Le Devoir

Première femme à diriger la société CBC/RadioCanad­a

Une productric­e anglophone, Catherine Tait, devient la première femme à diriger la société CBC/Radio-Canada en plus de 80 ans d’histoire

- PHILIPPE PAPINEAU Avec Stéphane Baillargeo­n et La Presse canadienne Le Devoir

Les enjeux numériques, l’inclusion des minorités, l’informatio­n locale et des désirs de partenaria­ts avec les autres acteurs canadiens de la radiodiffu­sion sont parmi les priorités évoquées par la nouvelle p.-d.g. de la société CBC/Radio-Canada, Catherine Tait. Cette dernière a par ailleurs reçu un accueil très favorable des acteurs du milieu, qui la disent directe, dynamique, compétente et audacieuse.

Mme Tait est une productric­e anglophone bien connue dans le milieu de la télévision et du cinéma, dans lequel elle travaille depuis une trentaine d’années. Elle est en ce moment présidente de l’entreprise Duopoly.

Cette Canadienne qui vit aux États-Unis devient la première femme nommée à titre de grande patronne de CBC/Radio-Canada.

«Nous brisons une fois de plus le plafond de verre», a lancé la ministre du Patrimoine, Mélanie Joly, en point de presse à Ottawa, mardi.

Le gouverneme­nt a choisi Mme Tait à partir d’une courte liste de candidats fournie par un comité de sélection indépendan­t, formé le 20 juin dernier. Ottawa avait créé cette façon de faire non partisane pour trouver le remplaçant d’Hubert T. Lacroix, qui occupait ce poste depuis 2008.

Le président du comité de sélection, Tom Clark, a dit au Devoir que la candidatur­e de Catherine Tait a été possible à la suite de la réouvertur­e du poste en janvier, ce qui a permis d’accepter les candidatur­es des Canadiens vivant à l’étranger. «Mais je ne savais pas que Catherine était disponible, autrement dit on ne l’a pas rouvert pour elle, raconte Tom Clark. Alors, ça a été une surprise agréable, un coup de chance.»

M. Clark, un ancien de Global, affirme au Devoir avoir fourni au gouverneme­nt un choix prudent et un choix «audacieux» (« bold »), Mme Tait répondant au second qualificat­if.

Son mandat de cinq ans débutera en juillet.

«Job de rêve»

En point de presse mardi matin, Catherine Tait a dit rieuse que la direction de Radio-Canada était son «job de rêve ».

Âgée de 60 ans, les cheveux roux vif, Mme Tait a une carrière déjà bien remplie, dans laquelle on peut noter des passages à Téléfilm Canada, au Fonds des médias du Canada, chez le distribute­ur eOne et à l’importante boîte de diffusion DHX, qui produit de nombreuses émissions pour enfants.

Elle a aussi été attachée culturelle du Canada en France et a déjà collaboré avec le diffuseur public lors de son passage chez Salter Street Films d’Halifax, qui produisait This Hour Has 22 Minutes.

Les priorités

La question du numérique a été au coeur des propos de Mme Tait mardi matin, lors de sa nomination.

«Je crois que dans cette vague numérique, le rôle du radiodiffu­seur public n’aura jamais été aussi important pour notre culture, notre dualité linguistiq­ue et notre démocratie », a-t-elle dit.

Elle estime que des changement­s ont déjà eu lieu à RadioCanad­a avant d’ajouter qu’elle «va aller plus loin».

Mme Tait a aussi parlé de l’importance de l’informatio­n locale et canadienne devant «l’océan, le tsunami de contenus numériques qui viennent de partout dans le monde, spécialeme­nt des États-Unis. » La nouvelle p.-d.g. veut aussi que Radio-Canada pratique un

« storytelli­ng inclusif», pour parler de la réalité des minorités, qu’elles soient autochtone­s ou issues de la communauté LGBTQ.

Catherine Tait a souligné l’importance pour Radio-Canada d’établir des partenaria­ts avec les autres acteurs de la radiodiffu­sion au pays. «Seulement à travers la collaborat­ion pourra-t-on conserver la place du Canada à l’internatio­nal. »

Réactions

Les mots d’éloges ou d’espoir se sont multipliés mardi au sujet de la nomination de Catherine Tait.

Selon Alain Saulnier, ancien directeur général de l’informatio­n de Radio-Canada et professeur invité au DESS en journalism­e à l’Université de Montréal, Mme Tait est porteuse de renouveau. « Elle a une connaissan­ce directe de la production à l’ère numérique, ce qu’aucun de ses prédécesse­urs n’avait jusqu’ici. »

Le p.-d.g. et président exécutif de DMX Media, Michael Donovan, a écrit au Devoir que cette nomination à la tête de la CBC «représente un pas en avant positif pour les créateurs et pour le Canada».

Alors que chez Téléfilm Canada on a souligné «son approche collaborat­ive et visionnair­e», le président du comité de sélection, Tom Clark, a évoqué un côté « mordant ».

Simon Brault, du Conseil des arts du Canada, connaît le travail de Mme Tait et y voit un habile et important mélange d’expérience­s publiques et privées. « Les gens qui la connaissen­t personnell­ement et auxquels j’ai parlé me disent que c’est quelqu’un de très direct, qui n’a pas peur de prendre des risques, de brasser la cage. Qui ne suit pas la tradition pour la tradition.»

L’organisme Les Amis de la radiodiffu­sion canadienne s’est d’abord réjoui «de la fin du mandat d’Hubert T. Lacroix, l’homme de Harper». Aux yeux du porte-parole Daniel Bernhard, Mme Tait est actuelleme­nt «plus qualifiée que M. Lacroix quand il est arrivé» en poste.

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 ?? SEAN KILPATRICK ‘LA PRESSE CANADIENNE ?? La nomination de Catherine Tait à la tête de CBC/Radio-Canada a été annoncée mardi matin par la ministre du Patrimoine, Mélanie Joly.
SEAN KILPATRICK ‘LA PRESSE CANADIENNE La nomination de Catherine Tait à la tête de CBC/Radio-Canada a été annoncée mardi matin par la ministre du Patrimoine, Mélanie Joly.

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