Le Devoir

La TVQ pourrait être perçue ailleurs qu’à la frontière, dit Québec

Le ministre Leitão n’exclut pas la négociatio­n d’ententes avec des sociétés étrangères

- FRANÇOIS DESJARDINS

En plus d’utiliser les services douaniers et Postes Canada pour intercepte­r les colis afin de percevoir sa taxe de vente, le gouverneme­nt Couillard n’exclut pas l’idée de négocier des ententes avec des sociétés étrangères qui comptent des consommate­urs québécois dans leur bassin de clientèle.

Cette hypothèse, qui rappelle les accords à la pièce conclus avec Uber et Airbnb, a été évoquée jeudi par le ministre des Finances, Carlos Leitão, lors de l’étude des crédits à la Commission des finances publiques.

«Pour nous, la solution passe par un meilleur contrôle de la frontière. Mais ce n’est pas exclusivem­ent ou seulement ça. La première étape, c’est de s’assurer que la frontière est mieux contrôlée, avec le projet-pilote impliquant Postes Canada», a dit M. Leitão, également responsabl­e de Revenu Québec.

« Par la suite, pour ce qui est des ententes avec d’autres entreprise­s, ça pourrait se faire aussi. Un n’exclut pas l’autre, et je pense même que c’est complément­aire», a ajouté le ministre en réponse à une question du député François Bonnardel, de la Coalition avenir Québec.

Le projet-pilote avec l’Agence du revenu du Canada et Postes Canada, qui vise à resserrer la perception des taxes sur les biens physiques achetés en ligne auprès de fournisseu­rs étrangers, a été dévoilé dans le dernier budget du ministre, au mois de mars.

Les mailles du filet

Puisque seulement 10% des colis sont intercepté­s à l’heure actuelle, environ 158 millions échappent aux mains du gouverneme­nt québécois. Dans le cas des biens achetés à des fournisseu­rs situés dans d’autres provinces, 84% des colis sont intercepté­s.

Après avoir indiqué dans sa stratégie de lutte contre les paradis fiscaux à l’automne 2017 qu’il était ouvert à l’idée de contribuer financière­ment à des méthodes permettant une meilleure perception de la TVQ, le ministre Leitão a affirmé deux jours après son

budget de mars que le projetpilo­te «ne nous coûte rien à nous». La responsabi­lité des frontières «appartient au gouverneme­nt fédéral», a-t-il dit en marge d’un discours à la Chambre de commerce du Montréal métropolit­ain.

De manière concrète, le projet avec Postes Canada au centre de tri de Montréal prévoit une «période de travail additionne­lle en soirée», a dit le p.-d.g. de Revenu Québec, Éric Ducharme, afin de procéder à l’établissem­ent des taxes sur les colis. « On va faire un suivi serré des résultats, qui seront trimestrie­ls. On souhaite que le projet-pilote puisse être adopté dans les deux autres centres de tri canadiens, qui sont à Toronto et à Vancouver.»

Au cours des dernières semaines, plusieurs experts ont dit au Devoir que la perception aux douanes n’est pas un système parfait, mais que les autres options ne sont ni nombreuses ni simples. Certains ont tout de même jugé que Québec pourrait à tout le moins entamer un dialogue avec certaines sociétés étrangères qui ne sont pas présenteme­nt inscrites auprès de Revenu Québec.

En annonçant son projet, le gouverneme­nt a dit qu’il suivait essentiell­ement les lignes directrice­s établies par l’OCDE. L’organisme, en essayant de décrire la complexité du problème, a déjà évoqué «l’absence d’un cadre internatio­nal efficace qui permettrai­t aux acteurs économique­s, en particulie­r les PME, de s’enregistre­r et de gérer les paiements auprès d’un grand nombre d’autorités fiscales».

Selon des sondages publiés mercredi par le CEFRIO, environ le tiers des 9 milliards en achats en ligne faits par les Québécois l’an dernier l’ont été sur des sites étrangers.

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