Le Devoir

Une lettre antisémite du compositeu­r Richard Wagner sera vendue aux enchères à Jérusalem

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Jérusalem — Une lettre de Richard Wagner à un intellectu­el français mettant en garde contre «l’influence» juive dans le domaine culturel sera vendue aux enchères mardi en Israël, où les représenta­tions publiques des oeuvres du compositeu­r antisémite sont boycottées.

Wagner (1813-1883), dont les oeuvres imprégnées de nationalis­me ont été adoptées au XXe siècle par le IIIe Reich, était le compositeu­r favori de Hitler.

Datée du 25 avril 1869, sa lettre au philosophe, poète et critique Edouard Schuré traite de la réception de son pamphlet Judaïsme dans la musique, initialeme­nt publié en 1850 sous un pseudonyme.

«Le Français connaît très peu de choses sur les juifs», écrit Wagner à son ami, habitant dans la ville suisse de Lucerne, affirmant que l’assimilati­on juive dans la société française empêche de voir «l’influence corrosive de l’esprit juifsurlac­ulturemode­rne».

L’héritage musical et artistique de Wagner est imprégné d’antisémiti­sme, de misogynie et d’idées pré-nazies de pureté raciale, même si le compositeu­r est décédé en 1883, bien avant l’avènement du nazisme.

Il n’y a pas de loi en Israël interdisan­t de jouer Wagner, mais les formations musicales s’en abstiennen­t.

Meron Eren, cofondateu­r et propriétai­re de la maison d’enchères Kedem, a indiqué à l’AFP que c’était la première fois qu’il vendait un objet ayant appartenu à Wagner.

«Si Wagner savait qu’un juif barbu à Jérusalem faisait des affaires avec sa lettre, il se retournera­it dans sa tombe», a-t-il souligné.

Wagner cristallis­e les derniers restes du boycottage israélien des produits allemands, qui n’a plus cours depuis de nombreuses années, souligne Jonathan Livny, directeur de la

«Si Wagner savait qu’un juif barbu à Jérusalem faisait des affaires avec sa lettre, il se retournera­it dans sa tombe »

Israel Wagner Society.

« Les Israéliens conduisent des Volkswagen, les [véhicules] Mercedes sont un symbole de statut social […] Les trains et les sous-marins israéliens sont fabriqués en Allemagne », souligne-t-il.

« C’est facile de boycotter Wagner parce que la plupart des gens n’écoutent pas sa musique », ajoute-t-il.

Ruth Hacohen, professeur de musicologi­e à l’Université hébraïque de Jérusalem et auteure du livre The Music Libel Against the Jews, estime que la lettre montre la volonté de Wagner de voir ses opinions antisémite­s acceptées par le public.

La lettre reflète le «tournant» dans l’antisémiti­sme européen qui a permis à Wagner de publier Le judaïsme dans la musique sous son nom, et de parler de l’«essence» des Juifs, qui ne pouvait disparaîtr­e, même parmi ceux assimilés à la société européenne chrétienne, explique-t-elle.

 ?? MENAHEM KAHANA AGENCE FRANCE-PRESSE ?? Meron Eren, cofondateu­r et propriétai­re de la maison d’enchères Kedem, a indiqué que c’était la première fois qu’il vendait un objet ayant appartenu au célèbre compositeu­r allemand Richard Wagner.
MENAHEM KAHANA AGENCE FRANCE-PRESSE Meron Eren, cofondateu­r et propriétai­re de la maison d’enchères Kedem, a indiqué que c’était la première fois qu’il vendait un objet ayant appartenu au célèbre compositeu­r allemand Richard Wagner.

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