Vivre dans l’attente
Josh Freed traque un mal croissant de notre civilisation, la file d’attente
L’Homo urbanus perdra de deux à trois ans à faire la file dans sa vie. Une attente répétitive, quotidienne, qui pourra vite devenir une source de frustration, voire de stress ou même de franche colère. Dans Adieu
à la queue leu leu, le journaliste Josh Freed traque impitoyablement ce mal de notre civilisation, de ses origines au XVIIIe siècle jusqu’à nos jours tourmentés.
En compagnie de scientifiques et de sociologues, le cinéaste et écrivain montréalais enfile faits, témoignages et observations avec son bagout habituel. Le ton est bon enfant, mais le regard n’en est pas moins perçant alors qu’on déambule en sa compagnie de Montréal la dissipée à Londres la très sage, en passant par Mumbai la parfaite anarchique.
En filigrane, c’est la science des files qui émerge de ce panorama à hauteur de chevilles qui vole bien audessus de la mêlée, même s’il flirte parfois avec quelques lieux communs. C’est que Josh Freed ne se contente pas de déculotter les files qui plombent le bitume et le terrazzo des villes, il pourfend aussi celles qui s’attaquent aux esprits: attente téléphonique ou virtuelle au premier chef.
La pire attente étant celle dont la durée et l’issue sont inconnues, une agonie que ceux qui ont fait le pied de grue dans une clinique sans-rendez-vous au Québec reconnaîtront sans peine. Heureusement, il y aurait de la lumière au bout de la queue, l’intelligence artificielle et les algorithmes aidant. Trop vite expédiée, elle reste la partie la plus faible de ce documentaire qui, autrement, s’avère sociologiquement captivant. Adieu à la queue leu leu D, mercredi, 22h En reprise vendredi, 13h