Pour de meilleures pratiques en entreprise
Engager un dialogue actionnarial avec les entreprises
Depuis plusieurs années, le Fonds de solidarité FTQ travaille en partenariat avec le groupe de Vancouver Shareholder Association for Research and Education (SHARE) pour sensibiliser les entreprises à l’importance d’améliorer leurs pratiques de gouvernance, de responsabilité sociale et de gestion environnementale. Et leurs actions obtiennent du succès.
Printemps 2017. À l’assemblée des actionnaires de la société pétrolière ExxonMobil, une résolution adoptée à la majorité des voix demande à l’entreprise d’améliorer la divulgation d’information au sujet de l’impact financier des politiques publiques environnementales sur ses activités. Cette action à laquelle a pris part le Fonds de la FTQ a pu être obtenue grâce au regroupement de plusieurs actionnaires, donnant ainsi une force de frappe plus grande. De grands médias américains, dont le New York Times, en ont fait état.
Favoriser le dialogue actionnarial
C’est à ce genre d’actions que SHARE prend part. Les façons de s’y prendre sont multiples. «Cela peut se faire par l’envoi de lettres, par des rencontres avec les dirigeants d’entreprises ou encore par une proposition d’actionnaires déposée lors de l’assemblée générale, affirme Kevin Thomas, directeur de l’engagement de SHARE. Cela se fait toujours dans l’esprit d’établir un dialogue. »
La stratégie de SHARE consiste à regrouper plusieurs actionnaires qui ont à coeur l’amélioration des pratiques des entreprises afin d’accroître leur poids. Depuis plusieurs années, le Fonds s’associe à cette stratégie. Plusieurs fonds de pension, des fonds communs de placement, des investisseurs religieux et des universités y prennent part aussi. Individuellement, ces investisseurs n’ont souvent qu’une petite participation dans les entreprises concernées, mais une fois regroupés, leur poids devient plus important.
«Au Fonds, nous préférons agir par le dialogue pour améliorer les pratiques entrepreneuriales plutôt que par activisme [une stratégie qui consiste à dénoncer des pratiques d’une entreprise jugées mauvaises ou à y retirer les investissements], affirme Mario Tremblay, vice-président aux affaires publiques et corporatives du Fonds de solidarité FTQ et aussi membre du conseil d’administration de SHARE. C’est plus efficace et constructif, selon nous.»
Poser des gestes concrets
Pour parvenir à ses fins, le Plan de développement durable élaboré par le Fonds chaque année depuis trois ans constitue un élément important de son action. Le Fonds prépare d’ailleurs en ce moment le plan 2018-2019. «Dans ce document, comme dans les autres précédents, les actions que nous entreprendrons en collaboration avec SHARE seront clairement indiquées, raconte M. Tremblay. Nous comptons oeuvrer à la réduction des gaz à effet de serre, à la réconciliation avec les autochtones, à une rémunération responsable des dirigeants, à l’augmentation de la diversité [dans tous les sens du terme] au sein des conseils d’administration et à la promotion du travail décent [ex.: en incitant les entreprises à prendre des mesures contre le travail des enfants].»
Pour chacune des actions prévues, SHARE a ciblé, pour le Fonds, des entreprises au sein desquelles ils devraient intervenir. SHARE tentera aussi de convaincre d’autres actionnaires de ces entreprises de s’impliquer dans ces initiatives.
Une fois la sensibilisation amorcée (au moyen d’envoi de lettres aux dirigeants, par exemple), le travail de SHARE ne s’arrête pas là. « SHARE fait un suivi sur l’état d’avancement du dialogue et nous transmet cette information, assure M. Tremblay. Si l’action porte ses fruits, SHARE s’assure aussi que des mesures concrètes soient prises afin de respecter l’engagement pris. »
La force du nombre
Ayant son siège social à Vancouver, SHARE est très présente dans les provinces de l’Ouest. Ainsi, en avril 2017, SHARE a publié un rapport qui déplorait le retard des entreprises publiques albertaines en matière de gouvernance, de diversité de genre et de communication relative aux enjeux climatiques. On y révélait notamment que 35,5% des entreprises albertaines cotées en Bourse n’avaient aucune femme au sein de leur comité de direction en 2016, alors qu’ailleurs au pays, cette proportion chute à 11%.
En plus de ces actions régionales, SHARE se joint aussi à des mouvements internationaux. C’est ainsi qu’en juillet 2017, SHARE a adhéré à une coalition de 79 investisseurs institutionnels qui gèrent des actifs de 8000 milliards de dollars. Leur objectif est de demander aux sociétés une plus grande divulgation des méthodes de gestion de leur main-d’oeuvre. Cette initiative provient de l’Initiative sur la divulgation des effectifs des entreprises (en anglais, Workforce Disclosure Intiative).
Au Canada, SHARE a réussi à convaincre 19 grands investisseurs institutionnels à adhérer à cette coalition, dont le Fonds de solidarité FTQ. Ces investisseurs demanderont à 75 grandes entreprises canadiennes, cotées en Bourse, de répondre à un questionnaire sur la gestion de leur maind’oeuvre. Les réponses obtenues devraient notamment encourager les pratiques de travail décentes.
Un rôle-conseil important
SHARE publie aussi chaque année des guides qui ont pour objectif d’informer les investisseurs institutionnels sur les bonnes pratiques en matière de gouvernance, de protection de l’environnement et de responsabilité sociale. Parmi les sujets traités, il y a les changements climatiques, le travail décent, la gestion de l’eau et la diversité au sein des conseils d’administration.
La collaboration du Fonds avec SHARE est «naturelle», car les deux entités partagent plusieurs valeurs communes. «Nous croyons que l’être humain doit être au centre de l’économie et non l’inverse, soutient M. Tremblay. Nous pensons aussi que le regroupement d’actionnaires dans le but d’améliorer les pratiques des entreprises est la meilleure façon de changer les choses positivement. »