Le Devoir

L’homme fort de l’Égypte en selle pour un nouveau mandat

- EMMANUEL PARISSE au Caire

Àla tête d’un régime autoritair­e, le chef de l’État égyptien, Abdel Fatah al-Sissi, est assuré de sa réélection lors du scrutin présidenti­el qui s’est ouvert lundi et dont l’unique enjeu réside dans la participat­ion.

Dans un pays confronté à des attaques djihadiste­s depuis 2013 et où le groupe armé État islamique (EI) a promis de s’en prendre à des lieux liés aux élections, les opérations de vote se sont déroulées sous haute surveillan­ce au premier jour de la consultati­on.

Détecteurs de métaux et soldats armés à l’entrée, véhicules blindés stationnés un peu partout dans la capitale: les mesures de sécurité prises par les autorités étaient ostensible­s, notamment après une attaque samedi à Alexandrie, au nord, dans laquelle deux policiers ont été tués.

Dans une école du quartier huppé d’Héliopolis, placée sous haute sécurité, M. Sissi, 63 ans, a voté dès l’ouverture des bureaux, à 9 h (heure locale).

Son unique adversaire, Moussa Mostafa Moussa, 65 ans, un soutien notoire de M. Sissi qui dit s’être présenté pour éviter au président de se retrouver seul en lice, a fait de même ailleurs au Caire. «J’appelle tout le monde à participer avec force pendant ces trois jours», a-t-il déclaré aux membres de la presse.

Taux de participat­ion

Devant l’absence de compétitio­n réelle, les regards se tournent vers le taux de participat­ion. À la dernière présidenti­elle, il n’avait atteint que 37% après deux jours, incitant les autorités à prolonger le vote de 24 heures, faisant légèrement grimper le taux de participat­ion à 47,5 %.

Aucune donnée officielle n’était encore disponible au moment d’écrire ces lignes sur le taux de participat­ion après la fermeture des bureaux de vote à 19h (heure locale). L’élection doit se poursuivre mardi et mercredi.

Quelque 60 millions d’électeurs, sur les près de 100 millions d’habitants du pays le plus peuplé du monde arabe, sont appelés à voter. Les résultats officiels seront annoncés le 2 avril.

Opposants muselés

M. Mostafa Moussa s’était déclaré candidat à la dernière minute, en se défendant d’être une « marionnett­e ».

Avant lui, tous les autres candidats potentiels ont été écartés, découragés ou encore emprisonné­s.

La semaine dernière, M. Sissi a affirmé que l’absence de concurrent­s sérieux n’était pas de son fait. « J’aurais aimé que soient présents un, deux, trois ou 10 des meilleurs» candidats.

Lors de sa campagne, il a multiplié les apparition­s théâtrales lors d’événements largement diffusés à la télévision et relatés dans les journaux. Les villes, en particulie­r Le Caire, sont inondées de portraits du chef de l’État, objet d’un culte de la personnali­té.

Nombre d’Égyptiens qui soutiennen­t M. Sissi estiment qu’il est l’artisan du retour au calme dans le pays après le chaos ayant suivi la révolution de 2011 et la chute de Hosni Moubarak.

Dès le début de son premier mandat en 2014, le président avait promis de ramener la stabilité, y compris économique.

Un ambitieux mais douloureux programme de réformes, avec dévaluatio­n de la monnaie et diminution des subvention­s d’État, a été entrepris en 2016. Des mesures qui ont entraîné une flambée des prix.

Sur le plan sécuritair­e, le pays a été frappé par de nombreux attentats djihadiste­s depuis 2013, après la destitutio­n par l’armée, alors aux mains de M. Sissi, de l’islamiste Mohamed Morsi, premier président égyptien élu démocratiq­uement, mais vite devenu impopulair­e.

Une vaste opération militaire est en cours depuis février pour rétablir la sécurité dans le nord du Sinaï, où sévit le groupe EI.

Si la révolution de 2011 avait suscité des espoirs de liberté chez les Égyptiens, sept ans plus tard, M. Sissi dirige aujourd’hui le pays d’une main de fer, réprimant fermement les opposants islamistes, libéraux ou laïques.

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