Le Devoir

Tout être humain est spirituel

- HÉLÈNE ROULOT- GANZMANN Collaborat­ion spéciale

Ce n’est pas parce que le Québec a rejeté la religion catholique que les Québécois ne cultivent pas leur spirituali­té. Car selon la théologien­ne et professeur­e émérite de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) Suzanne Rousseau, la quête de sens est inhérente à l’humanité. Elle publie un ouvrage en forme de guide, afin d’outiller quiconque voudrait s’engager dans cette quête, qui est, selon elle, celle de toute une vie.

Quel lien faites-vous entre religion et spirituali­té?

Les gens confondent les deux. Ils croient que parce qu’ils ne pratiquent pas de religion, ils ne sont pas spirituels. Or, ce n’est pas la religion qui fait la spirituali­té, mais la spirituali­té qui fait la religion.

Les peuples se sont toujours donné des religions en fonction de ce en quoi ils croyaient. Que Dieu a créé le monde en six jours pour les chrétiens, que la Terre est une grande tortue pour les Amérindien­s, etc. C’est un phénomène nouveau que des gens vivent aujourd’hui sans dieu. Mais cela ne signifie pas que le spirituel ait disparu.

Comment cette spirituali­té se manifeste-t-elle?

Il suffit d’écouter les gens. Le vocabulair­e a changé, mais les concepts demeurent. Au lieu de parler de Dieu, d’ange ou de destin, ils évoquent l’énergie, la lumière, la force ou le karma. Ils continuent à chercher un sens à tout ce qui leur arrive. Ils se posent des questions sur l’avant, sur l’après. La question de l’origine et de la fin de l’univers est au coeur des préoccupat­ions. Notre propre finitude également. Lorsqu’un enfant demande à un parent comment ça se fait qu’il est au monde et où est-ce qu’il était avant, il pose une question spirituell­e.

À vous lire, cette spirituali­té permettrai­t à l’être humain de négocier les épreuves qui se dressent sur son chemin…

Tout être est spirituel, mais il n’en a pas forcément conscience. Lorsque tout va bien, ça ne pose pas trop de problèmes. Mais lorsque survient un pépin, on se demande souvent : pourquoi moi? Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter cela? Lorsqu’une personne chère décède par ailleurs, on commence à se questionne­r sur la possibilit­é de la revoir et d’établir un jour un nouveau contact. Ce sont souvent les événements tragiques qui nous font évoluer dans notre quête de sens. Mais en entreprena­nt ce cheminemen­t spirituel en amont, en entrant en relation avec son intériorit­é avant que les événements ne nous poussent à le faire, c’est certain que l’on atteint plus facilement la paix intérieure.

Cette paix intérieure, c’est l’ultime étape du cheminemen­t spirituel?

On atteint la paix intérieure lorsque l’on a résolu nos dilemmes. Les gens ont pris leurs distances avec l’Église parce qu’elle ne répondait plus à leurs besoins. Elle ne les aidait plus à résoudre leurs dilemmes. Ça ne signifie pas que les Québécois n’aient plus de dilemmes. Ces dilemmes les mettent face à des choix qui viennent bousculer leurs croyances et leurs valeurs. Ils les font évoluer, cheminer spirituell­ement. Résoudre ses dilemmes permet d’atteindre la paix intérieure, ce qui est finalement l’objectif de la dynamique spirituell­e.

EN-QUÊTE DE SENS GUIDE DE LA DYNAMIQUE SPIRITUELL­E CONTEMPORA­INE Suzanne Rousseau, Novalis, Montréal, 2018, 300 pages

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SOURCE SUZANNE ROUSSEAU La théologien­ne et professeur­e émérite de l’Université du Québec à Trois-Rivières Suzanne Rousseau
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