Feu vert aux classes à trois niveaux à la CSDM
L’Alliance des professeurs pose ses conditions à la création de ces groupes dans les écoles alternatives
Une entente arrachée après une longue lutte ouvre la porte aux classes formées d’élèves de trois niveaux d’études dans les écoles alternatives de la Commission scolaire de Montréal (CSDM).
Le plus important syndicat d’enseignants de la région montréalaise vient de conclure un accord autorisant la formation de ces groupes hors de l’ordinaire à la CSDM. L’école alternative Rosedes-Vents, dans le quartier Rosemont, peut ainsi continuer d’offrir des classes à trois niveaux d’études — formées d’élèves de première, deuxième et troisième années, ou encore d’élèves de quatrième, cinquième et sixième années.
Cette école primaire est la seule de la CSDM à regrouper des élèves de trois niveaux différents dans une même classe. L’entente avec l’Alliance des professeures et des professeurs de Montréal ouvre la porte à la formation de telles classes multiâges dans d’autres écoles alternatives qui le souhaiteraient.
Il s’agit d’une victoire importante pour les enseignants et les parents d’élèves de l’école Rosedes-Vents, qui se heurtaient depuis un an à la résistance de l’Alliance des professeurs. Après 29 ans d’existence de ces classes inhabituelles, le syndicat avait refusé de renouveler son appui au projet éducatif de l’école Rose-des-Vents.
«Je suis soulagée. On a mis énormément d’énergie dans cette bataille. C’était vraiment absurde: il y a tellement de problèmes en éducation, on se demandait pourquoi le syndicat s’opposait à un programme qui fonctionne bien et qui fait l’unanimité à notre école», a réagi Diane Gendron, mère d’une élève de cinquième année à l’école Rose-des-Vents.
Sa fille fait partie d’une classe formée d’enfants de quatrième, cinquième et sixième années. Elle gardera la même enseignante durant les trois années. La professeure et les élèves ont le temps de se connaître et de nouer une relation de confiance. Dans cette classe, les grands aident les petits. C’est ce que les enseignants et les parents apprécient du modèle de classes à trois niveaux: la collaboration, l’entraide, le développement de l’autonomie des enfants.
Surcharge de travail
Les classes à deux niveaux sont nombreuses, à la CSDM comme ailleurs. Pour établir des classes à trois niveaux, le contrat de travail des enseignants prévoit que le syndicat doit donner chaque année le feu vert à une dérogation.
C’est cette dérogation que l’Alliance des professeurs avait refusé d’accorder l’an dernier. Le syndicat disait craindre que les classes à trois niveaux s’étendent à des écoles ordinaires de la CSDM s’il maintenait son appui à ce projet de l’école alternative Rose-des-Vents. Ce type de classe alourdit la tâche de travail des enseignants et nécessite beaucoup de planification et d’organisation.
«On a adopté une procédure pour le permettre dans le contexte particulier des écoles alternatives», confirme Catherine Renaud, présidente de l’Alliance des professeurs de Montréal.
Il faut dire que le syndicat n’avait pas le choix de faire volte-face: une décision du Tribunal administratif du travail l’avait obligé l’été dernier à accepter le principe des classes à trois niveaux dans les écoles alternatives.
Dans une décision de 43 pages, le juge administratif Jean Paquette avait tranché: l’Alliance des professeurs «a agi de manière arbitraire et discriminatoire» envers les douze enseignants de l’école Rose-des-Vents. Le syndicat, qui regroupe plus de 9000 enseignants, a refusé sans justification valable de renouveler une entente qui est à la base même du projet éducatif de cette école depuis trois décennies, a souligné le juge.
Le syndicat appuie désormais ce type de classe uniquement dans les écoles alternatives, et à la condition que tous les enseignants de l’école soient d’accord. Tous les nouveaux enseignants qui rejoignent une école offrant des classes à trois niveaux devront recevoir une formation.
De son côté, la CSDM accueille favorablement l’ouverture du syndicat envers ce type de classe dans les écoles alternatives. «On a toujours été d’accord, mais il fallait une entente avec l’Alliance pour que ce soit possible», dit Catherine Harel Bourdon, présidente de la CSDM.
«Notre intention n’est pas d’imposer notre volonté au milieu. La volonté doit venir du milieu, comme à l’école Rose-des-Vents, où les classes multiniveaux existent depuis des décennies», ajoute-t-elle.