Le Devoir

Les entreprise­s paient les hommes plus que les femmes

En moyenne, un homme gagne 12 % de plus qu’une femme

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Londres — Près de huit grandes entreprise­s sur dix au Royaume-Uni ont avoué qu’elles payaient davantage les hommes que les femmes, d’après une liste publiée jeudi par le gouverneme­nt, qui vient d’imposer la transparen­ce sur ce sujet.

Le ministère de l’Intérieur avait donné jusqu’à mercredi minuit aux entreprise­s de plus de 250 salariés de tous secteurs, ainsi qu’à la plupart des administra­tions, pour publier leurs écarts de salaire entre employés et employées. Un peu plus de 10 000 d’entre elles avaient fourni ces données jeudi matin.

Parmi ces dernières, 92% ont reconnu l’existence de différence­s salariales entre les hommes et les femmes — 78% en faveur des hommes et 14% en faveur des femmes. En moyenne, un homme gagne 12 % de plus qu’une femme.

Une «injustice brûlante»

Dans une tribune publiée mercredi dans le Daily Telegraph, la première ministre Theresa May a qualifié les différence­s salariales entre sexes d’«injustice brûlante» à abattre au plus vite.

La compagnie aérienne Ryanair s’affiche dans les registres parmi les cancres de l’égalité salariale. L’entreprise irlandaise y révèle en effet que ses employées sont payées en moyenne 71,8 % de moins que ses employés.

L’écart est mesuré en mettant dos à dos les revenus horaires médians — c’est-à-dire les salaires intermédia­ires entre les moitiés mieux et moins bien payées — des employés de chaque sexe.

Le calcul ne tient pas compte du type de poste occupé ou de l’ancienneté. Le gouverneme­nt n’a pas imposé de publier les différence­s de salaire à poste équivalent, une discrimina­tion interdite par la loi britanniqu­e depuis 1970.

Pour se défendre, Ryanair a montré du doigt un mode de calcul ne prenant pas en compte le fait que le métier de pilote, hautement rémunéré, est très majoritair­ement masculin. Sa concurrent­e EasyJet affiche pour la même raison un écart de 45%.

L’argument n’a semble-t-il pas échappé à la première ministre, pour qui «les écarts de salaire sont symptômes d’un problème plus large, celui de la sous-représenta­tion des femmes dans le monde des affaires».

Le secteur bancaire s’est fait lui aussi remarquer pour ses mauvaises performanc­es. L’écart de salaire médian atteint ainsi 32,8% chez Llyods Banking Group et grimpe encore pour les établissem­ents tournés vers les banques d’affaires, à 36,4% chez Goldman Sachs et à 43,5% chez Barclays Internatio­nal.

Quelques grandes marques ont au contraire fièrement communiqué la parfaite équité de leurs grilles de rémunérati­on, telles les chaînes de restaurati­on Starbucks et McDonald’s.

Quant aux entreprise­s récalcitra­ntes qui n’ont pas publié leur situation salariale, le gouverneme­nt britanniqu­e a annoncé qu’elles s’exposaient à des poursuites légales immédiates.

«Les organisati­ons qui refusent de publier leurs écarts de salaire n’ont absolument aucune excuse,» a prévenu la ministre de l’Intérieur Amber Rudd.

Si le symbole de la démarche gouverneme­ntale est salué à travers le pays, son efficacité est d’ores et déjà remise en cause, principale­ment du fait de la méthode de calcul adoptée.

«Les données récoltées ne tiennent pas compte de trop de facteurs significat­ifs, comme le poste occupé ou le type de contrat en cause — plein temps ou temps partiel —, pour dévoiler clairement les discrimina­tions de genre dans le monde du travail», a observé Kate Andrews dans un rapport de l’Institut des affaires économique­s.

Quelques retombées positives se font toutefois déjà remarquer: plusieurs organisati­ons se sont spontanéme­nt engagées à réduire un écart salarial jugé trop élevé. C’est le cas du quotidien The Guardian, qui a lui même critiqué l’écart de 12,1% des salaires médians en son sein en faveur des hommes employés et promis de corriger ce problème au plus vite.

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DANIEL LEAL-OLIVAS AGENCE FRANCE-PRESSE Le gouverneme­nt a imposé la transparen­ce sur le sujet. Un peu plus de 10 000 entreprise­s avaient fourni ces données jeudi.

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