Le Devoir

La mosquée ciblée à cause de la « couleur du temps »

- ISABELLE PORTER à Québec

Alexandre Bissonnett­e a décidé de s’en prendre à une mosquée à cause de la «couleur du temps», a fait valoir mardi un psychiatre au tribunal. «À une autre époque, il aurait ciblé les juifs. »

Les préjugés qui circulent sur les musulmans ont fourni au tueur «une justificat­ion pour atteindre l’objectif de sa quête », a fait valoir le psychiatre légiste Sylvain Faucher dans son rapport et son témoignage.

Mue par une volonté de tuer, cette quête de «pouvoir» est née d’une envie de se venger notamment de l’intimidati­on qu’il avait vécue jeune, a-t-il expliqué.

Elle s’est ensuite nourrie de différente­s sources, «que ce soit les idées de l’actuel président américain sur l’immigratio­n, ou les prises de position des médias de droite ou d’extrême droite», a mentionné l’expert.

Rappelons qu’après avoir plaidé coupable le 28 mars, Alexandre Bissonnett­e avait déclaré qu’il n’était «ni un terroriste ni un islamophob­e ».

Que faut-il donc comprendre de cette affirmatio­n? a demandé le juge François Huot au Dr Faucher.

D’autant plus qu’Alexandre Bissonnett­e a de la difficulté à tolérer la critique, a répondu le psychiatre. Le meurtrier a dit cela «parce qu’on pouvait le lui reprocher». «Il n’est pas capable de le supporter.»

La réhabilita­tion jugée possible

M. Faucher a par ailleurs affirmé qu’une réhabilita­tion de M. Bissonnett­e était possible. Un point de vue déjà défendu la veille par son collègue psychologu­e Marc-André Lamontagne.

L’expert s’est toutefois montré prudent et a insisté sur le travail que M. Bissonnett­e allait d’abord devoir faire sur luimême. «Le risque de récidive de M. Bissonnett­e n’est pas particuliè­rement significat­if», a-t-il écrit avant d’ajouter qu’il n’était pas «faible» pour autant.

Selon lui, il est plus probable qu’il commette dans le futur une voie de fait qu’un crime grave.

En après-midi, la défense a convoqué une autre psychiatre, Marie-Frédérique Allard, qui a elle aussi affirmé qu’une réhabilita­tion après 25 ans n’était pas impossible.

«Souvent, la souffrance est un bon moteur pour changer et ne pas récidiver», a-t-elle notamment souligné. Les inquiétude­s manifestée­s par le criminel à l’endroit de ses parents, et en particulie­r de son père, montrent aussi qu’il est capable d’empathie, a-t-elle fait valoir.

La Couronne a demandé à faire voir le meurtrier par un autre expert, le psychiatre Gilles Chamberlan­d de l’Institut Philippe-Pinel. Ce dernier doit rencontrer Alexandre Bissonnett­e mercredi après-midi et présenter son rapport jeudi.

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