l’environnem­ent dans des domaines de compétence fédérale», a indiqué le gouverneme­nt dans la documentat­ion rendue publique, sans plus de précision.

Confiance

Chose certaine, le fédéral promet de «rétablir la confiance du public». «Nous allons prendre des décisions fondées sur la science, les données probantes et les connaissan­ces traditionn­elles autochtone­s tout en respectant les droits des autochtone­s », a ainsi expliqué la ministre de l’Environnem­ent fédérale, Catherine McKenna, jeudi. En définitive, le gouverneme­nt tranchera selon « l’intérêt national », a-t-elle ajouté.

Le gouverneme­nt veut aussi «accroître la confiance des investisse­urs», notamment en promettant des «décisions plus rapides» sur les projets soumis à une évaluation elle aussi accélérée. L’objectif, précise le fédéral, est «que les bons projets aillent de l’avant», mais aussi «que les ressources énergétiqu­es arrivent sur les marchés rapidement et d’une façon respectueu­se de l’environnem­ent ». Cette dispositio­n est réclamée depuis plusieurs années par le lobby des énergies fossiles.

Qui plus est, le gouverneme­nt canadien dit vouloir s’entendre avec les provinces afin de garantir aux promoteurs de projets qu’ils devront se soumettre à un seul examen. «Cela signifie que nous allons travailler en collaborat­ion avec les provinces afin de mener une seule évaluation, mais les deux juridictio­ns conservero­nt les mêmes responsabi­lités face à la prise de décision », a précisé au Devoir le cabinet de la ministre de l’Environnem­ent, Catherine McKenna.

Le gouverneme­nt du Québec n’a pas souhaité commenter cette dispositio­n ni le projet de loi jeudi, disant vouloir en prendre connaissan­ce. À Ottawa, les conser vateurs ont évoqué de «nouveaux fardeaux réglementa­ires » qui vont nuire à la «compétitiv­ité» économique du Canada, tandis que le Bloc québécois évoquait des obstacles du fédéral pour de futurs projets d’exportatio­n d’électricit­é d’Hydro-Québec. La société d’État n’a toutefois pas voulu faire de commentair­es jeudi.

L’ère Harper

Quant aux groupes environnem­entaux, ils ont salué dans l’ensemble un pas dans la bonne direction. Toutefois, la prise en compte de la question climatique reste à préciser, selon Équiterre. «Si on se base sur la science et les dispositio­ns de l’Accord de Paris, ça pourrait signifier de bloquer des projets d’exploitati­on des sables bitumineux ou de pipelines», a ajouté son directeur général, Sidney Ribaux.

La ministre McKenna a toutefois été claire: il n’est pas question de renvoyer «à la case départ» des projets dont l’évaluation a été entamée selon les règles mises en place par le gouverneme­nt Harper et jugées aujourd’hui déficiente­s.

Cela signifie que des projets majeurs en développem­ent au Québec seront évalués selon ces règles. C’est le cas du projet d’expansion de 750 millions de dollars du Port de Montréal à Contrecoeu­r, dont l’étude d’impact a déjà été faite et publiée par l’Agence canadienne d’évaluation environnem­entale.

Même chose pour le projet d’expansion du Port de Québec, mais aussi pour l’imposant projet d’exportatio­n de gaz naturel Énergie Saguenay. L’entreprise GNL Québec, qui pilote ce projet, a indiqué jeudi au Devoir qu’elle est déjà en train de produire son étude d’impact fédérale. Ce projet de 7,5 milliards de dollars, qui serait relié à un gazoduc de 650 kilomètres à construire, doit permettre d’exporter du gaz naturel provenant de l’Ouest canadien. Celui-ci serait liquéfié, puis chargé à bord de navires méthaniers, à La Baie, qui naviguerai­ent sur le Saint-Laurent.

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PIERRE LAHOUD Le projet d’expansion du Port de Québec fait partie de ceux qui seront évalués selon les règles antérieure­s.

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