Bombardier n’exclut pas un appel de Boeing
La compagnie s’estime libre de livrer à Delta des appareils assemblés à Mirabel
La direction de Bombardier n’exclut pas la possibilité de voir Boeing porter sa récente défaite en appel, mais est prête à approvisionner le transporteur Delta avec des avions CSeries assemblés à Mirabel même si elle prévoit toujours une ligne d’assemblage en Alabama.
Au lendemain de la publication des motifs de la Commission internationale du commerce des États-Unis, qui a expliqué sa décision du 26 janvier donnant raison à Bombardier, la compagnie montréalaise s’est réjouie de ce qu’elle qualifie de «victoire de l’innovation, de la concurrence et de la primauté du droit ».
«La Commission a reconnu que la famille d’appareils 737 de Boeing, avec un gros carnet de commandes et des profits records, n’est pas menacée par notre vente d’avions à Delta», a dit le président et chef de la direction de Bombardier, Alain Bellemare, lors d’une conférence téléphonique avec des analystes dans le cadre de la publication des états financiers de 2017. «Le programme CSeries dessert un créneau d’avions plus petits, que Boeing a abandonné il y a plusieurs années. Nous avons hâte de l’amener sur le marché américain. »
Se disant victime d’un préjudice commercial, Boeing a accusé Bombardier l’an dernier de jouir d’appuis gouvernementaux pour décrocher auprès de Delta une grosse commande reposant sur des «prix dérisoires».
«Il est toujours possible que Boeing fasse appel de la décision de la Commission du commerce international des États-Unis en passant par le système judiciaire», a écrit Bombardier dans son rapport financier. La compagnie ne veut toutefois pas spéculer sur ce qui pourrait arriver.
Livrer à partir de Mirabel
Delta a passé une commande ferme pour 75 appareils CS100 en avril 2016, l’objectif étant d’en prendre livraison en avril 2018. Depuis, Boeing a porté plainte et Bombardier a convenu de céder le programme CSeries à Airbus. La construction d’une ligne d’assemblage d’avions CSeries en Alabama, sur les terrains d’Airbus, devait permettre de contourner les sanctions tarifaires que voulait imposer Washington. Cette ligne est encore prévue. Or, ces sanctions ont été invalidées à la fin du mois de janvier, sans que la Commission dévoile immédiatement son raisonnement.
Les motifs de la Commission publiés mercredi soir signalent que l’industrie américaine n’est pas menacée par l’importation d’appareils CSeries. Invité à parler de Delta, M. Bellemare a dit que «les avions de Delta sont dans le ciel pour 2018», et qu’ils l’ont «toujours» été. «À ce stade-ci, il faut travailler avec Delta pour comprendre le moment des livraisons et le volume avec plus de précision. »
Outre la victoire éclatante aux dépens de Boeing, qui l’accusait de concurrence déloyale, les derniers mois de l’entreprise ont également été marqués par un revers dans ses efforts visant à décrocher le contrat du matériel roulant pour le Réseau express métropolitain (REM).
Par ailleurs, Bombardier a annoncé jeudi une légère hausse de participation dans sa division Transport, celle dans laquelle la Caisse de dépôt et placement du Québec a acquis un bloc de 30% en 2015 en échange de 1,5 milliard $US. Compte tenu de l’atteinte de certains objectifs de croissance, la part de Bombardier a augmenté de 2,5% à 72,5%. Compte tenu de la bonne tenue de la division, Bombardier aimerait bénéficier d’une part plus importante, a dit le directeur des finances, John Di Bert.
Résultats
La perte annuelle du groupe Bombardier a fondu de moitié, à 553 millions, en 2017, mais ses revenus ont légèrement reculé, à 16,2 milliards, conséquence d’un creux dans les avions d’affaires et commerciaux.
La division Transport, dont les revenus de 2017 ont grimpé de 13% à 8,5 milliards $US, a généré presque autant de revenus que le reste de l’entreprise.
Au cours des trois derniers mois de 2017, la compagnie a là aussi enregistré une perte de 109 millions. Cependant, en excluant certains éléments, Bombardier a affiché un bénéfice net « ajusté » de 51 millions, soit 2 ¢ par action. À ce chapitre, les marges bénéficiaires se sont avérées supérieures aux attentes, a fait remarquer un analyste de Valeurs mobilières Desjardins, Benoit Poirier, dans une note aux clients.
Le portrait financier a semblé réjouir les investisseurs. À la Bourse de Toronto, l’action de Bombardier a grimpé de 11,3 %, à 3,66 $.