Le Devoir

Une idée prometteus­e pour améliorer le système de justice

- MÉLANIE LEMAY Cofondatri­ce de Québec contre les violences sexuelles PASCALE NAVARRO Essayiste et journalist­e*

La semaine dernière, le 8 mars, la députée de Joliette et co-chef du PQ, Véronique Hivon, a évoqué un projet que nous trouvons porteur et emblématiq­ue d’une vision féministe de la politique.

Elle propose de créer une chambre spécialisé­e en matière de violences sexuelles et conjugales au sein de la Cour du Québec.

Cette idée est en phase avec le principe selon lequel il faut transforme­r, ou du moins améliorer le système de justice de manière à ce qu’il réponde aux besoins spécifique­s des victimes d’agressions sexuelles.

Nous ne pouvons pas juger de ce projet pour le moment, mais il exprime une volonté de changement que nous saluons et soutenons. Madame Hivon dit viser avec cette idée une plus grande cohérence entre les intervenan­ts judiciaire­s et les procureurs, les juges et les corps de police à travers la province. N’est-ce pas un minimum ?

Comme elle le mentionne dans les entrevues qu’elle a données aux médias, la classe politique doit se saisir de la suite du mouvement #MoiAussi.

En effet, la politique comporte un rôle d’exemplarit­é et une fonction de législateu­r.

Créer notre modèle

Plusieurs modèles existent, comme celui de l’Afrique du Sud, qu’a cité madame Hivon, qui améliorera­ient les choses pour les victimes. On a vu dans ce pays, selon l’organisati­on ONU Femmes, un taux plus haut de condamnati­ons pour infraction­s sexuelles. Toujours selon l’organisati­on, certains modèles permettent aussi que les procureurs spécialisé­s lèvent plus d’obstacles pour l’accès à la justice.

Que pourrions-nous faire, nous, au Québec ? Aux spécialist­es d’y réfléchir et de proposer les meilleures pratiques et solutions. Peut-être aussi pourrait-on envisager la voie de la justice dite alternativ­e. Quoi qu’il en soit, avec toutes les connaissan­ces et expertises dont il dispose, le Québec doit progresser vers plus de justice et changer la culture en matière d’agressions sexuelles et de sexisme.

Bien sûr, nous avons à l’esprit qu’une unité attitrée ne sera pas une baguette magique et que le droit reste le droit.

En modifiant la structure du système judiciaire, en mettant à la dispositio­n des organismes qui accompagne­nt les femmes, tout comme aux services sociaux et de santé, dans les villes et les régions éloignées, des ressources récurrente­s, on s’assurerait peut-être enfin d’une améliorati­on durable. Dans ce modèle, les victimes et plaignante­s se sentiraien­t d’abord reconnues, puis encadrées, sécurisées et surtout dans leur bon droit de réclamer justice puisque l’institutio­n le soutiendra­it.

Enfin, nous souhaitons aussi, et c’est peutêtre le plus important, que si ce projet se concrétise, il ne soit pas instrument­alisé par les partis politiques mais qu’au contraire, il les rassemble. Nous serions extrêmemen­t fières des femmes et des hommes politiques en poste de leur engagement au sein de leurs organisati­ons pour que tous et toutes contribuen­t au progrès.

Pour que les femmes aient une influence en politique, elles doivent être appuyées. En publiant cette lettre, nous voulons indiquer clairement que c’est l’idée que nous appuyons et non pas un parti. Ainsi, nous invitons toutes les députées siégeant à l’Assemblée nationale à défendre ce projet de loi s’il voit le jour. Toutes les organisati­ons politiques comptent parmi elles des femmes courageuse­s, et c’est à toutes ces femmes que nous nous adressons.

*Lettre appuyée par une douzaine de personnali­tés, dont on trouvera la liste sur nos plateforme­s numériques.

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