Un appui au retour du baseball, mais pas à tout prix
Les Québécois s’opposent au financement public du projet montréalais
Le rêve du retour des Expos à Montréal ne s’est pas éteint avec la défaite électorale de Denis Coderre, en novembre dernier. Près de trois Québécois sur cinq souhaitent voir une équipe de baseball professionnel s’installer dans la métropole, mais pas à tout prix: une forte majorité estime que les gouvernements ne doivent pas investir de l’argent public dans le projet, révèle un sondage Léger réalisé pour Le Devoir.
Porté par Denis Coderre depuis son arrivée à l’hôtel de ville de Montréal en 2013, le projet du retour des Expos a refait surface au début du mois d’avril, lorsque la mairesse Valérie Plante a accepté de rencontrer les hommes d’affaires Stephen Bronfman et Mitch Garber pour en discuter. Elle a alors répété qu’elle était prête à appuyer la venue d’une équipe de baseball professionnelle à Montréal, mais qu’elle n’investirait pas un sou dans l’aventure sans d’abord consulter les Montréalais.
Les résultats du sondage Léger, réalisé entre le 13 et le 15 avril, indiquent que la plupart des Québécois partagent sa vision: 58% des répondants souhaitent le retour d’une équipe de baseball professionnel à Montréal, alors que 27% n’en veulent pas.
Les Québécois sont cependant aussi nombreux (58%) à rejeter l’idée que les gouverne-
ments — municipal, provincial ou fédéral — investissent des fonds publics pour permettre au projet de se concrétiser, alors que le tiers des répondants (32 %) appuie l’injection d’argent public.
Opinions polarisées
La question du financement pourrait être épineuse pour Valérie Plante et ses collègues des gouvernements provincial et fédéral, puisqu’elle polarise l’opinion publique. Parmi ceux et celles qui appuient le retour d’une équipe de baseball professionnel, 51% estiment que les gouvernements devraient contribuer financièrement au projet, alors que 40% veulent laisser le privé s’en charger.
Le portrait est différent lorsqu’on analyse les réponses des Québécois qui ne veulent pas revoir une équipe de baseball professionnelle à Montréal : 92 % s’opposent à un soutien financier des gouvernements et seulement 3% y sont favorables.
Autrement dit, les partisans du retour des Expos ne sont pas tous persuadés de l’utilité d’investir de l’argent public pour attirer une équipe dans la métropole ou y construire un nouveau stade, tandis que les opposants au projet rejettent catégoriquement l’idée que leur argent serve à financer le projet.
Le sondage a été mené en ligne du 13 au 15 avril auprès de 1008 répondants. Un échantillon probabiliste de cette taille aurait une marge d’erreur de 3,1% dans 19 cas sur 20.
Appui avec conditions
Pour le moment, le retour d’une équipe de baseball à Montréal demeure hypothétique, mais les politiciens ont tour à tour pris position au cours des dernières semaines. «Si le retour d’une équipe de baseball, c’est bon pour Montréal, we’re in », a déclaré la mairesse Valérie Plante il y a trois semaines, à la sortie de sa rencontre avec MM. Bronfman et Garber à l’hôtel de ville de Montréal. Elle a précisé que l’appui de la Ville peut prendre une autre forme qu’un investissement direct.
«Je vois très bien comment la Ville de Montréal peut être un partenaire, soutenir le retour d’une équipe de baseball de plein d’autres façons», a-telle affirmé.
Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, a jusqu’à maintenant adopté une position semblable à celle de Mme Plante. «J’ai toujours dit la chose suivante: le sport majeur, c’est une entreprise. Une entreprise, c’est là pour faire de l’argent, donc les premiers investisseurs et quasiment les seuls investisseurs devraient être le secteur privé», a-t-il déclaré au moment où se tenait la rencontre fort attendue à l’hôtel de ville de Montréal.
«Ils peuvent venir voir le gouvernement comme partenaire, mais il faut que ce soit un partenariat qui permette également aux Québécois de faire de l’argent », a-t-il ajouté.
Projet d’un milliard?
Les résultats du sondage réalisé pour Le Devoir font écho à un coup de sonde réalisé en 2013 pour le compte de Projet Baseball Montréal, un groupe dirigé par l’ancien joueur des Expos Warren Cromartie qui tente depuis des années de ramener une équipe du baseball majeur dans la métropole.
Il y a cinq ans, 69 % des Québécois étaient pour le retour d’une équipe de baseball professionnel à Montréal et 11% s’y opposaient. L’appui était encore plus grand du côté du milieu des affaires montréalais (81 %).
À l’époque, une étude de faisabilité réalisée par la firme EY à la demande de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain a conclu que le retour d’une équipe de baseball professionnel à Montréal serait un projet viable sur le plan financier, pour vu que certaines conditions soient remplies et que les gouvernements acceptent d’y injecter de l’argent public.
Le rapport estimait que le coût total du projet — qui comprenait la construction d’un nouveau stade de 467 millions de dollars à proximité du centre-ville de Montréal — serait de 1,025 milliard de dollars et que le financement public devrait couvrir le tiers de cette somme, soit 335 millions.
La viabilité d’une nouvelle équipe de baseball montréalaise reposait également sur une demande forte pour des abonnements de saison, une masse salariale modeste, mais concurrentielle, et la présence d’un groupe de propriétaires «bien capitalisés », entre autres.