Le Canada se fait dépasser dans la course vers l’économie propre
Les entreprises canadiennes sont en train de se faire dépasser dans la course en vue de se tailler une place dans l’économie de l’avenir qui sera plus propre. Les gouvernements peuvent toutefois les aider à revenir dans la lutte, dit un groupe de gens d’affaires, d’environnementalistes et d’experts.
La révolution industrielle tournée vers une production économique plus propre est désormais bien engagée et irréversible, rappelle un rapport dévoilé ce jeudi dans le cadre de la foire nord-américaine des technologies environnementales Globe 2018, qui se tiendra jusqu’à vendredi à Vancouver. Qualifié de «plus grande occasion économique de notre temps», le marché mondial des innovations propres est en croissance rapide et devrait déjà atteindre une valeur de 2500 milliards dans quatre ans. Le secteur des technologies propres emploie déjà plus de 55 000 travailleurs au Canada et réalise plus de 60 % de ses revenus à l’étranger.
Le Canada traîne de la patte
«Mais malgré toute son expertise en la matière, le Canada a vu sa part du marché mondial dans ce domaine chuter de 12% depuis 2008», déplore le rapport de l’initiative IntelliProspérité, où se retrouvent entre autres les chefs de la pétrolière Shell Canada, de la firme internationale de consultants McKinsey, de la Banque
Royale et l’Association de l’aluminium du Canada, mais aussi des experts ainsi que les dirigeants de groupes environnementaux, de grands syndicats et de l’Assemblée des Premières Nations. Aujourd’hui de seulement 1,4%, cette part du marché mondial continue de reculer.
«Le Canada a les ressources nécessaires pour se tailler une place de choix dans le marché mondial de l’innovation propre, mais il est pour l’instant à la traîne, a déclaré dans un communiqué de presse la coprésidente d’IntelliProspérité et ancienne chef de Home Depot Canada, Annette Verschuren. Nous sommes très bons pour générer des idées et en faire des technologies prometteuses. Mais lorsqu’il s’agit de les mettre en marché, nous nous faisons devancer par les autres pays. »
L’essentiel du travail de recherche, d’innovation, de financement et de commercialisation devra fatalement être fait par le secteur privé, précise le rapport. Les gouvernements ont toutefois un rôle important à jouer pour compenser notamment certaines défaillances du marché. Aussi, on leur fait six recommandations.
Des recommandations
On leur enjoint, entre autres, d’apporter de l’aide financière aux chercheurs et aux entreprises, sous forme de subventions directes, de crédit d’impôt et autres garanties de prêts, pour réduire une barrière de l’argent plus haute dans le secteur des innovations propres qu’ailleurs notamment en raison de sa relative nouveauté et du temps de développement plus long des nouvelles technologies, mais aussi parce que l’on continue d’avoir du mal dans nos sociétés à comptabiliser les coûts de la pollution.
On aimerait également que les pouvoirs publics osent concentrer leurs efforts sur les secteurs, les technologies et les entreprises qui ont les meilleures chances de réussir et qu’on sache les accompagner à long terme.
On redit que l’un des meilleurs moyens d’encourager le secteur privé à agir, sans présumer des meilleures voies à suivre ni les restreindre, est d’établir des normes environnementales claires et à la hauteur des exigences mondiales, à commencer par une tarification adéquate de la pollution. On salue à ce chapitre les efforts déjà déployés par les gouvernements fédéral et
provinciaux en matière de tarification des émissions du carbone.
On voudrait que les gouvernements utilisent plus leurs propres pouvoirs de dépenser pour donner une vitrine aux technologies propres canadiennes et bâtir les infrastructures qui seront nécessaires pour avoir une économie à faibles émissions de carbone.
On s’attendrait à ce que les pouvoirs publics se dotent de stratégies d’ensemble plus précises et plus ambitieuses afin de permettre à tous de pousser dans la même direction. On les félicite pour les politiques qu’ils se sont déjà données et la création de grappes sectorielles. On souligne toutefois que le secteur ne dispose toujours pas de tous les indicateurs, données et cibles nécessaires pour dresser un portrait précis de sa réalité et mesurer ses progrès.
«Toutes ces recommandations nécessitent que les gouvernements soient plus agiles et plus ouverts au risque et à l’expérimentation», notent les signataires du rapport d’IntelliProspérité. «Il faut agir maintenant pour nous assurer une place parmi les leaders mondiaux de l’innovation propre. […] Le monde bâtira une économie écoresponsable avec ou sans nous, et nous comptons nous assurer que le Canada est de la partie.»