Le Devoir

La ministre Philpott satisfaite de sa réforme des services aux enfants autochtone­s

- KELLY GERALDINE MALONE à Winnipeg

La ministre fédérale des Services aux Autochtone­s estime qu’Ottawa s’est conformé entièremen­t aux ordonnance­s d’une décision du Tribunal des droits de la personne, qui concluait en 2016 que le gouverneme­nt fédéral faisait preuve de discrimina­tion à l’égard des enfants autochtone­s.

En entrevue avec La Presse canadienne, Jane Philpott soutient que les parties conviendro­nt bientôt du succès de la réforme, même si la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada, qui avait porté plainte, estime qu’on est encore loin du compte. Car Cindy Blackstock, directrice de l’organisme, rappelle que, encore en 2018, les enfants autochtone­s sont moins bien traités que les autres petits Canadiens.

La Société de soutien et l’Assemblée des Premières Nations avaient déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne en 2007. Près de dix ans plus tard, en 2016, le Tribunal des droits de la personne se rangeait à l’avis de la Société de soutien et concluait que le gouverneme­nt fédéral pratiquait de la discrimina­tion: les enfants autochtone­s pouvaient bénéficier des mêmes programmes sociaux seulement s’ils étaient pris en charge par l’État — souvent à l’extérieur de leur communauté, dans des foyers allochtone­s.

Le tribunal avait alors ordonné au gouverneme­nt fédéral de mettre un terme immédiatem­ent à cette discrimina­tion et de modifier ses programmes d’aide à l’enfance destinés aux autochtone­s, afin que les enfants obtiennent les mêmes services que les autres Canadiens en santé et en éducation.

En février, Ottawa a été frappé, pour la quatrième fois, par une ordonnance de non-conformité rendue par le Tribunal des droits de la personne, qui déplorait la lenteur des changement­s apportés, étant donné la gravité et l’urgence de la situation. Le jour même, le ministère des Services aux Autochtone­s informait par lettre les 105 agences autochtone­s d’aide à l’enfance et à la famille qu’Ottawa commencera­it immédiatem­ent à assumer leurs coûts — et rétroactiv­ement jusqu’en 2016.

Réalisatio­ns concrètes

Mme Philpott rappelle que le plus récent budget prévoyait près de 1,4 milliard de dollars sur six ans pour les services à l’enfance et à la famille dans les communauté­s autochtone­s. Mais Cindy Blackstock soutient que pour se conformer à l’ordonnance du tribunal, il ne suffit pas de promettre de l’argent: il faut aussi s’assurer que ces sommes se matérialis­ent concrèteme­nt par des soins aux enfants, sur le terrain.

«Nous ignorons encore quelle part des sommes promises ira aux provinces et quelle part ira aux agences ou aux communauté­s autochtone­s», déplore Mme Blackstock. La directrice de la Société de soutien admet que l’arrivée de Mme Philpott à la tête du nouveau ministère des Services aux Autochtone­s, créé à l’été 2017, a permis d’accélérer un peu les choses. Mais elle se demande si les sommes promises ne seront pas finalement accompagné­es de conditions diverses.

Les enfants autochtone­s comptent pour environ 7 % de tous les enfants canadiens, mais pour plus de 50 % de tous ceux qui sont confiés aux services sociaux, alors qu’au Manitoba, c’est près de 90 %.

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Jane Philpott

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