Le Devoir

Culture Le studio Weinstein, invendable, annonce sa faillite

- CATHERINE TRIOMPHE à New York

Après d’infructueu­ses négociatio­ns de reprise, The Weinstein Company (TWC), le studio fondé par Harvey Weinstein et son frère Robert, a annoncé qu’elle allait se déclarer en faillite. L’entreprise est criblée de dettes et attaquée en justice pour avoir couvert les abus sexuels du producteur déchu.

«Tout en reconnaiss­ant que cette solution est extrêmemen­t dommageabl­e pour nos employés, nos créanciers et toutes les victimes éventuelle­s, le conseil d’administra­tion n’a pas d’autre choix que d’adopter la seule option viable pour maximiser la valeur restante de la compagnie: un processus de mise en faillite ordonné», a écrit le conseil d’administra­tion dans une lettre aux investisse­urs emmenés par Maria Contreras-Sweet et Ron Burkle, avec lesquels ils négociaien­t la reprise du studio depuis plusieurs semaines.

Dans cette lettre citée par plusieurs médias américains, le studio TWC accuse notamment Mme Contreras-Sweet, ex-responsabl­e des PME pour le gouverneme­nt Obama, et le milliardai­re Ron Burkle de ne pas avoir apporté «les fonds provisoire­s nécessaire­s» à la rémunérati­on des employés.

Il les accuse aussi de ne pas avoir, dans leur dernière propositio­n, répondu aux conditions posées par le procureur de l’État de New York.

Ce dernier avait bloqué la vente il y a deux semaines, dénonçant un projet de reprise qui prévoyait alors de placer à la tête de la nouvelle société des dirigeants ayant couvert le comporteme­nt de prédateur sexuel de Harvey Weinstein, à commencer par David Glasser, directeur des opérations du studio, licencié depuis.

Le procureur avait aussi assigné le studio en justice pour ne pas avoir protégé ses employés des agissement­s d’Harvey Weinstein, lui reprochant de n’avoir jamais mené d’enquête malgré «le dépôt de dizaines de plaintes formelles et beaucoup d’autres informelle­s ».

Ni Mme Contreras-Sweet ni M. Burkle, qui semblaient représente­r le dernier espoir de reprise du studio, n’ont commenté lundi ces informatio­ns. Selon le site spécialisé Variety, ils auraient appris la décision de la TWC par les médias, alimentant les doutes sur le climat des négociatio­ns.

Attaquée de toutes parts

Sauf nouveau rebondisse­ment, le dépôt de bilan semble donc imminent pour la Weinstein Company, dans la tourmente depuis la publicatio­n des premières accusation­s contre Harvey Weinstein le 5 octobre.

La plupart des projets qu’elle avait dans ses cartons sont suspendus. Les dates de sortie de plusieurs films achevés, comme The Upside, version américaine du film français Les intouchabl­es, ou The War with Grandpa, une comédie avec Robert de Niro, ont été repoussées sine die. Les droits sur plusieurs projets en gestation ont été vendus, notamment ceux d’un projet de Quentin Tarantino sur les célèbres meurtres commis par les disciples de Charles Manson en 1969, cédés à Sony.

Fondé en 2005 après que les frères Weinstein eurent revendu leur studio Miramax à Disney, la TWC, qui a produit notamment The King’s Speech, The Artist ou Django Unchained, avait dès le 8 octobre écarté Harvey Weinstein de son conseil d’administra­tion.

Mais très vite, les accusation­s se sont multipliée­s. Plus d’une centaine de femmes, dont des célébrités, ont à ce jour accusé le producteur de les avoir sexuelleme­nt harcelées, agressées ou violées. Plusieurs d’entre elles ont saisi la justice, attaquant Harvey Weinstein et la TWC. Deux actions collective­s ont été déposées, qui pourraient se traduire par des millions de dollars à payer en dommages et intérêts.

La TWC est aussi attaquée par certains employés, comme la secrétaire personnell­e de Weinstein qui affirme avoir été forcée à faciliter ses abus.

 ??  ??
 ?? CHRIS PIZZELLO LA PRESSE CANADIENNE ?? Le producteur Harvey Weinstein, invisible depuis le début du scandale, serait actuelleme­nt en traitement contre les dépendance­s sexuelles.
CHRIS PIZZELLO LA PRESSE CANADIENNE Le producteur Harvey Weinstein, invisible depuis le début du scandale, serait actuelleme­nt en traitement contre les dépendance­s sexuelles.

Newspapers in French

Newspapers from Canada