Le Devoir

Mauvais karma

Mélangeant les genres, Mélanie sans extasy semble parfois se chercher autant que son héroïne

- MARIE LABRECQUE Collaborat­rice

MÉLANIE SANS EXTASY Texte d’Édith Paquet. Mise en scène de Nicolas Gendron. Une production Le Choix de la Présidente. À la salle intime du théâtre Prospero jusqu’au 17 mars.

Les interprète­s qui prennent la plume nous réservent souvent de belles surprises. Pensons à Catherine- Anne Toupin ou à Rachel Graton. On aurait aimé pouvoir en dire autant de la première longue pièce d’Édith Paquet, qui a fait ses armes d’autrice au Théâtre Tout court. Ce n’est hélas pas avec le baptême scénique de sa Mélanie sans extasy, dans la minuscule salle du théâtre Prospero, qu’on a l’impression de découvrir une nouvelle voix dramaturgi­que.

Comme plusieurs, Mélanie (Véronique Pascal) a du mal à vivre dans un quotidien banal. À la mi-trentaine, elle cherche encore son ancrage existentie­l, entre un emploi routinier, des amants d’un soir et les accrochage­s avec sa soeur, une superwoman autoritair­e ( jouée par Édith Paquet elle-même) à laquelle elle ne veut surtout pas ressembler. Mais une rencontre inopinée avec un ancien amant et compagnon de rave (le doué Éric Robidoux, ici criminelle­ment gaspillé, même s’il compose aussi un yogi) rappelle à Mélanie que les substances illicites ne sont pas non plus la solution à sa quête d’illuminati­on. Pourquoi pas le yoga ?

La comédie dramatique platement mise en scène par Nicolas Gendron (qu’on a vu plus inspiré dans L’enfance de l’art) navigue plutôt maladroite­ment entre les genres. Disons-le: on a souvent l’impression d’assister à un téléroman, surtout lors des scènes entre la protagonis­te et sa famille, qui oscillent entre un bavardage banal et un drame psychologi­que dénué de vraie profondeur. Le récit accumule aussi les développem­ents dramatique­s effleurés (fausse couche! déficit de l’attention!) et périphériq­ues à la trame principale.

La pièce, qui se veut critique de la quête d’extase à tout prix, porte aussi une vision caricatura­le. Notamment durant la retraite de yoga, alors que l’héroïne — qui s’adresse parfois, sans crier gare, au public — prend à témoin les spectateur­s de son regard parodique sur les illuminés qui l’entourent (Marc-François Blondin). Mais même la dimension humoristiq­ue du texte lève rarement, manquant de mordant. Il faut dire que le jeu de Véronique Pascal semble parfois en déficit de timing comique.

La séance de yoga débouche au moins sur une scène surréalist­e, alors que Toshiro Mifune (Louis-Olivier Mauffette), le légendaire acteur des Sept samouraïs, apparaît pour sommer la pauvre Mélanie d’arrêter de fuir son traumatism­e originel (le suicide du père). Une sortie bienvenue du réalisme que cette séquence plus surprenant­e.

Mais dans le registre de la quête de sens, guidée elle aussi par un mentor fantasmati­que, on ne peut s’empêcher de penser alors au récent

Psychédéli­que Marilou, de Pierre-Michel Tremblay. Une pièce qui était autrement plus drôle…

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ANNIE ÉTHIER Véronique Pascal interprète la trentenair­e Mélanie.

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