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Les infirmières déplorent toutefois qu’aucun montant n’ait été prévu pour l’embauche de nouveaux employés
Malgré une hausse record des dépenses en santé, le budget ne permet de répondre qu’en partie aux insatisfactions qui minent le réseau et reporte des investissements majeurs aux prochaines années.
Avec une hausse particulièrement importante de 4,6% des dépenses en santé, les coûts de santé augmentent cette année de 1,5 milliard de dollars. C’est donc 38,5 milliards du budget qui y sont consacrés, dont des sommes très importantes dans les établissements (+5,3 %).
Or contrairement à ce qu’on pouvait appréhender, la hausse des salaires de médecins n’est pas très apparente dans les documents budgétaires, qui lui imputent un poids de seulement 44 millions (+0,6%).
Le ministre des Finances, Carlos Leitão, a même souligné — non sans fierté — que pour la première fois, la rémunération des médecins comptait pour moins de 20% du budget de la santé.
Ces données étonnantes s’expliquent notamment par le report aux années qui viennent d’une grande portion de la hausse: 352 millions l’an prochain, et en moyenne 234 millions les trois années suivantes. On a en outre appris jeudi qu’une bonne partie du rattrapage salarial des médecins (480 millions) avait été financée à même des réserves déjà prévues à cette fin dans les budgets des deux dernières années.
Sinon, les nouveaux fonds (462 millions) visent surtout à améliorer l’accès aux services, certains services sociaux et l’aide aux aînés.
Malgré cela, les infirmières déplorent qu’aucun montant ne leur soit réservé, que ce soit pour de nouvelles embauches ou le financement de projets-pilotes sur les ratios sur lesquels elles s’étaient entendues avec le ministre Gaétan Barrette.
«Il n’y a pas d’argent réservé. Ça veut dire que les établissements peuvent faire ce qu’ils veulent avec», déplore la présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ), Nancy Bédard.
On note en revanche que des fonds de 20 millions sont réservés à l’augmentation du
« Il n’y a pas d’argent réservé. Ça veut dire que les établissements peuvent faire ce qu’ils veulent avec. » Nancy Bédard, présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé
nombre d’infirmières praticiennes spécialisées (IPS).
Dans l’ensemble, syndicats et associations s’entendent pour dire que les nouveaux fonds pourront donner de l’air aux hôpitaux et réduire la pression sur leur personnel. Mais pas au point de réparer les pots cassés.
Le réinvestissement est «très intéressant», fait remarquer le président de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), Jacques Létourneau, mais on est encore loin de pouvoir assurer les besoins liés aux coûts de système, dit-il.
Le gouvernement ne s’en cache pas, d’ailleurs. En effet, la croissance des dépenses cette année est de 4,6%; or Québec estime dans le Plan budgétaire qu’une hausse de 5,2% serait nécessaire pour que le système soit «viable». C’est du moins l’argument auquel il recourt pour réclamer de nouveau plus de transferts du gouvernement fédéral.
En plus, cette année, une part non négligeable de la marge de manoeuvre en santé du gouvernement Couillard découle du contexte particulier de la signature de l’entente entre le ministre Gaétan Barrette et l’industrie pharmaceutique, qui a libéré pas moins de 195 millions.
De bonnes nouvelles en périphérie de Montréal
Sinon, parmi les ajouts, on note que le gouvernement crée une enveloppe de 300 millions en santé, qui devraient surtout bénéficier aux résidents de la périphérie de Montréal, où la population a augmenté ces dernières années.
Dans le passé, les hausses budgétaires se basaient sur le passé et ne tenaient pas suffisamment compte de la démographie, d’où ce rattrapage.
Malgré que les documents parlent d’assurer « à la population de chaque région » un accès comparable «aux services de première ligne et spécialisés », il ne serait pas question ici de pallier les découvertures de services observées dans certaines régions du Québec, comme le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie ou la Côte-Nord, indique-t-on au Conseil du trésor.
Sur le front social, 102 millions supplémentaires sont débloqués. Ils iront notamment à l’aide aux jeunes (prévention en dépendance, accès en psychologie) pour un total de 61 millions.
On a aussi prévu 15 millions de plus pour l’aide en déficience intellectuelle, spectre de l’autisme et déficience physique.
Quelques millions sont enfin alloués à un plan spécifique sur la santé des jeunes, les services d’inter vention de crise et la prévention des agressions sexuelles sur les enfants. Enfin, 84 millions ont été réservés aux services aux aînés en établissement, aux centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) et au programme d’aide pour l’installation de gicleurs dans les résidences pour aînés.
La santé récolte en outre sa part des investissements en infrastructures.
On va notamment de l’avant avec la construction d’un hôpital à Vaudreuil-Soulanges, en Montérégie, et cinq grands chantiers sont financés à l’Hôpital général de Lakeshore, à l’Hôpital de Shawinigan, à l’Hôpital général juif, à l’hôpital Pierre-Boucher et à l’hôpital Charles-Lemoyne.
Quelques millions sont enfin alloués à un plan spécifique sur la santé des hommes. On mise en outre sur des services d’intervention de crise et la prévention des agressions sexuelles sur les enfants.