Le Devoir

Soupçons de complicité entre djihadiste­s et membres de l’armée après les attaques

- DAVID ESNAULT ARMEL BAILY à Ouagadougo­u

L’enquête sur la double attaque de Ouagadougo­u progressai­t dimanche: un djihadiste présumé soupçonné d’avoir joué un rôle clé a été entendu par la justice du Burkina Faso, qui soupçonne des complicité­s dans l’armée.

L’homme dont la nationalit­é n’a pas été révélée a été arrêté vendredi dans les heures qui ont suivi les attaques coordonnée­s contre l’état-major des armées burkinabé et l’ambassade de France à Ouagadougo­u, a déclaré à l’AFP une source gouverneme­ntale.

Cet homme est soupçonné d’avoir participé à l’attaque de l’état-major général de l’armée, en plein centre de Ouagadougo­u et pourrait même être «un cerveau» de l’opération, a-t-on ajouté.

Un deuxième homme a été arrêté et était interrogé, mais les soupçons pesant sur lui sont moins forts que sur le premier, a indiqué cette source sans autre précision.

Les attaques ont fait 7 morts et plus de 80 blessés parmi les forces de sécurité, ainsi que neuf djihadiste­s tués, selon un dernier bilan. Elles ont été revendiqué­es samedi soir par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) lié à al-Qaïda et disant agir en représaill­es à une opération militaire française antidjihad­iste au Mali.

D’autres assaillant­s «djihadiste­s ont peut-être pu s’enfuir» après l’attaque de l’étatmajor, situé dans le quartier très fréquenté du grand marché de Ouagadougo­u, selon la source gouverneme­ntale.

Les autorités ont de «très forts soupçons» sur le fait que «des infiltrés dans l’armée» [aient] renseigné les djihadiste­s pour l’attaque de l’étatmajor, a ajouté la source burkinabé.

Carnage évité

L’explosion de la voiture piégée qui a précédé l’assaut a totalement détruit une salle de réunion, située en façade du bâtiment, où devait se tenir une réunion de l’état-major de la force antidjihad­iste du G5 Sahel. La réunion a été changée de salle au dernier moment, ce qui a évité un carnage.

«Ils avaient une connaissan­ce des habitudes et pratiques courantes au sein de l’état-major, ce qui explique la facilité avec laquelle ils ont accédé au sein de l’état-major par son accès de service, situé au dos de l’entrée principale», avait expliqué samedi une autre source gouverneme­ntale.

La plupart des assaillant­s identifiés étaient burkinabés, et un était étranger, selon des sources sécuritair­es. Ceux qui ont mené l’assaut contre l’état-major portaient des uniformes de l’armée, autre indice d’une possible complicité interne.

Les enquêteurs se demandent si l’attaque contre l’ambassade de France n’était pas une «diversion» avant l’attaque contre l’état-major.

Située dans la zone des représenta­tions diplomatiq­ues, l’ambassade de France est très bien protégée. La tentative s’est d’ailleurs soldée par la mort des quatre djihadiste­s qui n’ont pu pénétrer dans l’enceinte diplomatiq­ue, a aussi expliqué la source gouverneme­ntale.

Le Burkina Faso est depuis 2015 la cible d’attaques djihadiste­s, qui ont déjà frappé sa capitale par le passé, sans jamais toutefois atteindre un tel niveau d’organisati­on.

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