Québec envisage de rénover la vieille prison Tanguay
Le ministère de la Sécurité publique envisage d’agrandir et de rénover la vieille prison Tanguay, évacuée il y a deux ans après avoir été déclarée insalubre.
Le réaménagement de fond en comble de la prison pour femmes fait partie des scénarios considérés par Québec, indiquent nos sources. Les 260 femmes qui étaient détenues à Tanguay ont été transférées en 2016 dans l’établissement Leclerc de Laval, une autre prison, fédérale celle-là, qui avait été fermée pour cause de vétusté.
Depuis, le ministère de la Sécurité publique étudie tous les scénarios possibles pour aménager un nouveau centre de détention pour femmes dans la grande région de Montréal. Le ministère a repéré des terrains susceptibles d’accueillir une prison, mais l’endroit le mieux situé reste la vieille Maison Tanguay, dans l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville, au nord de Montréal.
« Pour nous, c’est un emplacement qui a beaucoup de sens», dit Ruth Gagnon, directrice générale de la Société Elizabeth Fry, un organisme communautaire qui aide les femmes incarcérées. Elle fait partie d’un comité mis sur pied par le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, pour recommander des façons d’améliorer l’incarcération des femmes dans la région de Montréal.
Ce comité «poursuit activement les travaux visant à proposer un modèle en matière de gestion de l’incarcération qui répond aux besoins spécifiques des femmes à plus long terme et qui servira à soutenir l’élaboration de scénarios préliminaires d’infrastructures carcérales, notamment en ce qui concerne l’avenir de la Maison Tanguay», indique le ministère de la Sécurité publique.
Chose certaine, le réaménagement de la prison Tanguay nécessiterait des travaux majeurs, indiquent nos sources. Le projet «d’agrandissement et de réaménagement de l’établissement de détention Maison Tanguay» figure au Plan québécois des infrastructures 2018-2028 dans la catégorie «en planification», indique le budget du Québec déposé la semaine dernière. Il figure au PQI depuis quatre ans, indique-t-on au ministère de la Sécurité publique.
Des femmes vulnérables
La Maison Tanguay offre l’avantage d’être située en plein quartier résidentiel, sur l’île de Montréal et près des transports en commun, note Mme Gagnon. Cette proximité favorise les visites de proches et de membres de la famille des femmes incarcérées. Aussi, les détenues peuvent facilement prendre l’autobus quand elles sortent de la prison les soirs ou les fins de semaine. C’est pas mal plus simple qu’à la prison Leclerc, située en plein champ à Laval.
Québec devrait considérer sérieusement de réaménager la vieille prison Tanguay, car l’emplacement semble idéal, indique aussi Catherine Chesnay, professeure à l’École de travail social de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).
L’accessibilité pour les détenues et leurs proches est un critère crucial à considérer, selon elle. La vaste majorité des femmes incarcérées viennent de milieux pauvres. Souvent, ni elles ni leurs proches n’ont les moyens de se payer une course en taxi, et encore moins une voiture.
«En milieu carcéral, il y a une vulnérabilité qui est typique aux femmes», dit Catherine Chesnay. La majorité des détenues éprouvent des problèmes de santé mentale, d’itinérance ou ont été victimes de violence, explique la spécialiste de la criminalisation des femmes.
Elles présentent un faible risque pour la société. Plusieurs se retrouvent au piège des «portes tournantes»: elles passent du temps en liberté, puis retournent en prison pour un délit mineur. Environ le quart des femmes incarcérées purgent une peine discontinue — durant les fins de semaine — pour n’avoir pas respecté une ordonnance de probation.
Catherine Chesnay dit souhaiter que l’architecture de la nouvelle prison reflète la réalité des détenues et soit propice à la réinsertion — ou même à l’insertion — sociale des femmes.