Le Devoir

Nous avons besoin de toi pour faire l’indépendan­ce

- LOUIS GERMAIN Militant indépendan­tiste, Québec

Lettre en réponse au texte d’Audrey Perreault, «Lettre à Jean-Martin Aussant», publié le 28 février.

Chère Audrey, j’ai lu dans Le Devoir ta lettre à Jean-Martin Aussant. Je t’avoue d’entrée de jeu que tes deux derniers paragraphe­s m’ont enflammé et, aussi, bouleversé.

Je reconnais fort bien dans toute ta missive la même authentiqu­e soif de Politique — note le P majuscule — qui anime une grande partie de la population, en par ticulier les jeunes. Et malheureus­ement, ces jeunes, pour un grand nombre, jugent la Politique impossible, engloutie qu’elle est, croient-ils, sous le torrent de la politique partisane, de la politicail­lerie, pourrie par les appétits de ces politicien­s, «tous pareils», comme tu dis.

Audrey, j’ai commencé à militer en politique en 2007. J’avais déjà plus de 60 ans. Je me suis impliqué très activement. J’avais un idéal — je l’ai encore tout autant —, de l’énergie et du temps, vu que j’avais vendu ma (notre) compagnie trois ans plus tôt. Alors, j’ai foncé pour mes idées. J’ai rencontré personnell­ement beaucoup de politicien­s, surtout du PQ, mais de tous les partis. Et tu sais quoi? Les politicien­s ne sont pas «tous pareils», surtout pas au sens méprisant où tant de gens le disent.

J’ai découvert, dans ce monde politique, une majorité de personnes motivées au premier chef par l’amour du Québec, par le désir de contribuer au mieux-être de la société. Pas une totalité, une majorité. Car, oui, il existe des politicien­s égocentriq­ues, assoiffés de pouvoir, incultes, malhonnête­s, sans jugement, etc. Mais je puis t’assurer que c’est la minorité. La majorité, ce sont des gens de qualité avec lesquels il fait bon travailler.

Mais alors, pourquoi une si grande partie de la population, toi compris, ne voit-elle que «la langue de bois, l’incohérenc­e, le mépris pour l’intelligen­ce des gens»? Pourquoi tant de gens ne voient-ils que «ces politicien­s qui disent une chose, puis une autre»? Qui «se contredise­nt»? Qui «mentent»? «Qui ne tiennent pas leurs promesses»?

Médias et politicien­s

Je puis te certifier, chère Audrey, que ce n’est pas parce qu’ils sont tels. Alors, pourquoi ? Les causes sont multiples et tu comprendra­s que ce n’est pas le moment de toutes les citer. Mais il est certain qu’une des principale­s causes, c’est la relation pernicieus­e qui prévaut entre les médias et les politicien­s. Le public est avide de sensations, les médias ont besoin de sensationn­el pour survivre, les politicien­s ont besoin de temps d’antenne pour se faire connaître, pour se faire élire — noble objectif si on veut servir la société. Alors, la majorité des politicien­s, même guidés par les intérêts de la société, s’expriment la plupart du temps en termes électorali­stes, poussés par leur parti, par la nécessité perçue et par une grande partie de l’électorat, justement.

Alors toi, Audrey, tu te trompes quand tu crois que le Parti québécois «va dans le sens contraire de ce que [Jean-Martin] a toujours défendu ».

Oui, je suis d’accord avec toi que le PQ a, durant un temps, remis la question de l’indépendan­ce à plus tard. C’était là une décision démocratiq­ue, tout simplement. Quand, en 1995, la population du Québec a voté non, le PQ devait respecter cette volonté pendant quelques années, non ?

Pauline, maintenant. Oui, il faut admettre que Pauline a préféré mettre la pédale douce sur l’indépendan­ce. Mais elle pensait sincèremen­t réussir de cette façon à obtenir un gouverneme­nt majoritair­e et, à partir de là, faire l’indépendan­ce. Elle a échoué. Chose du passé.

Mais le PQ, lui, est toujours fermement indépendan­tiste. Lisée aussi. Jean-Martin tout autant que quand tu l’aimais.

Audrey, il faut que tu comprennes qu’il y a ceux qui désirent le pays de toute leur tête, de tout leur coeur, de tout leur militantis­me, et ceux qui doivent, en plus de ça, concevoir la stratégie et agir pour réussir.

Jean-François Lisée et Jean-Martin Aussant sont de la seconde catégorie. Et eux, comme bien d’autres, ont compris que la plus efficace façon de reporter le projet de pays aux calendes grecques, c’est de le mettre au premier plan de l’élection du 1er octobre.

Ils savent que, pour le réussir d’ici cinq ou six ans, il faut accomplir deux missions durant un premier mandat de gouverneme­nt.

Première mission, revenant au gouverneme­nt (pas à l’IRAI): préparer le projet. Si tu voyais la liste de tâches à accomplir, tu verrais leur complexité. C’est Jean-Martin Aussant qui en sera chargé. Seconde mission, revenant au Parti: réhabilite­r la notion d’indépendan­ce auprès d’une partie de la population québécoise qui confond mondialisa­tion avec disparitio­n de l’identité nationale et assimile souveraine­té avec combat d’une autre époque. Ça non plus, ce n’est pas gagné, et tu conviendra­s que, pour gagner un référendum, c’est essentiel.

Audrey, on a besoin de toi pour réussir ça, surtout la seconde mission. Viens nous rejoindre au Parti québécois. Ça te tente?

Tiens, écrire cette lettre m’a calmé… Merci Audrey.

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