Ottawa promet des retombées plus importantes qu’espéré
Les gains estimés se chiffrent à 4,2 milliards par an d’ici 2040 alors que les États-Unis ne font plus partie de l’entente
Le Canada tirera, de la nouvelle mouture du Partenariat transpacifique, des gains économiques «beaucoup plus élevés» que ceux qu’on espérait de sa première version à laquelle participaient les États-Unis, se félicite Ottawa, qui estime maintenant ces gains à 4,2 milliards par an d’ici 2040, plutôt que 3,4 milliards.
Baptisée Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP), la version remaniée de l’ancien PTP, qui passe de douze à onze pays avec l’auto-exclusion du géant américain, présente un double avantage pour l’économie canadienne, conclut une étude d’impact dévoilée la semaine dernière et réalisée par les économistes du ministère fédéral du Commerce international. Le premier avantage est de donner aux entreprises canadiennes, et pas à leurs concurrentes américaines, un accès privilégié notamment à sept pays, dont le Japon, avec lesquels le Canada n’avait pas encore d’accord de libre-échange. L’autre avantage est que le Canada n’aura pas à partager l’accès préférentiel au marché américain que lui conférait déjà l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) avec les autres pays membres du Partenariat transpacifique, dont le Japon, qui n’ont pas d’accord de libre-échange avec les États-Unis.
Gains de 0,23%
Les principaux gains pour le Canada devraient venir de l’augmentation de ses exportations agricoles vers le Japon, de matériel de transport et d’outillage vers l’Australie, d’outils et de produits automobiles vers la Malaisie ainsi que de produits alimentaires et de produits chimiques vers le Vietnam. Vers le Japon seulement, on s’attend, d’ici un peu plus de 20 ans, à une hausse des exportations de 639 millions par an, plutôt que 400 millions avec l’ancien PTP, à la faveur notamment d’une augmentation de 36% des ventes de porc, de 94% des ventes de boeuf et de 16% des ventes de produits ligneux.
Au total, «le PTPGP devrait faire grimper le [produit intérieur brut] du Canada de 4,2 milliards d’ici 2040, écrivent les économistes du gouvernement fédéral. Voilà qui est beaucoup plus élevé que les gains du PTP de 3,4 milliards prévus en vertu du PTP, dont les États-Unis faisaient partie».
À l’échelle du PIB canadien qui s’est élevé à environ 1800 milliards en 2016, cela correspondrait à un gain d’environ 0,23% plutôt que de 0,19%.
Mystérieuses lettres
Conclue à la fin du mois de janvier, la nouvelle entente fera l’objet d’une signature officielle par les pays membres le 8 mars à Santiago, au Chili, ont-ils confirmé mardi soir en même temps qu’on dévoilait le contenu des changements apportés
au texte principal de l’entente.
Ne voulant pas se rembarquer dans des négociations complètes, les pays participants ont essayé de réduire au minimum les modifications en mettant en suspens une vingtaine de règles seulement, «dont la moitié portent sur les droits de propriété intellectuelle », a indiqué mardi à l’Agence France-Presse le négociateur japonais, Kazuyoshi Umemoto. Des règles, aurait-il pu ajouter, qui avaient été essentiellement exigées par les États-Unis et concédées à contrecoeur par les autres.
Le contenu des nombreuses lettres dites «d’accompagnement» n’a pas encore été dévoilé et pourrait ne pas l’être avant le 8 mars. C’est notamment dans ces lettres, négociées de façon bilatérale entre les pays, que le Canada a fixé avec le Japon les futures règles de leurs échanges dans le secteur de l’automobile et qu’Ottawa affirme avoir obtenu la protection de l’exception culturelle, y compris sous forme numérique, dans le PTPGP.
Voix discordantes
Des voix se sont élevées au Canada pour dénoncer l’impact du nouveau traité, notamment dans le secteur de l’automobile. Citant les chiffres d’Ottawa, qui prévoit un recul de 3,3 milliards des ventes américaines au Canada, le président de
«Nous voulions un bon » accord, et c’est ce que nous avons obtenu François-Philippe Champagne, ministre fédéral du Commerce international
l’Association canadienne des fabricants de pièces automobiles, Flavio Volpe, a fait valoir mercredi que l’achat par le Canada de plus de pièces japonaises allait mettre encore plus en rogne le gouvernement Trump et compromettre un peu plus encore la renégociation en cours de l’ALENA.
Les producteurs laitiers ont aussi dénoncé, au cours des dernières semaines, le fait que le Canada ait maintenu, dans le cadre du Partenariat transpacifique, les mêmes concessions en matière d’accès à son marché du lait, même après le départ des États-Unis.
«Nous voulions un bon accord, et c’est ce que nous avons obtenu », a déclaré mardi soir le ministre fédéral du Commerce international, François-Philippe Champagne. «Les Canadiens de partout au pays auront un accès préférentiel au marché d’un des plus importants blocs commerciaux au monde.»
Outre les pays déjà mentionnés, le PTPGP aura aussi pour membres le Brunei, le Chili, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou et Singapour. Les onze pays représentent un marché de presque 500 millions de personnes et un PIB combiné de 13 500 milliards, soit 13,5 % du PIB mondial. Nécessitant la ratification d’au moins la moitié de ses membres pour entrer en vigueur, le traité pourrait devenir réalité pour certains dès la fin de l’année.