Le Devoir

Les « humanités » au coeur de la formation des médecins québécois

- DRE HÉLÈNE BOISJOLY Doyenne de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal

Je remercie Le Devoir de me permettre d’apporter des précisions à la suite d’un texte paru en ces pages le 22 mars dernier. M. Alexandre Klein signait alors, à titre d’historien, de philosophe et de chercheur postdoctor­al à l’Université Laval, un propos intitulé «Des médecins en manque d’humanités». Il puisait à différente­s sources pour soutenir l’idée qu’au cours de leur formation, les étudiantes et étudiants en médecine de l’Université de Montréal, de l’Université de Sherbrooke et de l’Université Laval n’avaient « pratique- ment aucun contact avec les diverses sciences humaines et sociales ».

M. Klein fait oeuvre utile en attirant l’attention des lecteurs sur ce fait essentiel : la formation proprement biomédical­e des médecins en devenir doit s’appuyer sur un enseigneme­nt consistant en sciences humaines et sociales. C’est ce que nos collègues anglophone­s appellent les medical humanities… et que nous appelons chez nous l’enseigneme­nt de « l’humanisme en médecine ».

En pleine ébullition

Or, il s’agit d’un aspect de la formation médicale qui est en pleine ébullition à l’Université de Montréal. Nous faisons notamment figure de pionnier par certaines initiative­s de cet enseigneme­nt de l’humanisme en médecine. Je citerai en exemple la Direction collaborat­ion et partenaria­t patient qui coordonne la participat­ion de 200 «patients formateurs»; ce sont de vrais patients avec de vrais problèmes de santé qui participen­t à la formation des médecins, précisémen­t dans des dimensions tels l’accompagne­ment et l’écoute des personnes souffrante­s. On trouve notamment parmi eux des personnes autistes et d’autres atteintes de cancer.

Le cours de médecine comporte aussi une série de formations dispensées par le Bureau de l’éthique clinique, qui vise entre autres une culture de communicat­ion et de dialogue; en outre, de nombreuses formations sont données sur un mode interdisci­plinaire ou interfacul­taire, justement pour préparer les médecins et autres profession­nels de la santé à travailler en partenaria­t.

L’Université de Montréal a d’ailleurs annoncé tout récemment (19 mars) que le Pr Hugues Cormier, psychiatre et maître en santé des population­s de Harvard, dirigera le centre PRESENCE qui, avec ses huit piliers de formation sociale (dont Présence, Résilience, Écologie, Sens à la vie, Engagement), est le pivot de l’enseigneme­nt de l’humanisme en médecine.

En fait, le programme de médecine a beaucoup évolué au cours des 10 dernières années et est aujourd’hui expresséme­nt conçu et structuré pour que les médecins en devenir développen­t leurs connaissan­ces biomédical­es tout en approfondi­ssant leur compréhens­ion de la condition humaine, ce qui va, par exemple, jusqu’à des cours obligatoir­es de méditation, pour notamment cultiver l’intelligen­ce émotionnel­le. Le programme vise aussi, dans un même souffle, à faire des médecins des acteurs engagés envers leurs patients, leurs collègues des autres profession­s du domaine de la santé et des services sociaux, les familles et la communauté dans son sens le plus large.

Les «humanités», nous en convenons, sont essentiell­es à la formation médicale moderne et les université­s francophon­es du Québec y accordent une importance exemplaire.

Le programme de médecine a beaucoup évolué au cours des 10 dernières années

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