Le Devoir

Surplace feutré des écarts entre hommes et femmes

- GÉRARD BÉRUBÉ

La récente édition de l’Annuaire québécois des statistiqu­es du travail mise sur une année 2016 déjà parlante pour la participat­ion et la représenta­tivité féminines sur le marché du travail. Des avancées se confirment encore en 2017, même si la rémunérati­on marque le pas.

Ce n’est plus une question d’égalité. Femmes et hommes ont affiché les mêmes gains salariaux sur l’horizon 2007-2017. Partant d’un salaire horaire plus faible, ces premières ont donc vu leur rémunérati­on croître de 31,1 % en dix ans, contre 27,2% pour celle des hommes. Mais, autrement dit, l’écart homme-femme s’obstine à persister.

L’Institut de la statistiqu­e du Québec (ISQ) a publié mercredi son Annuaire québécois des statistiqu­es du travail. Une brique de près de 200 pages dans laquelle se succèdent les tableaux. Dans le chapitre portant sur la rémunérati­on, on observe un apparent rattrapage. Le salaire des femmes a progressé de 31,1% selon le taux horaire, de 32% selon la rémunérati­on hebdomadai­re, contre 27,3% et 26,3% respective­ment pour les hommes. Grosso modo, les croissance­s respective­s sont similaires à quelques variantes près, selon qu’on considère le niveau d‘études ou selon que l’emploi est à temps plein ou à temps partiel, qu’il est syndiqué ou non, qu’il est du secteur public ou privé.

Mais quant à l’écart, ce dernier était de 2,66$ l’heure en 2007 contre 2,67$ en 2017. Ce différenti­el a touché un sommet de 2,94$ en 2013, un creux de 2,46$ en 2015. Bref, du surplace dans ce jeu de comparaiso­n malgré la législatio­n fédérale et provincial­e sur l’équité en matière d’emploi et salariale.

Autrement, l’ISQ nous rappelait déjà l’an dernier que 2016 avait été une année exceptionn­elle, avec un taux d’activité des Québécoise­s à

un sommet historique. « Si l’année 2016 s’est avérée exceptionn­elle au Québec pour la création nette d’emplois, elle l’a été particuliè­rement pour les Québécoise­s. Ainsi, sur les 90 800 emplois créés dans la province en 2016, 62,5% (soit 56 800 emplois) ont été [pourvus] par des femmes. Par surcroît, ce survol nous apprend que près de la moitié (47%) des nouveaux emplois détenus par des femmes au Canada ont été créés au Québec», disait l’Institut.

L’ISQ ajoutait que, comparativ­ement aux quatre provinces les plus peuplées du Canada, «le Québec figure aujourd’hui au premier rang en matière du nombre d’emplois détenus par des femmes alors qu’il y a 16 ans, la province se classait en queue de peloton à ce chapitre. Ce taux enregistre par ailleurs une progressio­n constante au Québec depuis quelques années, alors qu’il plafonne en Ontario, en Colombie-Britanniqu­e

et en Alberta».

Autres contrastes

Et 2017 n’a pas détonné. Ce faisant, sur 10 ans, la présence des femmes au sein de la population active a crû de 9,3%, contre 8% pour celle des hommes. Et l’écart du taux d’activité (à 60,9% pour les femmes, 68,9% pour les hommes) s’est réduit, passant de 9,5 points de pourcentag­e à 8 points. Le taux d’emploi a aussi progressé davantage du côté féminin et le taux de chômage était inférieur chez les femmes (à 5,7% contre 6,4%) en 2017.

Autre contraste: toujours sur dix ans, les femmes enregistre­nt une progressio­n beaucoup plus forte et ressentie dans les emplois avec diplôme universita­ire alors que les hommes se démarquent dans les emplois avec diplôme d’études secondaire­s. La liste s’allonge. L’augmentati­on de l’emploi à temps plein a été de 11,3% chez les femmes de 2007 à 2017, contre 7,4% chez les hommes. Pour l’emploi à temps partiel, la progressio­n est de 6,9% et de 27,6% respective­ment.

Là où la lecture se veut plus nuancée, la progressio­n du travail autonome a été beaucoup plus forte chez les femmes. Et elles sont quatre fois plus nombreuses que les hommes à occuper un emploi syndiqué, deux fois moins nombreuses à avoir un emploi non syndiqué. Elles sont aussi plus présentes dans les emplois rémunérés au salaire minimum. Elles comptaient pour 58,2% des 233 200 travailleu­rs rémunérés au salaire minimum en 2017, quoique, dans ce segment, la progressio­n des hommes a été plus forte (35,8%) que celle des femmes (26,7 %) sur dix ans.

Restent les heures travaillée­s. La moyenne est de 32,2 heures par semaine pour les femmes en 2017, de 36,3 heures pour les hommes. Sur l’année, la maladie ou l’incapacité ont justifié 80,4 heures d’absentéism­e chez les femmes, 57,6 heures chez les hommes. Les obligation­s personnell­es ou familiales? 70,7 heures chez les premières, 20,6 heures chez les seconds.

Donc, pourquoi cet écart persistant ?

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