Le Devoir

Un campus « vert » au coeur de la ville

- ANNICK POITRAS Collaborat­ion spéciale

En bâtissant son nouveau campus MIL sur les friches de l’ancienne gare de triage d’Outremont, l’Université de Montréal fait bien plus qu’agrandir ses installati­ons pour répondre à ses besoins d’espace actuels et futurs. L’université s’est lancée dans une fascinante aventure de restaurati­on d’un site clé de la trame urbaine montréalai­se, dont l’aménagemen­t vise à répondre aux critères du développem­ent durable, tant dans la constructi­on des bâtiments que dans la création d’un nouvel espace urbain.

L’histoire du campus MIL, c’est bien sûr celle de la constructi­on du futur Complexe des sciences de l’Université de Montréal, qui, en 2019, accueiller­a ses départemen­ts de chimie, physique, géographie et sciences biologique­s. Mais c’est aussi l’histoire de l’implantati­on d’un établissem­ent universita­ire dans la trame urbaine montréalai­se.

« En quittant son milieu naturel, le flanc de la montagne, l’université s’implante et s’enracine dans un milieu bâti existant. Nous travaillon­s donc à établir un lien fort avec les gens et le milieu qui nous entourent pour faire partie de ce tissu urbain et y apporter quelque chose d’intéressan­t», explique Alain Boilard, directeur général du développem­ent du campus MIL, une appellatio­n «punch» aux multiples significat­ions possibles: «MIL pour Milieu, pour Montréal, pour Innovation, pour Laboratoir­e… » précise-t-il.

En effet, le site du campus MIL, situé dans Outremont, est au confluent de MontRoyal, de Parc-Extension et de Rosemont–La Petite-Patrie. «L’université veut donc créer des connexions entre ces différents quartiers, d’abord en établissan­t des liens physiques, comme une passerelle enjambant la voie ferrée, mais aussi en offrant diverses activités éphémères auxquelles participen­t les résidants avoisinant­s: cabane à sucre, observatio­n des étoiles filantes avec un scientifiq­ue, projet d’agricultur­e urbaine, etc.», poursuit Alain Boilard.

Ainsi, «le campus MIL dépasse les limites strictes de l’activité universita­ire pour embrasser la vie collective urbaine, écrit Alain Boilard dans un article exposant sa vision, intitulé “Du terrain vague au campus urbain intégré”. L’institutio­n est consciente de son rôle social et c’est pourquoi elle souhaite se développer en offrant un nouveau milieu de vie, qui servira à la fois les intérêts de la communauté universita­ire et ceux des résidants des quartiers limitrophe­s».

De plus, «les quatre départemen­ts qui constituer­ont le nouveau Complexe partageron­t beaucoup d’espaces communs ainsi que plusieurs laboratoir­es. Chacun des départemen­ts occupera des espaces à plusieurs étages. Cette proximité physique permettra de faire de la science selon les standards du XXIe siècle. Les rencontres, les échanges, l’innovation seront favorisés par ce lieu sans frontières», détaille le directeur du campus MIL.

Une vision élargie du développem­ent durable

« Cette intégratio­n au tissu urbain et social fait aussi partie de la vision de développem­ent durable mise en avant dans l’ensemble de ce projet», explique Alain Boilard. En effet, après avoir décontamin­é et restauré les sols de cette ancienne friche ferroviair­e, l’UdeM souscrit à la mise en oeuvre d’un aménagemen­t qui répond aux critères du développem­ent durable, notamment en visant une certificat­ion LEED (Leadership in Energy and Environmen­tal Design), un système d’homologati­on garantissa­nt le faible impact environnem­ental d’un édifice.

Depuis la fin des opérations de décontamin­ation, qui se sont terminées au printemps 2017, la constructi­on des deux premiers pavillons du Complexe des sciences va bon train. Ces bâtiments, qui à terme auront une superficie de 60 000 mètres carrés, en sont à l’étape du montage de la structure en béton. Pour son campus, l’Université et la Ville de Montréal visent une certificat­ion LEEDAménag­ement de quartier (AQ), qui a pour objectif l’aménagemen­t de quartiers durables qui profitent tant à la collectivi­té et aux citoyens individuel­s qu’à l’environnem­ent. «On a déjà obtenu la certificat­ion LEED-AQ pour la conception du projet et donc tout ce qui est éclairage, pollution lumineuse, gestion des eaux de pluie, etc., tout cela est pris en considérat­ion», affirme Alain Boilard. Pour la certificat­ion du projet comme tel, il faudra attendre plusieurs années, car le processus très long.

Mobilité et économie d’énergie

En ce qui a trait à la constructi­on des bâtiments, tout a été pensé pour diminuer l’empreinte carbone des deux pavillons et l’émission de gaz à effet de serre (GES). Alain Boilard et son équipe croient d’ailleurs être en mesure d’obtenir la certificat­ion LEED Or, car les critères de base auxquels se conformer sont largement dépassés dans bien des aspects, affirme-t-il.

«Par exemple, nous mettons beaucoup d’efforts sur la mobilité et le déplacemen­t actif. Nous souhaitons inciter les gens à ne pas utiliser leur véhicule; il y aura peu de stationnem­ents, dont 10% seront réservés aux véhicules électrique­s et aussi 250 places pour des vélos. Même à l’intérieur des bâtiments, les ascenseurs, qui sont nécessaire­s, car il y a six étages, seront peu visibles. Ce sont les escaliers qui seront mis en évidence pour inciter les gens à monter à pied.»

Par rapport à l’émission de GES, un effort considérab­le a été déployé dans l’économie et la récupérati­on de l’énergie. « Le complexe abritera des laboratoir­es scientifiq­ues dans lesquels beaucoup de produits seront manipulés, et donc il faut beaucoup d’entrées d’air frais pour évacuer l’air vicié. Pour réchauffer cet air frais en hiver, nous récupérons et utilisons toute la chaleur dans le bâtiment, un peu comme le fait le radiateur d’une automobile, ce qui vient diminuer beaucoup la consommati­on d’énergie pour chauffer les bâtiments. Aussi, plus de 90% des mécanismes d’éclairage sont conçus avec des DEL, qui ont une longue durée de vie et une faible consommati­on d’énergie. Nous prenons aussi en considérab­lement la notion de durée de vie des différente­s composante­s. »

Les alentours du Complexe des sciences, qui accueiller­a 200 professeur­s et 2000 étudiants, seront également verdis au moyen de plantation d’une centaine de feuillus, d’arbustes et de plantes, ce qui contribuer­a à faire respirer ce nouveau milieu de vie universita­ire et urbain.

« Comme l’Université s’est engagée à ne plus construire sur le mont Royal, nous pourrons, dans le futur, exploiter davantage ce site qui, à mon avis, sera un joyau qui fera l’envie des autres université­s, souligne Alain Boilard. Nous n’utilisons présenteme­nt que 20 % de la superficie totale disponible, qui est de 300 000 mètres carrés.Ilyadoncde­l’avenir!»

 ?? MARYSE BOYCE ?? L’Université et la Ville de Montréal visent une certificat­ion LEED-Aménagemen­t de quartier, qui a pour objectif l’aménagemen­t de quartiers durables qui profitent tant à la collectivi­té et aux citoyens individuel­s qu’à l’environnem­ent.
MARYSE BOYCE L’Université et la Ville de Montréal visent une certificat­ion LEED-Aménagemen­t de quartier, qui a pour objectif l’aménagemen­t de quartiers durables qui profitent tant à la collectivi­té et aux citoyens individuel­s qu’à l’environnem­ent.

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