Le Devoir

Un grand bâtisseur de la francophon­ie

- MICHEL GERVAIS Ex-président de l’AUPELF, puis de l’AUF (1993-1998)

Le 21 février s’éteignait paisibleme­nt un des grands bâtisseurs de la francophon­ie en général et de la francophon­ie universita­ire en particulie­r, le recteur Michel Guillou.

C’est sous sa gouverne que l’Associatio­n des université­s partiellem­ent ou entièremen­t de langue française (AUPELF) dont il a été président, puis directeur général, a créé l’Université des réseaux d’expression française (UREF) pour ensuite se transforme­r en Agence universita­ire de la Francophon­ie, l’opérateur des Sommets de la Francophon­ie en matière d’enseigneme­nt supérieur et de recherche.

Ces changement­s statutaire­s successifs sont le reflet d’une croissance quantitati­ve et qualitativ­e absolument extraordin­aire de la coopératio­n universita­ire au sein de l’espace francophon­e. C’est Michel Guillou qui a été l’âme dirigeante et le principal responsabl­e de cette évolution marquée par la multiplica­tion des institutio­ns, des programmes, des publicatio­ns, des échanges et des initiative­s visant à rendre vivante et forte la Francophon­ie universita­ire.

Pendant plus de trente ans, il a mené avec courage et déterminat­ion, parfois de manière intempesti­ve, un véritable combat pour qu’advienne l’idéal d’un réseau vivant d’université­s francophon­es du Nord comme du Sud oeuvrant ensemble au service du développem­ent. Après son mandat à l’AUF, il a créé, à l’Université Lyon 3, l’Institut internatio­nal pour la Francophon­ie.

Qu’y avait-il derrière cette déterminat­ion, voire cette fougue ?

Une vision, d’abord. Doué d’une intelligen­ce et d’une force d’anticipati­on hors du commun, ce diplômé de Supélec a saisi toute la force du concept de réseau et réalisé qu’en faisant coopérer en recherche les meilleurs éléments des université­s francophon­es du Nord comme du Sud, l’AUF pouvait, à relativeme­nt peu de frais, obtenir de grands résultats sur le plan du progrès des connaissan­ces utiles au développem­ent.

Danger de la mondialisa­tion

Dès l’entrée en scène d’Internet, il a immédiatem­ent perçu, d’une part, le danger d’une mondialisa­tion unipolaire et négatrice de la diversité culturelle, mais, d’autre part, le fabuleux potentiel des NTIC pour brancher professeur­s et étudiants des pays en développem­ent sur les sources internatio­nales de la connaissan­ce. D’où l’implantati­on rapide, partout dans les université­s francophon­es, des fameux centres SYFED-REFER.

Cette déterminat­ion s’explique aussi, et surtout peut-être, par l’adhésion de Michel Guillou aux idéaux français de liberté, d’égalité et surtout de fraternité. Il a bien connu les pays en développem­ent, particuliè­rement ceux de l’Afrique occidental­e. Entre autres, dans sa jeunesse, il avait créé et dirigé l’IUT de Dakar, devenu, sous sa direction, l’École nationale supérieure de technologi­e de Dakar.

Rien d’étonnant à ce que, réunis par coïncidenc­e le jour de sa mort, les recteurs africains aient adopté la résolution suivante: «Apprenant la nouvelle du décès du recteur Michel Guillou, ancien recteur de l’AUF, les recteurs des université­s d’Afrique francophon­e… ont observé ce matin une minute de silence après avoir salué la mémoire du grand artisan de la constructi­on de l’espace de l’enseigneme­nt supérieur africain et francophon­e… Que la terre lui soit légère ! »

L’AUF ayant son siège social à Montréal, Michel Guillou était un grand ami du Québec, dont il partageait les ambitions et les rêves.

Ses obsèques auront lieu à Saint Maur-des-Fossés, en banlieue de Paris, le 27 février.

Nos plus sincères condoléanc­es à son épouse, Denise, à ses enfants, à ses petits-enfants et à tous ceux qui l’ont côtoyé et aimé et qu’il a aidés à grandir.

Newspapers in French

Newspapers from Canada