Le Devoir

Le NPD veut s’en prendre aux fabricants d’opioïdes

- MARIE VASTEL Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa

Les néodémocra­tes veulent voir les géants pharmaceut­iques assumer leur part de responsabi­lités dans la crise des opioïdes qui frappe le Canada depuis quelques années. Et pour ce faire, à leur avis, Ottawa devrait enquêter formelleme­nt sur le rôle de ces compagnies dans la mise en marché de ces médicament­s à forte dépendance. Et, ultimement, obtenir de celles-ci d’importante­s indemnisat­ions.

Le député néodémocra­te Don Davies s’inspire des États-Unis, qui se sont penchés sur le cas du fabricant de l’OxyContin, Purdue Pharma, et qui ont réussi à obtenir un règlement de 634 millions$US en 2007. La compagnie pharmaceut­ique était accusée d’avoir plaidé, à tort, que l’OxyContin créait une plus faible dépendance que d’autres médicament­s du même genre.

«Si les dirigeants d’entreprise ont minimisé ou caché les propriétés addictives de ces produits aux ÉtatsUnis, il est certaineme­nt raisonnabl­e de croire qu’il est possible qu’ils l’aient fait aussi au Canada, a fait valoir M. Davies vendredi. Je me demande bien pourquoi le gouverneme­nt canadien n’a pas pris de mesures pour enquêter, alors que le départemen­t de la Justice des États-Unis l’a fait. »

M. Davies voudrait voir les ministères de la Justice ou de la Santé vérifier si Purdue, mais aussi les autres fabricants d’opioïdes vendus au pays, a respecté la réglementa­tion canadienne et a fourni des informatio­ns conformes aux consommate­urs de leurs produits quant à leur caractère dépendant.

Plus de 4000 Canadiens sont morts d’une surdose d’opioïdes l’an dernier. Des victimes qui peuvent être des consommate­urs de drogues illicites, mais aussi des citoyens qui ont développé une dépendance à un opioïde prescrit par un médecin.

«Quel message est-ce que cela envoie aux dizaines de milliers de Canadiens et à leurs familles, qui ont perdu un proche mort d’une surdose d’opioïdes, quand leurs gouverneme­nts ne se battent pas pour obtenir justice?» demandait Don Davies cette semaine.

Le bureau de la ministre de la Santé, Ginette Petitpas-Taylor, s’est contenté d’une réponse évasive vendredi.

«Nous continuons d’évaluer toutes les options pour contrer la crise des opioïdes, y compris celles pour rendre l’industrie plus responsabl­e et plus transparen­te», a rétorqué un porteparol­e de la ministre.

Purdue Pharma a plaidé, par courriel, avoir toujours commercial­isé ses produits en tout respect des règles canadienne­s en la matière.

Action collective en suspens

L’entreprise a accepté, en mai dernier, de verser 20 millions pour régler une poursuite collective intentée par des victimes arguant avoir développé une dépendance à l’OxyContin entre sa mise en marché, en 1996, et son retrait en 2012.

Le règlement avait été approuvé par les tribunaux de la Nouvelle-Écosse, de l’Ontario et du Québec. Mais un juge de la Saskatchew­an l’a rejeté, le mois dernier, estimant que l’offre n’était pas « juste, raisonnabl­e et dans l’intérêt véritable des membres du groupe».

Purdue Pharma avait offert 18 millions aux victimes (entre 2000 et 3000 personnes, dont possibleme­nt 500 au Québec) et 2 millions que se partagerai­ent les provinces et territoire­s. En vertu de l’entente, Purdue n’admettait pas de responsabi­lité. Mais les tribunaux des quatre provinces devaient l’approuver.

La compagnie a signifié son intention de possibleme­nt interjeter appel. Purdue et l’avocat qui a intenté l’action collective, Ray Wagner, disent tous deux étudier les options à leur dispositio­n.

Don Davies estime que l’offre de Purdue est dérisoire pour les provinces, qui devraient plutôt selon lui recevoir autour de 100 millions de la compagnie afin de leur rembourser tous les soins d’urgence ou de traitement de dépendance.

Les États-Unis ont obtenu en 2007 de Purdue un règlement de 634 millions$US

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