Le Devoir

Environnem­ent La réforme fédérale soulève des questions

Le gouverneme­nt se donne le défi de redonner

- ALEXANDRE SHIELDS

Le gouverneme­nt Trudeau avait promis de rompre complèteme­nt avec l’ère de Stephen Harper en révisant en profondeur les évaluation­s environnem­entales fédérales. Mais si les mesures présentées jeudi ont généraleme­nt été saluées comme un pas dans la bonne direction, elles prêtent également flanc à certaines critiques, notamment parce qu’elles ne tournent pas complèteme­nt le dos à l’héritage conser vateur.

Lundi 29 août 2016. L’Office national de l’énergie (ONE) doit entamer à Montréal la portion québécoise des audiences sur le projet de pipeline Énergie Est, de TransCanad­a. Mais en l’espace de quelques minutes, des opposants paralysent le début de la séance, avant que différents intervenan­ts, dont le maire de Montréal Denis Coderre, quittent la salle en dénonçant sans détour le processus d’évaluation mené par l’ONE.

Même si son ampleur en a alors surpris certains, cette controvers­e était pour le moins prévisible. Il faut dire que l’impartiali­té des commissair­es de l’ONE était remise en question depuis que le National Observer avait révélé que deux de ses membres avaient rencontré Jean Charest alors que ce dernier était consultant pour TransCanad­a dans le dossier Énergie Est.

On connaît la suite. Les audiences n’ont jamais pu reprendre, les commissair­es se sont récusés et l’organisme fédéral a dû attendre la nomination de nouveaux membres bilingues pour relancer tout le processus. Et même si la pétrolière a finalement abandonné son projet, il est difficile d’imaginer comment l’ONE aurait pu mener à bien un examen de ce pipeline en bénéfician­t de toute la crédibilit­é nécessaire pour un tel exercice.

Le comité mis sur pied par le gouverneme­nt Trudeau pour le conseiller sur la réforme des évaluation­s environnem­entales des «projets majeurs» a justement suggéré l’an dernier de retirer ces évaluation­s délicates des mains de l’ONE pour les confier à «une seule autorité». Qui plus est, écrivait le comité dans son rapport, cette nouvelle structure devrait examiner «tous les impacts» des projets, se tenir dans un cadre «inclusif» et baser ses décisions sur «des données scientifiq­ues, des faits et des données probantes ».

Agence unique

Les libéraux se sont visiblemen­t inspirés grandement de ce rapport, selon ce qui se dégage des mesures annoncées jeudi. Ottawa compte ainsi confier tous les examens à la nouvelle Agence canadienne d’évaluation des impacts (ACEI). Mais le gouverneme­nt a aussi choisi de ne pas écarter complèteme­nt les structures pourtant maintes fois critiquées pour leur proximité avec les industries qu’elles réglemente­nt, déplore la directrice générale du Centre québécois du droit de l’environnem­ent, Karine Péloffy.

L’ACEI devra ainsi collaborer avec la Régie canadienne de l’énergie, qui vient remplacer l’Office national de l’énergie, tout en conservant un rôle similaire à bien des égards. Cette Régie, promettent les libéraux, aura pour mandat «d’accroître la confiance des investisse­urs», notamment en favorisant la mise en marché des ressources naturelles canadienne­s, mais aussi en rendant des décisions « plus rapides » sur les projets.

Pour le directeur politique du Conseil des Canadiens, Brent Patterson, ce mandat répond directemen­t aux souhaits de l’industrie pétrolière et gazière. L’Associatio­n canadienne des producteur­s pétroliers et la Chambre de commerce du Canada ont d’ailleurs salué l’idée d’accélérer le processus décisionne­l.

En raison de la croissance prévue dans le secteur des sables bitumineux, les entre-

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Des opposants au projet de pipeline Énergie Est

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