Le Devoir

Martine Ouellet réclame des excuses de Radio-Canada

La chef du Bloc québécois s’en prend à Médium large

- MARIE-MICHÈLE SIOUI Correspond­ante parlementa­ire à Québec Avec Marie Vastel

Après La joute, voilà que la chef du Bloc québécois, Martine Ouellet, s’en prend à Radio-Canada et à l’Ordre des psychologu­es, qu’elle menace de poursuivre en raison de l’« odieuse psychanaly­se en direct» à laquelle se seraient livrés l’animatrice Catherine Perrin et ses invités Hubert Van Gijseghem et Rose-Marie Charest.

L’animatrice et les deux psychologu­es conviés à son micro ont «insinué» et tenté de démontrer «que notre cliente serait une idéologue, une narcissiqu­e grandiose », a écrit l’avocat Guy Bertrand dans une requête datée du 3 avril, et dans laquelle il réclame des excuses publiques de la part de Radio-Canada.

Pour la deuxième fois en trois semaines, la chef du Bloc québécois et son avocat ont ainsi réuni les journalist­es, jeudi, pour leur annoncer qu’ils envisageai­ent de poursuivre un média. Le 22 mars, ils ont mis en demeure le réseau TVA, puisqu’ils reprochent aux animateurs de l’émission La joute d’avoir qualifié Martine Ouellet de «femme malhonnête qui est prête à tout pour arriver à ses fins, y compris à utiliser des manoeuvres douteuses».

Le segment radiophoni­que qui les occupe cette fois a été diffusé le 2 mars. Pendant 23 minutes, Catherine Perrin et les psychologu­es Van Gijseghem et Charest s’attellent à décortique­r «la personnali­té qui a toujours raison». «Oui, c’est un peu inspiré de l’actualité d’une certaine Martine Ouellet», a reconnu l’animatrice en ouverture d’émission. «Il ne s’agit pas, bien sûr, de faire son profil psychologi­que à elle, mais de prendre ce trait de personnali­té que, quand même, plusieurs ont souligné chez elle, et de voir comment tout ça fonctionne. »

Pendant le segment — retiré du Web depuis —, le nom de Martine Ouellet est mentionné trois ou quatre fois, selon Guy Bertrand.

Un « diagnostic en ondes»

Comme son avocat, Martine Ouellet estime que les trois interlocut­eurs ont «diagnostiq­ué un chef de parti en ondes». «Ce qu’ils ont fait est très grave et dépasse complèteme­nt les limites. Du jamais vu», a déclaré la chef bloquiste.

Pire, les références des intervenan­ts à l’auteur américain Eric Hoffer, qui s’est intéressé aux racines du fanatisme au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, font en sorte que ceux-ci associent «l’idéologie de l’indépendan­ce à la dissonance cognitive, la paranoïa, la violence». «Ce faisant, l’animatrice et les psychologu­es attaquent directemen­t les droits fondamenta­ux des indépendan­tistes québécois», a déclaré Martine Ouellet.

«Même si Radio-Canada a comme mandat, en vertu de sa loi constituti­ve, de promouvoir l’unité canadienne, cela ne lui donne pas le droit de stigmatise­r les indépendan­tistes en parlant d’eux comme des idéologues, qui ont une foi aveugle et le livre de Dieu derrière eux», a-t-elle ajouté, en se défendant du même souffle d’associer la mission de Radio-Canada à un biais dans ses choix journalist­iques. «Est-ce que vous croyez que Radio-Canada aurait osé faire un tel amalgame avec le fédéralism­e? Je pense que vous devriez leur poser la question », a-t-elle suggéré.

La réplique du diffuseur public est venue dans un communiqué de presse, dans lequel il a réfuté les allégation­s de Martine Ouellet et de son avocat. «L’animatrice avait clairement établi d’entrée de jeu qu’il n’était pas question de madame Ouellet comme telle. Il est donc totalement faux d’affirmer que Mme Ouellet a été “diagnostiq­uée” en ondes», a écrit Radio-Canada. «Plus généraleme­nt, les propos de l’animatrice et la teneur de ce segment de Médium large ont été fortement dénaturés dans cette conférence de presse. »

Martine Ouellet s’est défendue de passer au crible les interventi­ons médiatique­s la concernant et a assuré qu’elle était « tout à fait en faveur de la liberté d’expression». À ses côtés, Guy Bertrand a rappelé qu’il disposait d’un délai d’un an pour intenter les poursuites contre Radio-Canada et TVA qu’il a évoquées. Mais « vous n’avez pas à avoir peur, surtout pas de ma cliente. Elle ne poursuit pas tout le monde qui est contre elle», a-t-il assuré. «Sauf si ce n’est pas de la liberté d’expression.»

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Martine Ouellet

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