Le Devoir

Zambito nie toute responsabi­lité dans les fuites

L’ex-entreprene­ur montre du doigt la haute direction du corps policier

- JEANNE CORRIVEAU

Lino Zambito affirme n’avoir rien à voir avec les fuites survenues dans les médias au sujet de l’enquête Mâchurer, menée par l’Unité permanente anticorrup­tion (UPAC). Selon l’ex-entreprene­ur, qui dit ne plus collaborer avec ce corps policier, c’est plutôt la haute direction de l’UPAC qui pourrait être à l’origine de ces fuites.

En conférence de presse dimanche, M. Zambito s’est dit choqué d’être soupçonné par l’UPAC d’avoir transmis de l’informatio­n à des médias concernant l’enquête Mâchurer sur le financemen­t du Parti libéral du Québec (PLQ). « Lino Zambito n’est pas le suspect que l’UPAC recherche dans la fuite des documents dans les médias. Je n’ai rien à voir là-dedans. À aucun moment je n’ai eu un document de Mâchurer dans mes mains », a-t-il soutenu.

Il a cependant reconnu avoir déjà dit que les enquêteurs détenaient suffisamme­nt de preuves pour déposer des accusation­s contre l’ancien premier ministre Jean Charest et l’excollecte­ur de fonds du PLQ Marc Bibeau. Mais ces affirmatio­ns s’appuyaient sur des discussion­s avec des enquêteurs de Mâchurer, at-il expliqué dimanche.

Rappelons que, jeudi dernier, de nouveaux passages de la déclaratio­n sous serment d’un policier appuyant une demande de mandat de perquisiti­on ont été décaviardé­s. Ce mandat avait permis la fouille du domicile du député libéral Guy Ouellette le 25 octobre dernier.

Il y était notamment révélé que l’UPAC soupçonnai­t Lino Zambito d’avoir participé à la fuite d’informatio­ns dans les médias, de concert avec Guy Ouellette ainsi que Richard Despaties, ex-analyste-enquêteur de l’UPAC, et Stéphane Bonhomme, policier à la Sûreté du Québec.

« Mon souhait, c’est qu’un dossier comme Mâchurer soit amené devant les tribunaux et qu’il y ait procès » Lino Zambito

«Je mets au défi la haute direction de l’UPAC de trouver une preuve réelle […] qui me lie à la fuite des documents dans Mâchurer», a lancé M. Zambito. «Mon souhait, c’est qu’un dossier comme Mâchurer soit amené devant les tribunaux et qu’il y ait procès. Je n’ai aucun intérêt à ce que ce dossier-là échoue. »

Lino Zambito affirme ne pas connaître Richard Despaties et Stéphane Bonhomme. Si l’UPAC veut vérifier ses dires, elle n’a qu’à parcourir ses registres téléphoniq­ues des deux dernières années puisqu’elle les a déjà entre les mains, a-t-il fait valoir.

Demande d’enquête

Les responsabl­es des fuites dans les médias sont ailleurs, selon lui. « Je suis convaincu que les fuites viennent possibleme­nt de la haute direction de l’UPAC», a-t-il dit. Comme l’UPAC et «la clique à Lafrenière» [Robert Lafrenière, commissair­e de l’UPAC] ne peuvent enquêter sur elles-mêmes, le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, doit demander à une instance indépendan­te d’enquêter sur ces fuites, plaide M. Zambito. Il a suggéré que cette enquête soit confiée au Bureau des enquêtes indépendan­tes (BEI) ou à Me Michel Bouchard, qui s’était penché sur le cas du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

Lino Zambito estime qu’un ménage s’impose au sein de la haute direction de l’UPAC et que la lumière doit être faite sur ces fuites avant l’adoption du projet de loi 107 qui accordera plus de pouvoirs à ce corps policier. Le vote à l’Assemblée nationale est d’ailleurs prévu mardi. Il demande aussi que ce projet de loi soit modifié de manière à ce que le commissair­e de l’UPAC soit nommé par les deux tiers des voix à l’Assemblée nationale.

S’il suspend sa collaborat­ion avec l’UPAC tant que des changement­s ne seront pas mis en place, M. Zambito a assuré qu’il continuera de travailler avec le Directeur des poursuites criminelle­s et pénales (DPCP). Il a précisé avoir agi comme témoin important «dans au moins quatre causes de l’UPAC». «Je ne peux pas croire que l’UPAC s’attaque à ma crédibilit­é», a-t-il avancé. «Ça va faire dérailler des procès. On donne des munitions à la défense pour miner ma crédibilit­é. »

Témoin vedette de la commission Charbonnea­u, Lino Zambito avait plaidé coupable en 2015 à des accusation­s de complot, de fraude et de corruption pour des infraction­s commises alors qu’il était vice-président de la firme Infrabec à Boisbriand. «Je ne suis pas fier de mon passé. Mais je l’ai assumé. Aujourd’hui, je regarde en avant et je veux faire avancer la question des enquêtes et de la justice », a-t-il expliqué.

Dimanche, le cabinet du ministre Martin Coiteux n’a pas voulu commenter la sortie de M. Zambito.

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ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR Lino Zambito estime qu’un ménage s’impose au sein de la haute direction de l’Unité permanente anticorrup­tion.

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