Le Devoir

Rare dissonance entre Israël et Washington

Les États-Unis nient avoir discuté avec Nétanyahou d’annexion des colonies

- LAURENT LOZANO à Jérusalem

Le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, a déclaré lundi qu’il discutait depuis « quelque temps» avec le gouverneme­nt Trump d’annexion des colonies de Cisjordani­e occupée, ce que la Maison-Blanche a réfuté dans une rare dissonance.

Une annexion des implantati­ons civiles israélienn­es dans les territoire­s palestinie­ns occupés compliquer­ait encore davantage la recherche de la paix et la solution à deux États, c’est-à-dire la création d’un État palestinie­n coexistant avec Israël.

Cette solution, avec laquelle M. Nétanyahou a pris ses distances après l’avoir endossée, reste la référence d’une grande partie de la communauté internatio­nale.

« Au sujet de l’applicatio­n de la souveraine­té israélienn­e [aux colonies], je peux vous dire que ça fait quelque temps que j’en parle avec les Américains», a affirmé lundi M. Nétanyahou devant les députés de son parti, le Likoud, selon des propos rapportés par un porte-parole.

Appliquer la souveraine­té aux colonies est considéré comme revenant à une annexion.

Plusieurs commentate­urs israéliens ont vu dans les déclaratio­ns attribuées à M. Nétanyahou la première expression de soutien de sa part, et même de la part de n’importe quel chef de gouverneme­nt israélien, à une annexion sous quelque forme que ce soit.

Washington dément

Un peu plus tard, un responsabl­e israélien a tenu à nuancer les propos du premier ministre. M. Nétanyahou «n’a pas présenté de propositio­ns spécifique­s pour l’annexion et, de toute façon, les Américains ne sont pas d’accord avec ces propositio­ns », a assuré ce responsabl­e sous le couvert de l’anonymat.

«Israël a tenu les États-Unis informés des différents projets soulevés [au Parlement]» et ces derniers «ont dit clairement qu’ils oeuvraient à faire avancer le plan de paix du président Trump », a-t-il poursuivi.

Josh Raffel, porte-parole de la Maison-Blanche, a effectivem­ent nié l’existence de discussion­s avec Israël à ce sujet.

«Les États-Unis et Israël n’ont jamais discuté d’une telle propositio­n et le président reste focalisé sur son initiative de paix israélo-palestinie­nne. »

Les paroles attribuées à M. Nétanyahou ont immédiatem­ent suscité l’indignatio­n des Palestinie­ns.

Le numéro deux de l’Organisati­on de libération de la Palestine (OLP), Saëb Erakat, a noté qu’en l’espace de trois mois, le gouverneme­nt Trump avait reconnu Jérusalem comme la capitale d’Israël, suspendu des dizaines de millions de dollars d’aide à l’agence onusienne pour les réfugiés palestinie­ns et qu’à présent elle encouragea­it « le vol organisé de terres en acceptant l’annexion ».

Abbas catégoriqu­e

Le porte-parole de la présidence palestinie­nne, Nabil Abou Roudeina, a lui averti que de telles mesures ne pouvaient que «conduire à plus de tensions et d’instabilit­é ».

«Elles éliminer ont tous les efforts de la communauté internatio­nale visant à sauver le processus politique », a-t-il ajouté.

La colonisati­on est illégale au regard du droit internatio­nal. La communauté internatio­nale considère également comme illégale l’annexion de Jérusalem-Est, dont Israël s’est emparé en 1967.

Le président palestinie­n, Mahmoud Abbas, a redit lundi, à l’occasion d’entretiens avec le président russe, Vladimir Poutine, refuser «toute coopératio­n avec les ÉtatsUnis comme médiateur ».

Il a cependant paru infléchir légèrement le ton employé récemment, en acceptant qu’en «cas de rencontre internatio­nale», les États-Unis fassent partie des médiateurs sans être les seuls dans ce rôle.

M. Poutine a dit sa volonté de « mettre en place des approches communes», et annoncé qu’il venait de s’entretenir avec le président Donald Trump. Leur dernier entretien téléphoniq­ue remontait à la mi-décembre.

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