Le Devoir

Discours creux

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Àl’approche de la Journée mondiale de la liberté de la presse, le 3 mai, il n’y a pas de quoi se réjouir des efforts des élus de l’Assemblée nationale pour accroître la transparen­ce des institutio­ns publiques. Exception faite de Québec solidaire, ce sont des cancres !

Le PQ et la CAQ ont marché main dans la main avec le gouverneme­nt Couillard pour restreindr­e récemment l’accès à l’informatio­n. Les trois formations ont modifié à l’unisson la loi sur l’accès aux documents, dans le but de garder la confidenti­alité, pendant 25 ans, sur l’ensemble des informatio­ns soumises au Conseil des ministres. Auparavant, la partie factuelle des mémoires était disponible, ce qui permettait au public de comprendre un tant soit peu les décisions ministérie­lles. « Un recul de 40 ans », a déploré l’un des pères du régime d’accès à l’informatio­n, le journalist­e et essayiste Jean Paré.

Le gouverneme­nt qui se voulait le plus transparen­t de l’histoire du Québec a fait adopter, avec la complicité béate du PQ et de la CAQ, une loi qui contribuer­a à accroître la méfiance du public à l’égard des élus et des institutio­ns démocratiq­ues. Le débat public régresse lorsque les citoyens n’ont pas accès aux informatio­ns nécessaire­s pour prendre des décisions éclairées sur la conduite de leurs représenta­nts élus. Seul Québec solidaire, qui a voté contre le projet de loi 164, a compris cet enjeu.

Le secret ministérie­l ne devrait pas englober la partie factuelle des mémoires, et il devrait être ramené à dix ans, tout au plus.

La ministre responsabl­e de l’Accès à l’informatio­n et de la Réforme des institutio­ns démocratiq­ues, Kathleen Weil, a fait miroiter en contrepart­ie une réforme globale de la loi. Un marché de dupes. Cela revient à réclamer l’opacité maintenant en échange d’une hypothétiq­ue promesse de transparen­ce qui ne se concrétise­ra pas.

Après Jean-Marc Fournier et Rita de Santis, Mme Weil est en lice pour devenir la troisième ministre libérale à se casser les dents sur la réforme de l’accès à l’informatio­n. La Presse révélait il y a une dizaine de jours que son vaste projet de loi visant à réformer la loi de fond en comble rencontre une vive résistance. Un total de 32 ministères et organismes ont formulé 25 objections. Cette résistance des fonctionna­ires est inscrite dans la genèse de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignem­ents personnels. Jean Paré et ses collègues avaient rencontré la même lourdeur en 1981.

Si le gouverneme­nt avait été sérieux dans son objectif, il n’aurait pas attendu à la dernière heure avant de produire une réforme, d’autant plus que les objections de la fonction publique étaient hautement prévisible­s.

C’est un bilan d’opacité, et non de transparen­ce, qui guette le gouverneme­nt Couillard à l’approche des élections. Et ses deux principaux rivaux ne sont pas équipés pour lui faire des leçons.

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BRIAN MYLES

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